Le Contrat Social - anno VI - n. 1 - gen.-feb. 1962

'" LE MAOISME par .Arthur A. Cohen L1ou CHAO-TCHhI,éritier présomptif de Mao Tsé-toung à la tête du parti communiste chinois, prétendait en 1945 que Mao avait énoncé une «théorie» de la révolution chinoise constituant un « développement » nouveau de la doctrine communiste pour la conquête révolutionnaire du pouvoir. C'était l'amorce d'une énorme campagne destinée non seulement à porter aux nues l' « idéologie de Mao » comme l'unique guide pour le Parti et le peuple chinois, mais aussi à populariser l'image du leader chinois en tant que plus grand théoricien vivant du mouvement communiste mondial. Selon un porteparole du P. C. chinois, Mao aurait_fourni plus de quatorze contributions importantes à la doctrine communiste. Les prétentions de Mao à la primauté idéologique figurent parmi les questions épineuses entre Moscou et Pékin. Ne serait-ce que pour cette raison, il semble à propos de revenir sur ces prétentions, d'autant plus qu'elles demeureront probablement un facteur actif dans les rapports sino-soviétiques même après la mort de Mao, de même que les évaluations divergentes de l'apport de Staline jouent un rôle dans ces rapports depuis la disparition de l'ancien maître du Kremlin. Mao, philosophe marxiste LE PREMIER domaine dans lequel, selon les communistes chinois, Mao aurait fourni un apl'ort créateur d'importance est la philosophie marxiste, surtout en ce qui concerne l'étude détaillée du matérialisme dialectique marxien. Ces prétentions se fondent sur deux essais attribués à Mao - Sur la pratique et Sur la contradiction - qu'on affirmeavoirété écritsen 1937, maisqui n'ont été Biblioteca Gino Bianco publiés, sous leur forme actuelle, qu'en 1950 et 1952 respectivement. Les théoriciens chinois prêtent à Sur la pratique des formulations théoriques originales à deux égards. Pour Li Ta, l'essai est un« développement de la théorie de la pratique marxiste-léniniste », alors. que pour d'autres, tel Aï Ssou-tchi, il « éclaircit et développe le célèbre principe de vérité absolue et de vérité relative d'Engels et de Lénine». Il est difficile d'accepter cela comme argent comptant. L'affirmation de Li semble indéfendable puisque ledit texte n'est guère qu'une paraphrase des idées de Lénine sur la théorie de la connaissance exposées dans ses Cahiers philosophiques et dans Matéri.alismeet Empiriocriticisme. Quant à la thèse de Aï., une lecture approfondie de l'essai de Mao fait apparaître sa part personnelle comme une simple répétition, plutôt qu'un enchaînement créateur, d'idées déjà exposées dans Matéri.alismeet Empiriocriticisme de Lénine et dans l' Anti-Dühring d'Engels. Il n'ajoute rien non plus ni aux idées d'Engels et de Lénine concernant l'apparence et l'essence ni à la reformulation critique de Marx sur la « primauté de la pratique dans la connaissance », telle qu'on la trouve dans les écrits d'Engels, de Lénine et de Staline. Ainsi Mao ne présente nulle part dans Sur la pratique d'idée réellement nouvelle et n'apporte rien d'utile à la doctrine du matérialisme dialectique sur la pratique. Bien au contraire, dans un commentaire plutôt exceptionnel publié dans une revue communiste chinoise, le professeur Feng You-lan, probablement le plus grand historien contemporain de la philosophie chinoise, reconnaît que des philosophes chinois prémodemes

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