Le Contrat Social - anno VI - n. 1 - gen.-feb. 1962

revue historitJue et crititjue Jes f ails et Jes idées - bimestrielle - JANV.-FÉV. 1962 B. SOUVAmNE .. : ...••....•....• ARTHUR A. COHEN ........... . WALTER KOLARZ .............. . Vol. VI, N° 1 Monolithisme de façade Le «maoïsme» Le communisme en Afrique occidentale L'EXPÉRIENCE COMMUNISTE E. DEL™ARS .................. . PAUL BARTON ................. . La jeunesse soviétique et ses ainés Périodisation de l'économie soviétique DÉBATS ET RECHERCHES AIMÉ PATRI ................... . K. PAP AIOANNOU ............. . Heidegger et le nazisme La fondation du marxisme (II) QUELQUES LIVRES Comptes rendus par THÉODORE RuvssEN, MICHEL CoLLINET, LÉON EMERY, CLAUDE Rœux, AIMÉ PATRI, PAUL BARTON CHRONIQUE « L'Ennemi de la Société» INSTITUT D'HISTOIRE SOCIALE, PARIS Biblioteca Gino Bianco

Au • somma1r.e des derniers numéros du CONTRAT SOCIAL MAI-JUIN 1961 B. Souvari ne Méconnaissancede l'Est K. A. Wittfogel Mao : doctrine et stratégie Léon Emery Astronautique et politique Heinz Schurer La révolutionpermanente E. Delimars Mentalité des cadres en U.R.S.S. Paul Landy Dictature et corruption N. Valentinov et E. Mach Marxisme et philosophie Chronique Le sort des « Nations Unies» SEPT.-OCT.1961 B. S. Ignominie de Staline B. Souvari ne Le Congrès du Programme· Robert C. Tucker Un credo de conservatisme Yves Lévy L'héritage idéaliste K. Papaioannou Le dépérissementde l'État Michel Collinet Le communisme et les nationalités Aimé Patri La scolastiquemarxiste-léniniste Documents Textes des trois programmes , .. JUILLET~AOUTl961 B. Souvarine Le programme communiste Yves Lévy Les partis et la démocratie (IV) K. Papaioannou L'idéologiefroide E. Papageorgiou · Le communisme en Grèce · Naoum lasny Le développementéconomique en_ U.R.S.S. Paul Barion Le système concentrationnairesoviétique Aimé Patri Dialectique du maitre et de l'esclave Chronique « Nations Unies » : faux problème NOV.-DÉC. 1961 B. Souvarine Un congrès «historique» K. A. Wittfogel Les ressortsdu communisme Léon Emery Propagandeet guerre psychologique Yves Lévy Parlementarisme et régime électoral f K. Papaioannou La fondationdu marxisme E. Delimars Lajeunesse soviétique Robert C. North Le lavage des cerveaux , Chronique Quarante ans après Ces num6ros sont en vente à l'administration de la revue, -~- 165, rue de l'Université, Paris 79 Le numéro : 2 NF Biblioteca Gino Bianco r

leCOMJ?il] rn,11r l1i.rtr>rÎt1ueet critiq1te JeJ /11itJ et deJ iJén JANV.-FÉV. 1962 VOL. VI, N° 1 SOMMAIRE Page B. Souvarine . . . . . . . . . . . . MONOLITHISME DE FAÇADE . . . . . . . . . . . . . . . . 1 Arthur A. Cohen . . . . . . . . LE « MAOISME » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5 Walter Kolarz . . . . . . . . . . LE COMMUNISME EN AFRIQUE OCClDENTALE 13 L'Expérience communiste E. Delimars . . . . . . . . . . . . . LA JEUNESSE SOVIÉTIQUE ET SES AÎNÉS . . . 21 Paul Barton . . . . . . . . . . . . PÉRIODISATION DE L'ÉCONOMIE SOVIÉTIQUE 27 Débats et recherches Aimé Patri . . . . . . . . . . . . . . HEIDEGGER ET LE NAZISME . .. . . . . . . . . . . . . . 37 K. Papaioannou . . . . . . . . . LA FONDATION DU MARXISME (li) . . . . . . . . 43 Quelques livres Théodore Ruyssen . . . . . . . CARNETS, de P.-J. PROUDHON . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 53 Michel Col li net . . . . . . . . . . SOCIOLOGIE.DE. L'UTOPIE. E.T AUTRES « ESSAIS ». de GEORGES DUVEAU . .. . . . .. . . . .. . .. . . . .. . . . . . . . . . . 55 CAPITALISMEE. .T CAPITALISTE.SFRANÇAIS AU X/Xe SIÈCLE., de GUY P. PALMADE . . . . . . . . .. . . . . . .. .. . . . . . . . . . . 57 Léon Emery . . . . . . . . . . . . GUERRE.SANS VISAGE., de PAUL MUSS. . . . . . . . . . . . . . . . 58 Claude Rieux . . . . . . . . . . . MARX, PENSE.URDE. LA TECHNIQUE., de K. AXELOS. . . 59 Aimé Patri . . . . . . . . . . . . . . PHILOSOPHIEM. ORALE, de JACQUES MARITAIN. . . . . . . . 61 Paul Sarton . . . . . . . . . . . . POLIT-ISOLATOR, de JEAN-PAUL SERBET. . . . . . . . . . . . . . . 63 Chronique « L'ENNEMI DE LA SOCl~T~ » ... , ................ , . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6-4 Livre, reç~• Biblioteca Gino Bianco

, OUVRAGES RECENTS DE NOS COLLABORATEURS Maxime Leroy : Histoire des idées sociales en France T. I. - De Montesquieu d Robespierre T. Il. -. De Babeuf d Tocqueville T. Ill. - D'Auguste Comte d Proudhon · Paris, Librairie Gallimard. 1946-1950-1954. Léon Emery: Corneille. Le Superbe et le Sage Lyon, Les ~ahiers libres, 3, rue Marius-Audin. Raymond Aron : Dimensions de la conscience historique Paris, Librairie Pion. 1961. Théodore Ruyssen : Les Sources doctrinales de l'internationalisme T. I. - Des origines à la paix de Westphalie T. Il. - De la paix de Westphalie d la Révolutionfrançaise T. Ill. - De la Révolutionfrançaise au milieu du X/Xe siècle Paris, Presses Universitaires de France. 1954-1958-1961. Lucien Laurat : Problèmes actuels du socialisme Paris, Les lies d'Or. 1957. Branko Lazitch : Tito et la Révolution yougoslave (1937-1956) Paris, Fasquelle. 1957. · Michel Collinet : Du bolchévisme ~VOLUTION ET VARIATIONS DU MARXISME-L~NINISME Paris, Le Livre contemporain. 1957. Paul Barton : L'Institution concentrationnaire en Russie (1930-1957) Paris, Librairie Pion. 1959. Biblioteca .Gino Bianco i

revue historique et critique Jes /aitJ et JeJ iJéeJ Janv.-Fév. 1962 Vol. VI, N° 1 MONOLITHISME DE FAÇADE INNOMBRABLES sont les déclarations des dirigeants communistes affirmant l'unité monolithique, voire le « monolithisme » de leur parti. Affirmations d'autant plus catégoriques et insistantes qu'elles paraissent contredire des faits bien évidents. Dès le premier jour du XXIIe Congrès tout récent, un orateur (K. T. Mazourov) se félicita de « l'unité monolithique » du Comité central, curieusement manifestée en 1957 par l'expulsion du groupe dit « antiparti » formant la majorité du Présidium. Un autre (V. N. Titov), le surlendemain, vanta « le renforcement de l'unité et du monolithisme » réalisé par le XXe Congrès (où Khrouchtchev avait prononcé son fameux discours secret). Un troisième (B. Ovezov), à la même séance, assura que le Parti était devenu « encore plus fort, plus monolithique ». Un quatrième (N. G. Ignatov), deux jours après, flétrit les dissidents qui « durent affronter le mur monolithique du Comité central». Selon un cinquième (P. A. Satioukov), « notre parti est uni, monolithe comme jamais». Etc. On n'en finirait pas de collectionner les propos de ce genre. Cependant l'importance accordée aux « antiparti », tou~ en les traitant maintes fois de « cadavres politiques » (A. N. Chélépine dixit, notamment), et l'ampleur des révélations ayant trait aux luttes intestines du Présidium ne témoignent pas précisément dans le sens du monolithisme. Au point que tous les commentateurs sérieux se demandent encore pourquoi les puissants du jour ont jugé nécessaire de piétiner ces « cadavres » pendant deux semaines, devant «l'élite» communiste réunie pour consacrer le nouveau programme du Parti, et de les vilipender, par la presse et la radio, devant un auditoire universel. Quant aux divergences de vues à l'intérieur du monolithe, on s'en faisait déjà quelque idée plus ou moins juste depuis la crise de juin 1957 où Khrouchtchev faillit perdre sa place et sa vie, mais jamais tant de renseignements et de précisions n'avaient divulgué les réalités en cours derrière la façade du monolithisme. Avant comme après la session du Comité central de juin 1957 où les principaux collaborateurs de Staline furent dénoncés, flétris et exclus du pouvoir, l'unité monolithique était un leitmotiv constant de la propagande officielle. Pourtant Biblioteca Gino Bianco des indices. parfois indéchiffrables démentaient cet optimisme de commande. La mort de Staline avait été suivie d'un épisode encore très obscur, d'où Khrouchtchev sortit en fait, sinon en titre, premier secrétaire du Parti, évinçant Malenkov (quelques mois plus tard, le titre ne fera que confirmer le fait). Sans l'intelligence de ce point de départ, tout le reste devient incompréhensible. Ensuite le monolithisme se traduisit par l'assassinat de Béria commis en pleine séance du Présidium, ainsi que par l'arrestation et la suppression ultérieure de V. Merkoulov, V. Dekanozov, V. Kaboulov, S. Goglidzé, P. Mechik, puis de V. S. Abakoumov, de M. D. Baguirov et de moindres personnages. On assista peu après à la rétrogradation continue de Malenkov, qui dut reconnaître en public son incapacité gouvernementale, et à l'humiliation de Molotov, qui s'avoua coupable de n'avoir pas remarqué le socialisme en U.R.S.S. Entre-temps, des indiscrétions polonaises et yougoslaves avaient indiqué une opposition de certains membres du Présidium à la politique de réconciliation avec Tito et le titisme. Il y eut aussi des signes implicites de mésentente lors de la décentralisation de l'économie, de la refonte des ministères industriels. De ces péripéties se dégageait une constante, l'appui indéfectible que la majorité du Comité central donnait à Khrouchtchev, son interprète, depuis qu'elle en avait fait son représentant principal au Secrétariat en écartant Malenkov. Il est impossible de savoir ce qui, dans l'orientation de la direction collective post-stalinienne, revient en propre à Khrouchtchev personnellement, et ce gui, élaboré par d'autres, devient aliment de sa politique. Toujours est-il qu'au Présidium se constituait peu à peu une majorité de mécontents, majorité contraire à celle du Comité central, disparate quant aux conceptions diverses, mais unie sur un point essentiel : la nécessité d'écarter Khrouchtchev et même de lui régler son compte à la façon dont Staline comprenait le monolithisme. Cette « majorité arithmétique », comme dira Khrouchtchev plus tard, composée momentanément de Molotov, Kaganovitch, Malenkov, Boulganine, Vorochilov, Pervoukhine, Sabourov et Chépilov, aurait eu facilement raison de Khrouchtchev, Mikoïan et Souslov en juin 1957

2 si elle avait disposé d'un appareil policier pour mettre son projet à exécution sur-le-champ. Mais ce n'était pas le cas et, pour la première fois depuis un bon tiers de siècle, le Comité central fit valoir ses droits statutaires en se réunissant d'urgence et en· s'épurant des gêneurs qui, ayant perdu la partie, furent anathématisés sous l'appellation de « groupe antiparti ». On les désignera ainsi, faute de mieux, dans l'analyse du monolithisme à la lumière des explications données au XXIIe Congrès et citées ci-après, tirées du compte rendu officiel. Ils voulaient, dit I. V. Spiridonov, « s'emparer de la direction du Parti et du pays afin de lutter pour le maintien de l'état des choses existant à l'époque du culte de la personnalité». On sait que par« culte de la personnalité», il faut entendre « tyrannie de Staline». Mikoïan précise que « les fractionnistes crurent le moment venu de s'emparer de l'autorité et de modifier la politique du Parti» quand fut décidée la réforme de l'organisation économique ; il ajoute que « la victoire du groupe antiparti aurait conduit à user de justice sommaire envers tous les partisans du xxe Congrès par des méthodes que le Parti ne pourra jamais oublier». En langage plus explicite, << justice sommaire » signifie assassinat et les « méthodes )> impliquent tortures et tueries. Selon I. G. Ignatov, le groupe antiparti se proposait de « décapiter la direction du Parti, changer la composition du Présidium derrière le dos du Comité central, s'emparer de la direction ... »; mais « il avait oublié, dans ses calculs, l'existence du Comité central dont les membres accordaient une confiance illimitée. à N. S. Khrouchtchev». Plus franc que les orateurs précédents, O. V. Kuusinen déclare que « l'objectif principal de ce groupe consistait à éloigner du Présidium .le camarade N. S. Khrouchtchev, continuateur de l' œuvre de Lénine, et à prendre toute la direction dans ses mains». F. R. Kozlov donne sa pleine signification au mot « éloigner » en assurant. que· -<< si··ces révoltés l'avaient emporté, ils n'auraient reculé devant rien pour atteindre leurs buts infâmes, ils auraient sévi contre des gens honnêtes et innocents ». Plus explicite encore sera N. N. Rodio~ov, en ces termes : « Si en 1957 les _gens du:. groupe antiparti avaient eu. le dessus, ils n'a.1:1r~ien-tpas _tenu compte de l'âge ni des q:iéri_tes_passés; ·aujourd'.hui, dans cette salle, de non:ilJr~ux•~.détégués manqueraient· à l'appel. De _nQuveaux et çru.~ls~ctes de répression se seraient ab~ttus sur notre parti, de nombreµx communistes fiçlèlesaurai~J.?.étté -jetés-enprison et liquidés. » Il s'agis•sait donc e.:1· 1957, pour Molotov et consorts, de · ressaisir le pouvoir en boutant Khroùchtchev hors du= Secr~tari 1t où 11 confiance .du- Comi~é- centr !l Pavait :placé ~n mars 1953 tandis. que Milenkov rétrograd1it alors au rang second·1ire de président .du,Co:1s~il. de, ministres. C'est l'échec de ce coup d'Etat qui) à r~t-~rdement, incite à divulgu-~r les dissensi ')US i:it..;rleures au monolithisme, contrairement à l'interprétation Biblioteca Gjno Bianco LE CONTRAT SOCIAL courante imputant à ces dissensions la crise de . 1957 mise en pleine lumière au Congrès de 1961. Sans la tentative de supplanter Khrouchtchev au Secrétariat, laquelle eût été suivie de massacres à la Staline, on eût ignoré longtemps les divergences de vues dissimulées derrière la façade monolithique. Les bolchéviks ont toujours largement discuté entre eux, dans leur cc cercle clandestin de dirigeants », les décisions pratiques à prendre, quitte à reconnaître l'opinion de la majorité comme loi commune (sauf, bien entendu, sous Staline, qui faisait loi à lui seul dans ses phases terroristes). Ce ne sont pas les désaccords secondaires qui motivent la disgrâce, c'est la disgrâce causée par la lutte pour le pouvoir qui motive la dénonciation des désaccords antérieurs. Il y a là une technique établie en tradition chez les ex-bolchéviks pour discréditer des· vaincus hors d'état de se défendre. Trotski n'avait pas été réprouvé, puis accablé, honni, banni, à cause de sa théorie sur la « révolution perma"'.'" nente » oubliée depuis 1905, ni en raison de ses anciennes querelles avec Lénine, ni à cause de sa conception du rôle des syndicats, etc., mais parce que sa prééminence après la mort de Lénine eût entraîné un renversement de majorité au Comité central, un renouvellement du Politburo et du Secrétariat; sa défaite n'a pas été due à la cc révolution permanente », mais au contraire les vieux griefs de jadis ont été exhumés par suite de sa défaite. De même Zinoviev, Kamenev et Boukharine étaient intangibles tant qu'ils servaient l'ascension de Staline; dès qu'ils se mirent à la desservir, l'oligarchie régnante ouvrit à leur détriment les vieux dossiers dépositaires de disputes périmées, étant admis comme vérité révélée que Lénine était infaillible, donc que quiconque détient le pouvoir perpétue l'infaillibilité de Lénine. On ne mentionne ici que des prototypes, mais la méthode s'applique à la multitude des déviationnistes, des hérétiques, des suspects. Le tour de Molotov et c~nsorts est venu, non parce qu'ils ont eu tort dans les controverses à huis clos, mais parce qu'ils ont manqué . leur coup contre Khrouchtchev, incarnation ·présente du Comité central. On apprend ainsi de source sûre quel était, avant juin 1957, l'envers du monolithisme ostentatoire. « Le Comité central s'est heurté à la résistance de Molotov, Kaganovitch, Malenkov et autres membres du groupe antiparti qui s'opposaient à plusieurs mesures économiques et politiques appliquées par le Comité central sur l'initiative de N. S. Khrouchtchev pour rectifier les erreu~ tolérées dans le passé ét stimuler l'économie du pays», dit en termes vagues K. T. Mazourov. Le groupe antiparti « est intervenu littéralement contre toutes les mesures du Parti concernant les plus importantes questions de politique intérieure et extérieure », à en croire D. S. Polianski. Ce groupe « s'opposait invariablement à toutes les propositions du camarade Khrouchtchev», confirme I. G. lgna-

B. SOUV ARINE tov. « Depuis des dizaines d'années, ils n'étaient allés nulle part, ne connaissaient vraiment ni la théorie ni la pratique», renchérit V. F. Ilitchev; « ils », ce sont les ex-dirigeants du Parti et de l'Etat, les plus proches collaborateurs de Staline, naguère tabous. Bref, les détenteurs· patentés de la science « marxiste-léniniste »n'étaient plus d'accord sur rien, mais formaient néanmoins un monolithe tant que le Secrétariat restait hors de cause. Sur quoi portaient les différends, en particulier? Les orateurs du Congrès en ont fait une longue énumération qui réfute singulièrement les apparences monolithiques. L. 1. Brejniev accuse plus spécialement Molotov et Kaganovitch de s'être opposés au « gigantesque objectif de mise en valeur des terres vierges». E. A. Fourtseva reproche au groupe antiparti d'avoir voulu empêcher « la réhabilitation des personnes ayant souffert injustement»; à Molotov, d'être intervenu contre une initiative de Khrouchtchev relative à la concentration des organismes responsables des travaux de construction, et contre les mesures prises pour améliorer l'agriculture et sa planification, pour défricher les terres vierges, pour transformer la direction de l'industrie. Selon D. Rassoulov, « l'agriculture soviétique a été à l'abandon, son développement a été freiné artificiellement, parce que Malenkov qui dirigeait à cette ·époque cette branche de l'économie, d'importance vitale, ne connaissait pas l'agriculture et ne voulait pas la connaître». Pendant les deux années précédant le XXe Congrès, dit A. I. Mikoïan, il y eut des « désaccords sur les problèmes fondamentaux de la politique et de la pratique »; les antiparti « rejetaient tout ce qui était nouveau», ils « s'opposèrent à la liquidation des conséquences néfastes du culte de la personnalité, se prononcèrent contre les mesures commandées par la vie, telles que la transformation de la direction de l'Etat, de la direction de l'économie, de la planification, en particulier dans l'agriculture, l'utilisation des terres vierges, etc.». Molotov, continue Mikoïan, repousse la « coexistence pacifique », conteste « l'utilité des rencontres personnelles » des dirigeants soviétiques « avec ceux des Etats capitalistes ». Une kyrielle d'orateurs ayant. répété une cinquantaine de fois les mêmes griefs, on ne retiendra ci-après que les précisions nouvelles. V. V. Grichine ajoute que les coupables (qui n'ont pas la parole) se sont élevés « contre la démocratisanon de la vie sociale du pays», ce que confirme M. A. Souslov disant qu'ils ont combattu « la démocratie à l'intérieur du Parti, le rétablissement de la légalité révolutionnaire ». I. G. lgnatov se décide à donner, enfin, l'argument de Molotov contre l'exploitation des terres vierges : « l'entreprise ne serait pas rentable »; il caractérise l'ancien s~crétaire du Parti et président du Conseil des commissaires du peuple, ministre des Affaires étrangères, « héros du Travail socialiste », membre de l'Académie des sciences, quatre fois titulaire de l'ordre de Lénine, en ces termes : « Tout le Biblioteca Gino Bianco 3 monde sait (sic) que cet arrogant s'est toujours montré brouillon, dans le domaine des relations internationales comme dans celui du développement du pays. Il a commis maintes erreurs quant aux voies et possibilités d'édifier le communisme, quant à l'évaluation des forees du socialisme et de l'impérialisme, à la coexistence d'Etats à systèmes sociaux différents, aux moyens d'éviter une guerre mondiale, aux formes de transition des divers pays vers le socialisme. Ce n'est pas un effet du hasard, Molotov a toujours été un dogmatique incorrigible, dénué de toute notion de la réalité. » Portrait indulgent, mais juste, du bolchévik modèle, intégral, invétéré, qui se flatte d'être le seul survivant de l'équipe sélectionnée par Lénine. Au catalogue des méfaits du groupe antiparti, N. A. Moukhitdinov inscrit une « opposition furieuse à l'élévation du rôle et à l'élargissement des droits des Républiques de l'Union soviétique, au renforcement de leur souveraineté » ; en outre, il accuse le groupe d'incurie en matière ... de culture du coton. V. 1. Ilitchev s'élève dans les hauteurs de l'idéologie en rappelant que cc les ouvrages de Marx, Engels et Lénine ont été objectivement rabaissés » au temps du culte de Staline, dont les antiparti sont co-responsables, et qu'il n'est pas fortuit « que pendant plusieurs dizaines d'années il n'y ait pas eu dans notre pays d'œuvres marquantes sur l'économie politique, la philosophie et l'histoire»; en 1937, un groupe d'économistes avait entrepris de composer un manuel d'économie politique : « Plus de dix variantes furent élaborées, mais aucune ne parut. » Enfin, dit-il, « il est difficile d'imaginer le nombre d'obstacles auxquels se heurta la rédaction d'une biographie scientifique (sic) de Lénine ». Etc. A noter que la stérilité intellectuelle « pendant des dizaines d'années », reconnue par Ilitchev, équivaut à la durée du régime soviétique et sous la domination du Parti détenteur de la vérité absolue ainsi que du sens de l'histoire. Dans le même ordre d'idées, B. N. Ponomarev révèle que « Molotov et Kaganovitch, écumant littéralement de rage, se dressèrent contre l'idée même d'écrire un nouveau manuel d'histoire du Parti », lequel devait remplacer le Précis apologétique de Staline. (Le nouveau manuel ne vaut d'ailleurs pas mieux que l'ancien quant à la véracité; Ponomarev en est le principal rédacteur.) Les critiques se font encore plus acerbes avec P. A. Satioukov : « La poignée de fractionnistes habitués à l'atmosphère confinée du culte de la personnalité, pareils aux habitants des marais à leur aise dans la vase et la boue, accueillirent mal la nouvelle ligne du Parti. En quoi, demandaientils, sont nécessaires ces voyages à travers le pays, à quoi bon toutes ces conférences, ces rencontres dans les kolkhozes, sur les chantiers, dans les usines ?... On vivait bien sans cela et l'on continuerait bien à s'en passer. » A. 1. Adjoubeï aussi dira, comme avant lui Mikoïan : « Molotov s' oppose aux contacts de nos hommes d'Etat et •

4 représentants du Parti avec les hommes. politiques étrangers, il est contre les déplacements à l'extérieur.» P. N. Pospelov s'en prend à Molotov qui se permet de dénigrer le nouveau programme du Parti, qui après avoir « voté· toutes les résolu:- tions du xxe Congrès» s'attaque maintenant .à la thèse « concernant la possibilité de conjurer une nouvelle guerre mondiale ». Sur ce dernier point, les antiparti seront encore maltraités par M. T. Efremov, comme « adversaires de la nouvelle ligne de notre gouvernement en politique extérieure ». Affirmation peu convaincante, car Staline a plusieurs fois prôné la « coexistence pacifique» que Khrouchtchev autant que Molotov regarde comme une forme de « guerre froide». De l'énorme fatras des réquisitoires prononcés ~u Congrès, il est malaisé de dégager quelque chose de cohérent, d'autant plus que les mesquineries voisinent avec les pires imputations et les plus sanglantes injures. C'est ainsi que le président de l'Académie du bâtiment et de l'architecture, V. A. Koutcherenko, prend "à partie Kaganovitch, « lequel militait avec brutalité pour des solutions architecturales erronées », alors qu'avant et après ce grief, le même déchu ét~it et sera taxé d'infamie, de crimes épouvantables. Car outre le règlement de comptes ayant trait à la période écoulée depuis la mort de Staline, il y a une revue rétrospective partielle de la période antérieure, celle de la terreur dont des millions d'innocents ont été victimes sous Staline. Les dirigeants actuels ne sont pas enclins à avouer la vérité sur cette sinistre phase de l'histoir~ soviétique où ils ont trempé comme complices de ceux qu'ils condamnent · de nos jours, pas plus qu'ils ne peuvent se désolidariser du pacte conclu par Staline et Molotov avec Hitler et Ribbentrop pour provoquer la guerre en 1939. Mais ils jugent expédient de dévoiler certains épisodes propres à déshonorer leurs compagnons d'hier ou d'avant-hier, auxquels ils n'accordent pas le droit de se défendre. En quoi la « déstalinisation » relative entreprise par Khrouchtchev au nom de la direction collective s'accomplit par des moyens hérités de Staline. Le chapitre des atrocités dont les xxe et XXIIe Congrès ont eu l'avant-goût méritera d'être .traité à part. Aucun critique sérieux du régime soviétique, en pays libre, n'a jamais avancé ni envisagé la centième partie de ce que les congressistes ont entendu à titre d'échantillons tirés des ... dossiers entrouverts. Pour s'en tenir aux zizanies post-staliniennes masquées par les apparences monolithiques, on peut admettre en conclusion les caractéristiques formulées par les parvenus du communisme pour définir les deux tendances antagoniques issues de l'école dite marxisteléniniste :- toutes deux dogmatiques en réalité, le nouveau programme du Parti le prouve, mais l'une un peu moins figée que l'autre et plus volontiers encline à s'adapter aux « exigences de la vie », comme l'ont ressassé ses orateurs au Congrès. Si celle de Khrouchtchev peut se vanter «·d'esprit novateur » (Satioukov dixit) et blâmei Biblioteca Gino Bianco LE CONTRAT SOCIAL le «conservatisme» de celle de Molotov, elle n'en perpétue pas moins la tare foncière du stalinisme : le mensonge intégral, dosé selon les besoins du jour. Si celle de Molotov peut se targuer d'orthodoxie et dénoncer le « révisionnisme »de celle de Khrouchtchev, elle n'en devient pas plus capable de rompre la « coexistence pacifique » pratiquée avant Khrouchtchev par Staline. Certes, le renoncement à la saignée permanente dans la médecine politique du régime est un fait majeur appréciable, mais Staline lui-même n'aurait pu saigner indéfiniment ses sujets et Khrouchtchev ne se risque à ses expériences qu'à la faveur du sang versé avant lui. Encore la direction collective ne s'est-elle pas privée d'user de la peine de mort en grand mystère pour purger et reprendre en main sa police secrète. Le dernier mot n'est pas dit sur les controverses qui ont lézardé le monolithe. Si les antiparti ~ craignaient les conséquences du déboulonnage de Staline, les événements de Pologne, de Hongrie et d'ailleurs ne leur ont pas donné tort. Si Molotov a prévu que Tito ne se laisserait plus incorporer au pseudo-bloc communiste, la suite lui a plutôt donné raison. Ceux qui pensaient que l'exploitation des terres vierges ne serait pas rentable ne sont pas encore réfutés par l'expérience. La décentralisation de l'économie donne des résultats peut-être discutables, et dont on ignore le prix. Il est vrai que le niveau de vie a dû s'améliorer sensiblement après Staline, mais parce que le pouvoir a recours aux stimulants individuels : la production augmente par des voies et moyens capitalistes, non par la grâce du communisme. Quelque odieux que soient les sectateurs et zélateurs de Staline, ils ne seraient éventuellement pas en aussi mauvais posture dans leur milieu si ne leur était appliqué aussi strictement le bâillon : la peur de publier les écrits certainement stupides de Molotov ne témoigne guère pour les maîtres· de l'heure. Que ceux-ci n'aient pas encore exclu du Parti leurs contradicteurs couverts de h~nte et c~argés d'anath~mes, après la tapageuse · mise en scene du Congres, on doute que ce soit par grandeur d'âme. Du · point de vue « marxiste-léniniste », donc stalinien, commun aux novateurs et aux conservateurs,. aux révisionnistes et aux dogmatiques, la que_sp.~nessen~ielle r~ste en~èr~ : le régime soviettque a-t-tl fonde le socialisme et va-t-il établir le communisme ? Les affirmations tranc~aJ?,t~s~e Khrouc~tchev contr~dites par des réalites criantes ne tiennent pas heu de réponse, non plus que les citations de Lénine dont le stock inépuisable fournit même celle-ci, qui offre m~tièr~ â méditation au c~ef ~écanicien de l'apparetl d Etat pseudo-proletarien : « La machine [étatiqueJ échappe des mains : quelqu'ün semble la condwre, et elle ne va pas là où on la dirige, elle prend une direction où la pousse on ne sait qui ou quoi, quelque chose d'illégal, · d'illicite, venant Dieu sait d'où... » · B. SOUVARINE•.

'" LE MAOISME par .Arthur A. Cohen L1ou CHAO-TCHhI,éritier présomptif de Mao Tsé-toung à la tête du parti communiste chinois, prétendait en 1945 que Mao avait énoncé une «théorie» de la révolution chinoise constituant un « développement » nouveau de la doctrine communiste pour la conquête révolutionnaire du pouvoir. C'était l'amorce d'une énorme campagne destinée non seulement à porter aux nues l' « idéologie de Mao » comme l'unique guide pour le Parti et le peuple chinois, mais aussi à populariser l'image du leader chinois en tant que plus grand théoricien vivant du mouvement communiste mondial. Selon un porteparole du P. C. chinois, Mao aurait_fourni plus de quatorze contributions importantes à la doctrine communiste. Les prétentions de Mao à la primauté idéologique figurent parmi les questions épineuses entre Moscou et Pékin. Ne serait-ce que pour cette raison, il semble à propos de revenir sur ces prétentions, d'autant plus qu'elles demeureront probablement un facteur actif dans les rapports sino-soviétiques même après la mort de Mao, de même que les évaluations divergentes de l'apport de Staline jouent un rôle dans ces rapports depuis la disparition de l'ancien maître du Kremlin. Mao, philosophe marxiste LE PREMIER domaine dans lequel, selon les communistes chinois, Mao aurait fourni un apl'ort créateur d'importance est la philosophie marxiste, surtout en ce qui concerne l'étude détaillée du matérialisme dialectique marxien. Ces prétentions se fondent sur deux essais attribués à Mao - Sur la pratique et Sur la contradiction - qu'on affirmeavoirété écritsen 1937, maisqui n'ont été Biblioteca Gino Bianco publiés, sous leur forme actuelle, qu'en 1950 et 1952 respectivement. Les théoriciens chinois prêtent à Sur la pratique des formulations théoriques originales à deux égards. Pour Li Ta, l'essai est un« développement de la théorie de la pratique marxiste-léniniste », alors. que pour d'autres, tel Aï Ssou-tchi, il « éclaircit et développe le célèbre principe de vérité absolue et de vérité relative d'Engels et de Lénine». Il est difficile d'accepter cela comme argent comptant. L'affirmation de Li semble indéfendable puisque ledit texte n'est guère qu'une paraphrase des idées de Lénine sur la théorie de la connaissance exposées dans ses Cahiers philosophiques et dans Matéri.alismeet Empiriocriticisme. Quant à la thèse de Aï., une lecture approfondie de l'essai de Mao fait apparaître sa part personnelle comme une simple répétition, plutôt qu'un enchaînement créateur, d'idées déjà exposées dans Matéri.alismeet Empiriocriticisme de Lénine et dans l' Anti-Dühring d'Engels. Il n'ajoute rien non plus ni aux idées d'Engels et de Lénine concernant l'apparence et l'essence ni à la reformulation critique de Marx sur la « primauté de la pratique dans la connaissance », telle qu'on la trouve dans les écrits d'Engels, de Lénine et de Staline. Ainsi Mao ne présente nulle part dans Sur la pratique d'idée réellement nouvelle et n'apporte rien d'utile à la doctrine du matérialisme dialectique sur la pratique. Bien au contraire, dans un commentaire plutôt exceptionnel publié dans une revue communiste chinoise, le professeur Feng You-lan, probablement le plus grand historien contemporain de la philosophie chinoise, reconnaît que des philosophes chinois prémodemes

6 - en particulier Mo Ti, Wang Tchoung et Wang Tchouan-chan - avaient déjà exposé toutes les idées de Mao sur le rôle de la pratique dans le processus de la cognition 1 • Dans le second essai philosophique de Mao, Sur la contradiction, l'argumentation chinoise est également outrée, quoique peut-être un peu moins fragile. Af Ssou-tchi prétend que, là, Mao « développa l'idée géniale de Lénine que " la dialectique, brièvement définie, est la théorie de l'unité des contraires " » et qu'il « donna une définition plus complète des rapports corrects entre la contradiction intérieure et la causalité extérieure dans l'évolution des choses ». En réalité, l'essai n'avance rien de nouveau ni sur l'unité des contraires ni sur la « particularité » de la contradiction; il n'en fait guère plus pour « donner une définition plus complète » des lois de la causalité qui dépasse le concept de « l'automouvement nécessaire » des choses, tel qu'il est énoncé dans la Logique de Hegel et dans les écrits d'Engels et de Lénine. Mao semble bien tenir une formule originale lorsqu'il soutient que toute contradiction possède un « aspect principal » qui détermine le changement qualitatif; mais son originalité, en tant que matérialiste dialectique et philosophe marxiste, se borne à cette idée plutôt suspecte. Outre leur valeur réelle en tant qu'apport à la_philosophie marxiste, la question se pose de savoir si c'est bien en 1937, comme le prétendent les communistes chinois, que les deux essais ont été écrits dans leur forme actuelle. Suivant la version officielle, Sur la pratique aurait été rédigé en juillet et Sur la contradiction en août de cette année-là. Les introductions à ces essais dans les vol. I et II des Œuvres choisies de Mao (parus respectivement en octobre 1951 et en avril 1952) affirment qu'à l'origine Mao les présenta sous forme de conférences à Yenan en 1937 .et un commentaire qui accompagne Sur la contradiction suggère que le texte primitif a été révisé avant d'être inclus dans le vol. II. EN RÉALITÉ, des preuves importantes viennent infirmer cette version des faits. Tout d'abord, il semble que Sur la pratique ait paru pour la première fois en Chine dans l'organe central du Parti, le Quotidien du peuple, le 29 déc. 1950 (il parut également dans la revue soviétique Bolchévik, n° 23, déc. 1950, et fut commenté dans la Pravda le 18 déc. 1950) ; Sur la contradiction parut également pour la première fois en Chine dans le Quotidien du peuple le 1er avril 1952. Bien que des recueils des œuvres principales de Mao aient paru au milieu des : 1. Feng You-lan : « Sur la pratique, de Mao Tsé-toung, et la philosophie chinoise », in Chine populaire, Pékin, 16 nov. 1951. Cependant, Feng se sentit obligé de conclure que Mao avait << résolu un problème qui avait attiré l'attention de tant de brillants esprits à travers les siècles ». Biblioteca Gino Bianco LE CONTRAT SOCIAL années 40, ils ne portaient pas trace de l'un ou l'autre de ces essais. De plus, dans un article philosophique publié en mai 1941, !'écrivain communiste Hsiao Tchou traitait précisément de la théorie de la pratique sans faire allusion au prétendu essai de Mao sur le même sujet 2 • Il est .également curieux que le vol. I des Œuvres choisies de Mao, édité en octobre 1951, comprenne Sur la pratique et non Sur la contradiction et que cet essai ait paru en dépit de l'ordre chronologique dans le vol. II, publié en avril ' 1952, illlll!édiatement après qu'il eut été rendu public pour la première fois dans le Quotidien du peuple. La déclaration du comité d'édition des œuvres de Mao, laquelle apparaît sur la page de garde du vol. II, n'est pas faite pour élucider ce mystère ; elle reconnaît seulement que Sur la contradiction « aurait dû paraître dans le vol. I pour s'accorder avec la chronologie de l'auteur », ~ ce qui serait fait lors de la prochaine réédition. Cela semble indiquer qu'en octobre 1951, lors de la parution du vol. I, Sur la contradiction n'était pas encore prêt. Une autre raison de douter de la version chinoise est le contraste flagrant, quant à la qualité de la pensée marxiste, entre Sur la pratique et -Sur la contradiction, so:qs leur forme de 1950 et 1952, d'une. part, çt un autre exemple de la prose phiJosophique de Mao qui remonte à 1940, d'autre ·part. Celui-ci, fragment d'un essai sur le matérialisme dialectique 3 , semble être le seul échantillon de philosophie marxiste écrit par Mao et p~blié avant 1950; il jette une lumière crue sur l'aspect primaire de ses idées philosophique~.de_rép9que. Mao y commet beaucoup d'erreurs; entre autres en attribuant aux « idéalistes » des opinions professées en réalité par des marxistes compétents ; le tout est un fatras de déclarations discutables, aussi bien du point de vue philosophique que dû point de vue marxiste. Même les lieutenants de Mao semblent avoir considéré l'essai comme une catastrophe. Selon le général C_heng Chih-tsaï, seigneur de la guerre de la province. du Sin-kiang, Fan Lin, communiste de Yenan, aurait refusé de lui communiquer l'essai en 1940, ajoutant : « Vous feriez mieux de ne pas le. pre. Du point de vue théorique, la· djal_ectique·du président Mao est pleine d'erreurs 4 • » ·· Si telle était la qualité de la pensée philosophique de Mao en 1940, il est difficile de croire que les conférences qu'il aurait faites à Yenan en 1937 sur les théories marxistes de la pratique et de la contradiction aient pu être moins primaires ou naïves. En revanche, Sur la pratique et Sur la contradiction, sous leur forme de 1950 et 1952,. sont le fait d'un théoricie11q: ui, sans être 2. · « Etudiez la théorie ·et la pratique », in les Masses, _ vol. IV, n° 14, 20 mai 1941, pp. 397-400. 3. « Matéri~isme dialectique, 28 ·p~rtie~»,-in Démocratie, Shanghai, vol. I, n° 2, mars 1940... , , . ·. 4. Allen S. Whiting_ ~t gén~ra,l -C.h.,engChih-tsaï : Sinkiang - Pawn or Pivot'?· Michigan S~atè ·university Press, 1958, pp. 229-31. . . ..

A. A. COHEN un penseur original., suit du moins une ligne marxiste-léniniste correcte et orthodoxe. Il semble donc raisonnaole de conclure : ou bien les versions publiées ont été écrites beaucoup plus tard que ne le prétendent les communistes., ou bien les prétendues conférences de 1937 ont été tellement remaniées qu'il s'agit en fait de textes tout à fait différents. Théorie de la révolution de Mao VOILA ce qu'il en est de la prétention de Mao au titre de « créateur » en matérialisme dialectique marxiste. Cela dit, a-t-il le droit de prétendre plus sérieusement à l'originalité en ce qui concerne les principes du processus révolutionnaire ? Les communistes chinois reconnaissent, il est vrai, que l'analyse générale des problèmes de la révolution chinoise due à Mao se conforme essentiellement aux concepts de Lénine et de Staline. Tchang Jou-hsin, par exemple, écrivait en 1953 que, au cours de la première guerre civile révolutionnaire · (1924-27), «le camarade Mao Tsétoung (...) disciple fidèle et compagnon d'armes de Staline.,confirmait les points de vue de Lénine et Staline sur les problèmes de la révolution en Chine» 6 • Néanmoins, les Chinois soulignent la valeur originale des conclusions de Mao, fruit de sa propre analyse des conditions régnant en Chine et non emprunt pur et simple aux idées de Lénine et de Staline. Tchang Jou-hsin dit encore (dans l'article cité plus haut, lequel était en fait un hommage à Staline, publié peu après la mort de celui-ci), que Mao arriva «aux mêmes conclusions que Staline quant aux problèmes fondamentaux de la révolution chinoise ». Un autre auteur chinois, Chen Tchih-youan, abonde dans le même sens dans un article publié en 1952. Tout en reconnaissant ce que, d'une manière· générale, Mao doit à Lénine et Staline., il tempère ce point de vue en constatant qu'en 1924-27 lesécrits de Lénine et de Staline «n'avaient été que très peu répandus en Chine ». Pourtant., ajoute-t-il, le président Mao avait déjà terminé à l'époque, ou même un peu avant, son analyse des classes dans la société chinoise et son rapport sur le mouvement paysan du Hounan (...) en faisant preuve d'un pouvoir de réflexion indépendant». Mais Tchang aussi bien que Chen oublient tout simplement de dire que la politique des communistes chinois au milieu et à la fin des années 20, ainsi que ses justifications théoriques, furent dictées par les nombreuses directives du Comintern, inspirées et approuvées par Staline. Ce qui n'empêche point les Chinois de renchérir en faveur de Mao. Tchen Po-ta, panégyriste en chef, écrivait en 1951 (\UeMao « s'en tenait fermement à (...) la théorie de Lénine-Staline 5. • Les grandes contributions th~oriqucs de Staline à la r~volution chinoise •, in Quotidien du peuple, P~kin, 3 avril 1953. Biblioteca Gino Bianco 7 sur le 'leadership du prolétariat et développait cette théorie de manière concrète » 6 ( souligné par nous). Tchen faisait allusion au concept du leadership prolétarien plutôt que bourgeois de la première étape de la révolution qui visait à renverser cc le féodalisme et la monarchie». Or on ne voit pas en quoi Mao a « développé » la thèse de Lénine, soutenue dès 1905 dans Deux tactiquesde la social-démocratiedans la révolution démocratique: le prolétariat doit être le « leader » et non pas un auxiliaire de la bourgeoisie dans l'accomplissement ·de la révolution bourgeoisedémocratique. Tchang Jou-hsin prétend que Mao fut le premier à proposer la double thèse selon laquelle les révolutions dans les pays arriérés, telle la Chine., sont avant tout des révolutions paysannes et que les paysans pauvres sont la force principale et l'allié le plus sûr des ouvriers. Ce faisant, Tchang passe sous silence l'un des. premiers écrits de Lénine, Le Programme agraire de la social-démocratie (1907), qui atteste que, longtemps avant Mao, il avait reconnu le rôle important du paysannat, surtout du paysannat pauvre, au cours de la première étape du processus révolutionnaire. Lénine écrivait : Nous devons avoir une idée claire du caractère et de la signification de la révolution agraire paysanne comme une des variantes de la révolution bourgeoise ... Certains marxistes, ceux de l'aile droite, n'ont pas cessé de donner dans une conception abstraite, stéréotypée de la révolution bourgeoise, et n'ont pas su voir les traits particuliers de la révolution bourgeoise actuelle, qui est très exactement une révolution paysanpe. Dans le même ouvrage, Lénine avait parlé du « prolétariat rural » comme de la force révolutionnaire principale dans les campagnes, utilisant ce terme dans le sens que lui avait prêté Engels dans La Questionpaysanne en France et en Allemagne (1894), c'est-à-dire pour distinguer les ouvriers agricoles des grands et petits propriétaires fonciers. Des contemporains de Lénine en apportent de nouvelles preuves. Critiquant le programme de révolution de Lénine, le leader menchévique Georges Plékhanov écrivait (dans La Classe ouvrière et l'intelligentsia social-démocrate) : « Ce n'est pas le marxisme que nous trouvons dans les vues de Lénine, mais, pour user d'un terme mal famé, l'insurrectionnisme paysan, une nouvelle version de la théorie des héros qui mènent la racaille. » En 1924, Zinoviev voyait la clef du léninisme dans l'importance que celui-ci attachait à la question agraire. « Le léninisme, écrivait-il, c'est le marxisme à une époque de guerre impérialiste et de révolution mondiale qui commença sans étapes intermédiaires dans un pays où le paysannat prédomine 7 • » 6. • La théorie de la révolution chinoise de Mao Tsbtoung est l'intégration du marxisme-léninisme à la pratique de la révolution chinoise », in Hsueh-hsi, Pékin, 1"r juillet 1951. 7. • Bolchévisme ou trotskisme », in Pravda1 20 nov. 192+

8 AINSI, aucun écart du léninisme ne s'était produit ni lorsque Peng Paï, membre du P. C. chinois nouvellement constitué, se rendit dans les campagnes de la province du Kouang-toung en 1921 · pour organiser les paysans, ni lorsque Mao lui-même fit, en 1927, une enquête sur les soulèvements révolutionnaires des paysans dans la province du Houn:an. Le résultat des investigations de Mao fut son Rapport sur une enqtdte dans le mouvementpaysan du Hounan de févr. 1927, peut-être le plus frappant de ses écrits. Il y donne un aperçu de la force et du potentiel révolutionnaire du mouvement paysan du Hounan, en accordant aux associations paysannes 70 % du travail rév_olutionnaire et seulement 30 % à la population citadine et aux unités militaires. Tout porte à croire qu'à l'époque les compagnons de Mao - ainsi que le Comintem - voyaient dans les résultats obtenus un simple aperçu, utile et exact, du potentiel révolutionnaire du paysannat du Hounan et non une nouvelle « théorie » hérétique de la révolution. Le fait que le rapport ai~ été publié à la fois dans la revue officielle du P.C. chinois et à Moscou en est une confirmation. (Il en fut de même des rapports de Peng Paï traitant de l'organisation du premier soviet rural en Chine.) Ce ne fut qu'après 1950, lorsque les communistes chinois se mirent sérieusement à vouloir fonder le prestige de Mao en tant que « théoricien» illustre, que son rapport de 1927 se trouva paré d'une nouvelle auréole d'originalité doctrinale. Ce qui, jusque-là, avait été considéré simplement comme un bon reportage sur le terrain, fut élevé au rang d'une brillante analyse « théorique » marxiste-léniniste de la révolution chinoise en général. (Dans ce nouvel esprit, l'allusion de Mao au rôle minime de la population citadine dans les révoltes du Hounan fut passé sous silence dans le vol. I des Œuvreschoisies paru en oct. 1951.) Mais, même en admettant que le rapport de Mao puisse être interprété en tant qu'esquisse d'une «théorie » de la révolution, le fait qu'il ait reconnu le paysannat comme force révolutionnaire importante peut difficilement passer pour un progrès par rapport aux idées de Lénine. Stratégie et tactique de Mao LES PREMIERÉSCRITSde Mao ne contiennent donc rien qui puisse être qualifié de développement créateur de la doctrine communiste révolutionnaire. Mais l'argumentation chinoise en faveur de Mao n'en reste pas là. Suivant une thèse communiste bien connue, en arrêtant la stratégie et la tactique, le chef du Parti contribue, au moment de la révolution, à la révolution elle-même. A étendre ainsi l'acception de la « théorie », on peut en effet accorder à Mao deux contributions originales : la stratégie de la révolution à partir de bases rurales autono- ~es et la tactique de la guerre de partisans, Biblioteca Gino Bianco . LE CONTRAT SOCIAL Pour Tchen Po-ta, Mao aurait « élaboré une série de ·conclusions (...). selo1;1lesq1:1elles i! ét~it possible pour la révolution d obterur la victoire d'abord dans les campagnes et d'y créer des bases révolutionnaires d'appui ».Mao énonça ces conclusions dans un rapport de nov. 1928, La Lutte dans le Tsingkangchan, où il énumérait les con~- tions nécessaires pour établir ces bases et fo~mulait un plan précis d'organisation. On peut raisonnablement soutenir que cette stratégie de Mao concernant la lutte révolutionnaire en Chine constituait un progrès pratique par rapp~rt aux idées générales de Lénine sur la fondation de soviets paysans dans les pays arriérés. Tchen relève la guerre de partisans comme un autre trait distinctif de la stratégie révolutionnaire de Mao. Cela semble également justifié, bien qu'il soit difficile de déterminer en l'occurrence la part qui revient à Tchou Té, décrit avant guerre par un observateur militaire américain comme « le plus illustre dans ce domaine» 8 , ou encore à d'autres chefs militaires communistes chinois. Le fait que les publications communistes chinoises passent sous silence, depuis quelques années, les nombreux écrits de Tchou sur la guérilla, sur la tactique de la guerre longue, sur «l'attaque-éclair», suggère que l'on cherche à étouffer la flamme de Tchou pour que celle de Mao puisse brûler avec plus d'éclat. Cependant, l'important est que l'idée de Mao de déclencher une lutte révolutionnaire prolongée à partir de bases rurales autonomes en utilisant la tactique des guérillas fut conçue non comme une «théorie»générale de la révolution, mais comme une stratégie concrète pour s'emparer du pouvoir dans les conditions spécifiques qui prévalaient en Chine. Or '.sonidée était dictée par ces conditions et était sans doute la seule stratégie permettant aux communistes chinois de continuer la lutte révolutionnaire. L'attitude de Mao envers la prise du pouvoir n'a pas cessé d'être pragmatique plutôt que théorique; elle s'appuyait sur la nécessité de vaincre par n'importe quel moyen disponible sur le moment. Dès lors, ses écrits justifient des actions très diverses, se prêtant à presque toutes les circonstances. LESPANÉGYRISTdEeSMao tentent même d'éri- ·ger sa manière pragmatique et de simple bon sens en un nouveau précepte de la statégie communiste. Saluant la publication du vol. IV de ses Œuvres choisies paru en nov. 1960, deux auteurs communistes chinois appellent le concept du« tigre de papier», qui consiste à« négliger l'ennemi sur le plan stratégique et à en tenir compte sur le plan tactique », « un nouveau développement d'immense importance dans la théorie 8. Major Evans F. Carlson : « The Chinese Army. lts Organization and Military Efficiency », in Institute of Pacifie Relations, vol. VU, sect. 3, 6 oct. 1939, p. 20.

A. A. COHEN marxiste-léniniste de la stratégie et de la tactique». En fait, il ne s'agit que d'une platitude. Presque tous les leaders révolutionnaires, y compris de nombreux nationalistes non communistes, ont fait preuve de prudence devant une force ennemie supérieure. Staline lui-même était passé maître dans l'art de dédaigner l'ennemi « sur le plan stratégique »,alors qu'il manifestait de la prudence « sur le plan tactique». Après tout, seul un fou n'agirait pas prudemment si le « tigre de papier» se révélait, pour un temps, doué des qualités d'un véritable tigre. Encore un mot de la stratégie de la révolution de Mao. Ses écrits de 1928, dans lesquels il formulait l'idée des bases révolutionnaires rurales, impliquaient que cette stratégie pouvait s'appliquer tout spécialement aux conditions politiques et géographiques de la Chine. Cependant, à partir de 1949, les communistes chinois commencèrent à soutenir que la formule de Mao, à présent désignée comme « la voie de Mao Tsé-toung », fournissait un modèle de stratégie pour tous les pays arriérés. C'est pourquoi, lors de l'inclusion dans le premier vol. des Œuvres choisi,es, en 1951, de Pourquoi le pouvoir rouge peut-il exister en Chine? (écrit en oct. 1928), une note fut ajoutée pour souligner que l'expérience révolutionnaire chinoise pouvait s'appliquer à d'autres pays « de l'Orient ». Voici le passage-clé de la note : C'est ainsi que les peuples des pays coloniaux d'Orient, du moins un certain nombre d'entre eux, ont eu la possibilité de préserver, à peu près comme cela avait été le cas en Chine, des bases révolutionnaires de dimensions variées et le pouvoir révolutionnaire pendant une longue période, de mener fermement une guerre révolutionnaire de longue durée, d'encercler des villes situées au centre des campagnes insurgées et de passer progressivement à la conquête des villes, à la réalisation de la victoire totale dans leurs propres pays 9 • La formule chinoise est une épine dans le flanc de Moscou, d'autant plus que le régime de Pékin fait maintenant une concurrence active aux Russes pour gagner de l'influence non seulement dans les pays arriérés de l'Asie, mais en Afrique et en Amérique latine. Pékin peut prétendre, ne serait-ce qu'implicitement, que dans les pays coloniaux et sous-développés, tout leader nationaliste révolutionnaire partant des campagnes suit la « voie de Mao Tsé-toung », qu'il en ait entendu parler ou non. Moscou est là dans une situation embarrassante, ne pouvant citer ni Lénine ni Staline comme architecte de ce genre très particulier de stratégie révolutionnaire. Dictature démocratique du peuple EN PLUSde son apport à la stratégie pratique, sinon à la << théorie » de la révolution, Mao est censé avoir formulé le concept tout nouveau d'un type d'Etat de transition après la prise du pouvoir 9. Mao Ts~-toung : Œuvre1 choisies, vol. 1, Paris 1955, p. 74, note 1. Biblioteca Gino Bianco 9 par les communistes. C'est le concept de la « dictature démocratique du peuple ». Selon Marx, le renversement de l'Etat bourgeois par la révolution prolétarienne devait être suivi de l'établissement d'une structure provisoire de l'Etat, définie comme « dictature du prolétariat », laquelle devait exercer le pouvoir pendant la période de transition et aboutir à une société entièrement communiste, sans Etat et sans classes. Engels, Lénine, Trotski et Staline se sont tous penchés, dans leurs écrits, sur le concept de la dictature prolétarienne. Marx avait envisagé à l'origine un Etat sous la dictature d'une classe unique, les ouvriers. Cependant, dans Deux tactiques, Lénine, passant outre aux objections de Trotski, élargit le concept marxien de la dictature d'une seule classe, envisageant à sa place une « dictature démocratique du prolétariat et du paysannat » comme forme provisoire du gouvernement révolutionnaire. De même, Staline préconisa en 1926 d'établir, tout particulièrement en Chine, un gouvernement révolutionnaire cc dont le caractère général ressemblerait à celui du gouvernement dont nous parlions chez nous en 1905, c'est-à-dire une sorte de dictature démocratique du prolétariat et du paysannat ». Bien que la nouvelle ligne communiste internationale, décrétée par le Comintern en 1935, préconisant des gouvernements de « Front populaire », ait pu constituer le germe d'un concept plus large de l'Etat post-révolutionnaire, il n'y eut pas de redéfinition de la théorie idéologique concernant ce point, en termes de structure de classes, jusqu'au moment où Mao énonça son concept de « dictature démocratique du peuple ». La différence essentielle entre le concept léniniste-stalinien de la dictature du prolétariat et le nouveau concept de Mao, c'est que celui-ci envisageait, au lieu d'une dictature exercée par deux classes, une « dictature commune de plusieurs classes révolutionnaires ». Mao énonça pour la première fois cette idée dans La Révolution chinoise et le P. C. chinois, écrit de 1939, et il la développa dans Sur la nouvelle démocratie (1940) et Sur la dictature démocratique du peuple (1949). Le trait le plus saillant du concept de Mao est l'inclusion du cc segment révolutionnaire de la bourgeoisie nationale » ( en clair : les éléments les mieux disposés de la classe capitaliste) parmi ceux qui partageront le pouvoir dans l'Etat postrévolutionnaire, en attendant la transition au socialisme, puis au communisme. LES COMMUNISTcEhSinois n'ont naturellement perdu aucune occasion de faire passer le concept de Mao de la dictature démocratique du peuple - non sans quelque justification - pour un développement créateur de la doctrine marxiste-léniniste de la dictature du prolétariat. Qui plus est, les porte-parole de Pékin, comme dans le cas de la stratégie maoïste de la révolution,

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