revue historique et critique Jes faits et des idées - bimestrielle - NOV.-DÉC. 1965 B. SOUVARINE ............ . BRANKO LAZITCH ........ . B.. SOUVARINE ............ . ALEXANDRE KÉRENSKI ... . Vol. IX, N° 6 Mythes et fictions Le martyrologe du Comintern Commentaires sur « le martyrologe » La franc-maçonnerie en Russie L'EXPÉRIENCE COMMUNISTE DONALD D. BARRY ...... . L'automobile en U.R.S.S. ANNIVERSAIRES B. S. . ..................... . De Ialta à Bandoeng DÉBATS ET RECHERCHES SIMONE PÉTREMENT ..... . CHRONIQUE Nobel, tel quel Démocratie et technique L'Obsenatoire des deux Mondes Correspondance . INSTITUT D'HISTOIRE SOCIALE, PARIS Biblioteca Gino Bianco
Au • sommaire des derniers numéros du CONTRAT SOCIAL MARS-AVRIL 1965 B. Souvarine Ls Moujik et le Commissaire N. Valentinov Le socialisme « dans un seul pays » Max Eastman Autour du « testament » ds Lénine Laszlo Tikos Eugène Varga: un conformiste malgré lui Mary Jane Moody Tourisme et rideau de fer * P.-J. PROUDHON : CENT ANS APRÈS Maurice Bourguin Des rapports entre Proudhon et Karl Marx Lettres inédites de P.-J. Proudhon JUIL.-AOUT 1965 B. Souvarine Vingt an8 après Otto Ulc Pilsen, révolte méconnus E. Delimars Lyssenko, ou la fin d'une imposture Casimir Grzybowski Le droit pénal soviétique Yves Lévy Communards et pétroleuses Joseph Frank Conflit de générations Chronique Clio et le stalinisme . MAI-JUIN 1965 B. Souvarine La guerre impossible Le stalinisme Léon Emery Les Etats-Unis contre la subversion N. Valentinov Entretiens avec Maxime Gorki Lucien Laurat Décolonisation et " socialisme , E. Delimars Les méfaits de Lyssenko Maurice Friedberg La censure soviétique Michel Collinet Les débuts du machinisme (1760-1840) SEPT.-OCT. 1965 B. Souvarine Ni orthodoxie, ni révisionnisme Yves Lévy De Charles X Il Charles de Gaulle Manès Sperber Indifférence et liberté Léon Emery Les relations germano-soviétique• Hugo Dewar L'affaire Kirov Rudolf Hilferding Capitalismed'ttat ou économie totalitaire 7 F. Raskolnikov Lettre ouverte à Staline ...N. Valentinov Sur une biographie de Maxime Gorki Ces num,ros sont en vente à l'administration de la revue .199, boulevard Saint-Germain, Paris 7• Le num,ro : 4 F Brolioteca Gino Bianco
kCOMJJil] rnu, l,istorÎIJllttt crilÎIJHtJts /11its d Jn iJüs NOV.-D~C. 1965 VOL. IX, N° 6 SOMMAIRE B. Souvarine ....... . MYTHES ET FICTIONS Sranko Lazitch ..... . LE MARTYROLOGE DU COMINTERN ..... . Page 329 331 B. Souvarine ....... . COMMENTAIRES SUR« LE MARTYROLOGE» 349 Alexandre Kérenski .. . LA FRANC-MAÇONNERIE EN RUSSIE...... 356 L'Expérience communiste Donald D. Barry . . . . . L'AUTOMOBILE EN U.R.S.S. . . . . . . . . . . . . . 359 Anniversaires B. S. . . . . . . . . . . . . . . DE IALTA A BANDOENG . . . . . . . . . . . . . . . 368 Débats et recherches Simone Pétrement . . . DÉMOCRATIE ET TECHNIQUE . . . . . . . . . . . 373 Chronique NOBEL, TEL QUEL . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 378 L'Observatoire des deux Mondes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 382 Correspondance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ' . . . . . . . . 384 Livres reçus Biblioteca Gino Bianco , ,.
DERNIERS OUVRAGES DE NOS COLLABORATEURS Maxime Leroy : Histoire des idées sociales en France T. /. - De Montesquieu à Robespierre T. Il. - De Babeuf à Tocqueville T. Ill. - D'Auguste Comte à Proudhon Paris, Librairie Gallimard. 1946-1950-1954. Léon Emery : Le Gros Animal De Montaigne à Teilhard de Chardin via Pascal et Rousseau Culture esthétique et monde moderne Lyon, Les Cahiers libres, 3, rue Marius-Audin. Raymond Aron : Essai sur les libertés Paris, Calmann-Lévy. 1965. Démocratie et totalitarisme Paris, Librairie Gallimard. 1965. Théodore Ruyssen : Les Sources doctrinales de l'internationalisme T. /. - Des origines à la paix de Westphalie T. Il. - De la paix de Westphalie à la Révolution française T. Ill. - De la Révolution française au milieu du X/Xe siècle Paris, Presses universitaires de France. 1954-1958-1961. Lucien Laurat : Problèmes actuels du socialisme Paris, Les lies d'or. 1957. . Michel Collinet : Du bolchévisme . ~VOLUTION ET VARIATIONS OU MARXISME-L~NINISME Paris, Le Livre contemporain. 1957. Kostas Papaioannou : Hegel PR~SENTATION, CHOIX DE TEXTES . Paris, Éditions Seghers. 1962. ) Les Marxistes Marx et Engels. La social-démocratie. Le communisme. Paris, Éditions J'ai Iu. 1965. Hegel LA RAISON DANS L'HISTOIRE Paris, Union générale d'éditions. 1965. Biblioteca Gino Bianco
revue ltistori'lue et critique Jes faits et Jes iJée1 Nov.,.;,Déc. 1965 Vol. IX, N° 6 MYTHES ET FICTIONS par B. Souvarine 0 N EMPOISONNE un verre d'eau, on îî n'empoisonne pas un fleuve. Une '' assemblée est suspecte, une nation est incorruptible comme l'océan » : cette pensée de Lamartine exhumée par Yves Lévy qui la cite dans son dernier article du Contrat social aide à prendre conscience du progrès accompli depuis un siècle, car de nos jours on empoisonne aisément un fleuve et A , • meme un ocean, on peut corrompre une nation et même un continent. La pollution de l' atmosphère et des eaux par les émanations radioactives est à l'ordre du jour en permanence et les savants sérieux s'en émeuvent en public. Parallèlement, l'intoxication politique, intellectuelle et morale de peuples entiers par les mass media, puisque cela s'appelle ainsi, cette intoxication des consciences abêtit l'humanité dans une mesure imprévisible par aucun Lamartine. La science politique, de Platon et Aristote à Machiavel, de Grotius et Hobbes à Montesquieu, de Saint-Simon et Comte à nos contemporains, perd toute vertu dans un monde façonné par la presse à grand tirage, la radiodiffusion et la télévision tenues par des mains indignes. On a vu comment un Staline, un Hitler, ont pu abrutir et fanatiser des multitudes humaines au moyen d'un parti tout-puissant et d'une police secrète capable d'imposer une information monopolisée et des dogmes simplistes, le tout condensé en formules obsédantes. Mais la preuve est faite que, dans les pays où des partis multiples et une presse diversifiée subsistent, il est loisible à quelques individus de « mettre en condition » des populations qui se croient Biblioteca Gino Bianco libres de penser à leur gré. Cette observation n'a rien d'original, mais la progression vertigineuse des moyens techniques propres à l'imprégnation de l'opinion publique porte le phénomène à un point qui ne laisse rien espérer de l'avenir, sauf réaction énergique avant qu'il ne soit trop tard. Il s'agit d'un fait de concentration industrielle et commerciale dont la prospérité, en fonction de l'élargissement continu du marché, exige le mensonge, la vulgarité, la pacotille intellectuelle, pour vendre du papier ou des ondes audio-visuelles. Quand le phénomène se combine avec la raison d'Etat, la mobilisation mentale des masses s'accomplit au service du pouvoir. Mais dans tous les cas, les peuples sont préparés à n'importe quelle aberration collective, même si, en attendant, ils sont , , . . . egares sans rime nt raison apparentes. L'histoire de la conférence de Bandoeng, de la pseudo-solidarité afro-asiatique, du deuxième Bandoeng avorté à Alger et de tout ce qui accompagne ces fictions n'en est que l'illustration la plus récente, la plus frappante aussi par son ampleur. Il n'existe et n'a jamais pu exister aucune solidarité asiatique ni solidarité africaine, enc·ore moins de solidarité afro-asiatique. Asie et Afrique sont des étiquettes géographiques dépourvues de connotations raciales ou politiques. Les politiciens jaunes et noirs qui ourdissent sous de nouveaux vocables des combinaisons éphémères à leurs fins •publicitaires s'inspirent de notions creuses, européennes, inapplicables chez eux comme dans les pays d'origine. Qu'ils mettent en scène un rassemblement à Bandoeng, qu'ils s'évertuent en vain ,
330 à le ressusciter à Alger ou ailleurs, cela ne change rien aux réalités profondes et n'atteste que l'imitation de la théâtromanie verbeuse caractérisant le déclin de la civilisation occidentale. Leurs manifestations sont exclusivement négatives, pas même explicites : contre le colonialisme défunt dont ils dilapident l'héritage, contre un impérialisme abstrait dont nul ne sait ce que parler veut dire, contre l'Europe d'où ils tirent tout ce qui leur manque, contre les Etats-Unis qui les comblent de bienfaits, de surplus, de crédits, de dollars, contre cet Occident qui leur fournit des verges pour le battre et, i_nsensément, des armes pour se combattre. Autant en emporte le vent. Les dix principes (sic) de Bandoêng sont un chiffon de papier au même titre que la Déclaration universelle des Droits de l'Homme. Ils n'ont pas empêché Asiates et Africains de s'entre-tuer de plus belle, à l'exemple des Européens tout au long de leur histoire. La baudruche afro-asiatique conçue dans les couloirs des Nations Unies s'est dégonflée d'elle-même sans la moindre intervention de l'extérieur, _ce qui ne gêne pas ses manipulateurs cyniques d'en accuser un « impérialisme » imaginaire. Pourtant ces imposteurs trouvent des complices à foison en Europe et en Amérique. La théâtromanie implique une autre manie, celle d'ériger des vedettes : quand il n'y en a pas, on les invente. Nos charlatans de la presse, de l'édition, de la radio et de la politique s'y entendent, à l'instar des maquilleurs et costumiers habiles à farder et vêtir des actrices quelconques pour en faire des étoiles. Si l'on en juge sur les œuvres, que reste-t-il à l'actif des premiers rôles de Bandoeng, pour ne rien dire des comparses ? Nehru, contempteur du matérialisme occidental, en paroles, n'a cessé de solliciter l'aide matérielle américaine, en pratique ; admirateur du régime soviétique stalinisé, il n'a pu se tenir sur la corde raide du neutralisme et, lors des massacres de Budapest, il a penché du côté des massacreurs ; cependant que l'Inde ne progressait pas d'un mètre dans la voie qui lui épargnerait les famines. Soekarno, adepte éhonté d'Hitler, impudemment rallié à Mao, est en échec devant son armée qui lui interdit de ravaler l'Indonésie au rang d'un satellite de la Chine. Nasser, devenu Führer d'un vague nazisme égyptien dénommé socialisme arabe, avec le concours de nazis allemands et soviétiques, est à couteaux tirés avec tous ses « frères » musuimans et essuie une défaite Bib·liotecaGino Bianco LE CONTRAT SOCIAL ignuminieusè au Yémen. Chou En-lai, comédien de l'aménité souriante à Bandoeng, a dû montrer son visage grimaçant, menaçant et repoussant en maintes autres circonstances. Telles furent les principales vedettes qu'une littérature et une réclame écœurantes ont présentées au public· occidental comme des personnages de grande envergure historique devant lesquels les Européens dégénérés, battus et contents, devraient s'incliner bien bas. Cui prodest ? , Feu le mythe de Bandoeng n'est pas séparable d'un autre mythe qui a la vie dure, celui du « tiers monde », non moins factice et trompeur, inventé par des têtes de linottes occidentales, inséparable aussi d'une fiction absurde, celle des « deux blocs ». Les blocs en question n'ayant jamais existé, il s'ensuit que le " « tiers monde » n'existe pas non plus en tant que « tiers ». Les Etats-Unis auraient pu, après la guerre, constituer sous leur égide sinon un bloc, du moins un ensemble de nations liées par des intérêts communs ; il aurait fallu à cet effet instituer des rapports économiques durables entre pays industriels et pays agraires non sou1nis au communisme ; au lieu de quoi le plan Marshall, d'une générosité sans précédent, a relevé des nations qui tournent le dos à l'Amérique et pactisent avec l'ennemi. De bloc, point de trace. L'Union soviétique a exercé une ré~lle hégémonie sur les « nations captives », mais une hégémonie n'est pas un bloc, et la preuve en est dans la dislocation consécutive à la mort de Staline. Quant au reste du monde, il se compose d'Etats disparates, les uns solidaires de la civilisation occidentale; les autres du despotisme oriental, mais la plupart s'efforçant de tirer avantage matériel et politique des antagonismes entre grandes puissances. La vision du monde en deux blocs et un tiers ne répond donc à aucune téalité, ne sert qu'à berner les gens, ne dessert que la pacification des peuples. Au profit de quoi et de qui ? Un malheur ne vient jamais seul, un mythe non plus, ni les fictions qui leur font cortège. Le mythe du panarabisme, la fiction d'une « nation arabe » campée du golfe Persique à l'océan Atlantique, on en a déjà fait justice ici même. Le mythe du panafricanisme, la fiction de « l'unité africaine » n'ont pas plus de consistance : on en montrera l'inanité à loisir. Mais , à chaque jour suffit sa peine, et son mythe. B. Souv ARINE.
LE MARTYROLOGE DU COMINTERN* par Branko Lazitch « L'U.R.S.S. accorde le droit d'asile aux citoyens étrangers poursuivis pour la défense des intérêts des travailleurs ou en raison de leur activité scientifique ou de leur lutte pour la libération nationale. » Art. 129 de la Constitution « stalinienne » de 1936. L ES DIRIGEANTS COMMUNISTES ÉTRANGERS victimes des massacres ordonnés par Staline sont à peu près complètement voués à l'oubli. Leurs collègues bolchéviks qui connurent le même sort eurent au moins droit à une certaine publicité. A l'époque même où ils furent exécutés, on pouvait déjà soupçonner l'ampleur approximative des « épurations » du fait des procès monstres ou d'après la disparition subite de très nombreux dignitaires du Parti. Beaucoup plus tard, la « déstalinisation » et les procédures de réhabilitation politique ou légale, entamées au XXe Congrès (février 19 5 6) et poursui vies depuis lors, devaient donner à ces victimes un regain d'actualité. Les chefs communistes étrangers furent liquidés sans procès public et sans que leur exécution fût mentionnée. De plus, ils n'eurent pas droit à une réhabilitation posthume (exceptés Bela Kun, plusieurs Polonais et quelques Yougoslaves). Ainsi, le silence qui entoure leur sort depuis les années 1936-39 a eu pour effet de les rayer de toute mémoire. ,,*.,,. L'EXTERMINATION des communistes étrangers qui vivaient en U.R.S.S. commença au moment même où Staline promulguait la • Voir note 1péclale, page 348, Biblioteca Gino Bianco Constitution « la plus démocratique du monde » qui garantissait explicitement le droit d'asile aux communistes étrangers. Elle se poursuivit durant toute la période des grandes « purges ». Ce n'est que lorsque les archives de la police soviétique seront rendues publiques que l'on pourra connaître le nombre des victimes de la furie homicide de Staline. Car celle-ci v1sa1t à la fois les dirigeants et les militants, voire même de simples ouvriers venus s'installer en Union soviétique. Or s'il est relativement facile d'enquêter sur le sort des chefs, connus dans leurs partis respectifs et dans la hiérarchie du Comintern, il est impossible de le faire pour les simples militants et les ouvriers réfugiés en U.R.S.S. Que les collectivités communistes étrangères aient été frappées à mort par Staline, on en trouve la confirmation - moins les détails - dans les rares révélations de survivants. Arvo Tuominen, ex-chef du P.C. finlandais et membre suppléant du Présidium du Comité exécutif du Comintern jusqu'à la fin de 1939, a écrit : « Au moins 20.000 Finlandais ont été conduits aux camps de concentration, et il y en eut autant, en pourcentage, parmi les communistes des pays limitrophes de l'U.R.S.S. à avoir été exterminés 1 . » Les témoignages sur le sort de l'émigration communiste yougoslave indiquent également que furent liquidés, non seulement les dirigeants, mais aussi des militants, des ouvriers, des réfugiés. Bozidar Maslaritch, qui vécut en U.R.S.S. au début et à la fin de la grande purge, devait déclarer plus tard : « Notre émigration [ yougoslave J a subi parmi toutes le sort le plus cruel. Sa grande 1, A. Tuomlncn : L"s Cloches du Kremlin, p. 216. , ,
332 majorité a été arrêtée en 1937-38 et son sort est resté complètement inconnu 2 ... » Alfred Burmeister (nom de plume de Wanda Pampuch-Bronska, fille d'un Polonais, vieux ·compagnon de Lénine) cite à son tour un exemple de cette purge générale : en 1936, le KUNMZ (Université communiste des minorités nationales de l'Occident), première école de formation des cadres du Comintern, fut dissous alors que le personnel enseignant tout entier et la presque totalité des élèves furent arrêtés et disparurent pour toujours ~. Si l'on écarte la masse des militants réfugiés en U.R.S.S., voici quel a été le sort réservé aux dirigeants étrangers du Comintern : 1. - Tous les communistes étrangers qui suivirent Lénine ou coopérèrent avec lui avant 1917, au lendemain de la victoire, et à la fondation du Comintern en 1919, ont été extermin~s. 2. - Les dirigeants des partis mis hors la lo1 dans leurs pays et qui s'étaient réfugiés en Union soviétique eurent le même sort. Djilas confirme cette règle de conduite de Staline dans son livre Conversations avec Staline : « Les purges avaient surtout frappé durement les émigrés communistes, membres de partis illégaux qui ne pouvaient avoir recours qu 1 aux Soviets 4 • » 3. - Les dirigeants appartenant aux partis communistes légaux dans les pays européens de démocratie parlementaire survécurent aux massacres. A. Tuominen, parlant des pays scandinaves, constate le respect de cette règle : « Dans les pays scandinaves, les partis communistes étaient légaux : c'est ce qui a sauvé leurs membres. Leurs leaders ne résidaient pas à Moscou, et lorsqu'ils s'y trouvaient, ils avaient la nationalité de leur pays et ne vivaient donc pas des grâces des Soviets 5 • » L'application de ces trois principes conducteurs de la police stalinienne devait entraîner une certaine différenciation dans le sort du personnel étranger du Comintern. Il n'y avait qu'un seul parti dont les chefs remplissaient à la fois les conditions 1 et 2 : le P.C. -polonais. C'était le seul dont de nombreux fondateurs combattirent avec Lénine 2. B. Maslaritch : Moskva - Madrid - Moskva, Zagreb 1952, p. 103. 3. Cf. A. Burmeister : Dissolution and Aftermath of the Comintern. Experiences and Observations, 1937-1947. New York 1955, pp. 4-8. 4. M. Djilas : Conversations avec Staline, Paris 1962, p. 43. 5. A. Tuominen, op. cit. BibHotecaGino Bian·co LE CONTRAT SOCIAL avant Ja révolution et jouèrent un rôle important aux débuts de la Russie soviétique et du Comintern. A ce titre déjà, ils étaient condamnés par Staline ; de plus, ils vivaient comme réfugiés politiques en U.R.S.S. Rien d'étonnant par conséquent que le sort des Polonais ait été le plus cruel : toute la direction fut exterminée et ce parti fut le seul à être dissout sur l'ordre de Staline. Une autre catégorie se compose de plusieurs partis communistes mis hors la loi par les régimes dictatoriaux de leurs pays : une grande partie de leurs chefs, réfugiés en U.R.S.S., furent arrêtés et assassinés par la police stalinienne. Ce fut le cas de la Yougoslavie, de l'Allemagne, de la Hongrie, de la Roumanie, des trois pays Baltes et de la Finlande. Seuls deux partis de cette catégorie · (mais non en totalité) échappèrent au massacre collectif : ce sont les partis bulgare et italien. Un dernier groupe se compose des pays de « démocratie bourgeoise » qui jouèrent un rôle protecteur pour les communistes étrangers, même à Moscou : c'est le cas de la GrandeBretagne, de la France, de 1a Tchécoslovaquie et des pays scandinaves (Suède, Norvège, Danemark). L'extermination de la gauche zimmerwaldienne c~EST AU COURS. de la première guerre mondiale que Lénine, réfugié en Suisse, essaya pour la première fois de déborder le cadre strictement russe et de former une fraction à · l'échelle internationale. Au cours des conférences internationales des socialistes opposés à la guerre, tenues à Zimmerwald (1915) et à Kienthal (1916), la« gauche zimmerwaldienne » fut formée1 en fraction à l'intérieur du mouvement zimmerwaldien, avec Lénine comme inspirateur. . Bien que cette gauche fût loin de dominer - et parfois même d'influencer - le mouvement zimmerwaldien, un certain nombre de militants ou dirigeants socialistes de plusieurs pays sè groupèrent sur sa plateforme. Avec Zinoviev, membre du Comité. central du parti bolchévik, plusieurs dirigeants socialistes non russes de l'Europe orientale et centrale qui assistèrent à ces deux conférences se rallièrent à la gauche zimmerwaldienne. Les socialistes polonais y étaient le plus fortement représentés par les personnalités suivantes : MIECZYSLAWBRONSKI,qui vécut à Zürich - comme Lénine - durant la première guerre mondiale, participait comme délégué
B. LAZITCH polonais à la conférence de Kienthal et appartenait à la gauche zimmerwaldienne. C'est lui qui apprit à Lénine en février 1917 que la révolution venait d'éclater : « Un jour, après le dîner, écrit Kroupskaïa, au moment où Ilitch s'apprêtait à aller à la bibliothèque, tandis que je venais de ranger la _vaisselle, Bronski vint nous trouver : " Vous ne savez rien ? s'excl~- ma-t-il. La révolution a éclaté en Russie. " Et il nous raconta le contenu des télégrammes qui venaient de paraître en édition spéciale 6 • » Bronski rentra lui-même en Russie en 1917 et, au lendemain de la victoire communiste, exerça des fonctions importantes soit dans l'Etat soviétique, soit dans le premier appareil du Comintern. Il fut arrêté pendant la grande purge et périt sans procès public. Sa femme fut également arrêtée, sa fille Wanda fut internée dans des camps de concentration ; elle n'en sortit qu'après la fin de la deuxième guerre mondiale. KARLRADEKavait participé aux conférences de Zimmerwald et de Kienthal et fait partie du secrétariat de la gauche zimmerw?ldienne, avec Lénine et Zinoviev. Après la révolution d'Octobre, il fut membre du Comité central du parti bolchévik et du Comité exécutif du Comintern, dont il devint un des secrétaires (sans compter les autres fonctions importantes qu'il occupa en U.R.S.S.). Il comparut au deuxième procès public de la grande purge (1937), fut condamné à vingt ans de réclusion et mourut en 1939 dans un camp de concentration, selon les récentes indications de source officielle soviétique 7 • AnoLPH WARSKI-WARSZAWSKfuIt membre du Comité central du parti ouvrier social-démocrate de Russie dès le congrès de Stockholm (1906 ), participa aux conférences de Zimmerwald et de Kienthal, rallia la gauche de ce mouvement, fut membre du C.C. du P.C. polonais dès sa fondation, assista aux congrès du Comintern et fut membre de son Comité exécutif. Réfugié en U.R.S.S. depuis 1929 et déjà à la retraite, il fut arrêté et, selon de récentes sources soviétiques, mourut peu après, le 21 août 1937 ~. MAXIMILIANWALECKI(Max Horwith), réfugié en Suisse, participa à la première conférence préliminaire de Zimmerwald, tenue en juillet 1915, se rallia également à la gauche, fut 6. N. Kroupskala : Ma vie avec Lénine, Paris 1933, p. 265. 7. Procès-verbal du 8• congrès (1919) du Parti bolchévik, Moscou, édition de 1959, p. 584. 8. Petite EncycloMdie Sovi'lique, Moscou 1960, tome II, p. 151. Biblioteca Gino Bianco 333 l'un des fondateurs du P.C. polonais, membre suppléant du Présidium du Comintern, son émissaire en nombreux pays occidentaux, élu à la Commission de contrôle du Comintern en 1935, lorsque Staline l'avait déjà complètement . ' . mis a son service. Il fut arrêté en été 1937 à l'hôtel Luxe, domicile des communistes étrangers à Moscou, condamné à dix ans de travaux forcés, et mourut en 1942. JACOBHANECKIfut membre du Comité central du parti ouvrier social-démocrate de Russie (à répoque où les bolchéviks en faisaient partie), en 1907, et, durant la première guerre mondiale, rallia également la gauche zimmerwaldienne. Avant et après la révolution d'Octobre, il fut étroitement associé aux opérations financières des Soviétiques, à la fois sur le plan de l'Etat et des premières subventions au Comintern. Il disparut dans la grande purge ; selon la formule maintenant en usage : « En 1937, il fut victime des calomnies ennemies ; plus tard réhabilité 9 • » VLADISLAVSTEIN-KRAJEWSKIq,ui avait fait partie de la délégation polonaise (avec Radek et Bronski) à la conférence de Kienthal, fut ensuite membre du Comité central du P.C. polonais, participa aux congrès du Comintern et fut l'un des responsables de la section des cadres dans son appareil central. Réfugié en U.R.S.S., élu au dernier congrès du Comintern en 1935 à la Commission de contrôle, il fut exclu du Parti comme trotskiste et arrêté en 1938. PAUL LEWINSON(Lapinski) prit part aux conférences de Zimmerwald et de Kienthal, fut membre du Comité central du P.C. polonais par la suite, mais fut arrêté en 1938 et disparut depuis lors. Le sort des autres adhérents de la gauche zimmerwaldienne fut à peu près identique, à cette double différence près que deux éléments importants de ce groupement, les Suédois et les Hollandais, rompirent assez tôt avec le Comintern, évitant ainsi d'avoir affaire à la police de Staline ; en outre, le nombre des autres « zim1nerwaldiens » était très réduit. Toutefois, ils n'échappèrent pas à l'extermination pratiquée par Staline dans la mesure où ils vinrent s'installer en U.R.S.S. (même s'ils avaient abandonné toute activité politique). Ce fut le cas de : 9. Souvenir, sur Unine, tome II, Moscou 1957, p. 713. ,
334 · FRITZ PLATTEN militant socialiste suisse, devenu ensuite le ~ecrétaire du Parti, fut pour la gauche zimmerwaldienne le person1:age le plus connu de même que Robert Grimm le fut pour l'~nsemble du mouvement zimmerwaldien l'un et l'autre étant des représentants suis;es dont les activités étaient concentrées essentiellement en Suisse. C'est Fritz Platten qui négocia au nom des émigrés russes le fameux passage à travers l'Allemagne en mars 1917 et fut responsable du premier convoi. Ce fut également lui qui sauva la vie à Lénine da~s une situation dramatique, comme le rappelait la Petite Encyclopédie Soviétique : « En janvier 1918, Platten empêcha un attentat contre Lénine, à l'occasion de quoi il fut légèrement blessé 10 • » Platten présida le premier congrès du Comintern (avec Lénine et Eberlein) et vint en juillet 1923 s'installer en U.R.S.S., où il disparut dans la grande purge. _E,n19~~'. ses parents s'adressèrent aux autorites sovietlques et apprirent que sa femme, Bertha Zimmermann, employée au Comintern, fut arrêtée en 1937 ; que Fritz Platten fut lui-mêm~ conda~né en 1938 à cinq ans de travaux forces et qu il mourut d'une crise cardiaque en 1942 11 • EDMUNDPOELUSO,militant socialiste italien, vécut avant 1914 aux Etats-Unis d'Amérique et surtout en Espagne et au Portugal, ce qui lui fournit l'occasion par la suite de figurer comme représentant des socialistes inter~ationalistes portugais à la conférence de Kienthal, où sa position fut très proche de la gauche zimmerwaldienne. Il prit la parole au IVe Congrès du Comintern, en 1922, et fut durant de nombreuses années un collaborateur assidu de la Correspondance internationale, alternant les séjours en Italie et en Russie, où il se réfugia finalement à cause du fascisme. Il disparut dans la grande purge. FRANZKoRITSCHONERq, ui représenta les socialistes internationalistes d'Autriche à la conférence de Kienthal, fut l'un des fondateurs du P.C. autrichien, participa au IIIe Congrès du Comintern entra dans son Comité exécutif ' 1 , et vint s'installer en lT.R.S.S. vers es annees 1929-30. Arrêté et déporté (de même que sa femme) lors de la grande purge, Koritschoner fut ~ivré par Staline, avec de nombreux commu°:istes allemands, à la Gestapo, après le pacte Hitler10. Petite Encyclopédie Soviétique, Moscou 1929, · tome VI, p. 583. 956 11. Neue Zürcher Z eitung, 10 octobre 1 • BibliotecaGino Bianco --r LE CONTRAT SOCIAL Staline. Enfermé dans une prison de' Vienne, il y mourut durant la guerre. WILLY MuNZENBERGu,n des initiateurs ?e la Conférence internationale des Jeunesses socialistes tenue à Berne en avril 1915, prélude aux conférences de Zimmerwald et de Kienthal, prit part à la conférence de Kie~!hal, c?llabora avec Lénine, et une des dernieres r~unions sinon la dernière, de la gauche zimmerw'aldienne avant le départ de Lénine pour la Russie, eut' lieu dans l'appartement de Mün- . zenberg à Zürich 12 • Il fut l'un des fondateurs de l'Internationale communiste des jeunes (KIM) et exerça. d~ hautes fonctions dans le P.C. allemand, ainsi que dans l'appareil central et parallèle du Comintern avant d'être exclu en 1938. Il trouva la mort' en 1940 en France dans des circonstances qui autorisent à penser qu'il fut assassiné par des agents de Staline. IAN BERZINE(Win ter), l'un des chefs du mouvement socialiste letton dans le parti ouvrier social-démocrate de Russie, avait participé également à la conférence de Zimme~wald, signé la déclaration de la gauche et, parti pour l'Amérique, confié sa voix à Zinoviev pour la conférence de Kienthal. Premier représentant diplomatique soviétiqu~ en Suisse en. 1918 et secrétaire de l'Internationale communiste dans la première année de son ex!stence, 1919-20? Berzine perdit toutes ses fonctions dans le Paru à partir de 1927. Il dirigeait les Archives à Moscou jusqu'à son arrestation en 1937. Il mourut emprisonné en 1941 13 • JOSEPHUNSCHLICHTm, ilitant socialiste polonais, déporté en Sibérie durant la première guerre mondiale, ne put rejoindre les bolchéviks qu'en avril 1917 à Pétrograd, où il fut membre du Comité militaire révolutionnaire pendant les journées d'octobre. Il assista comme l'unique représentant polonais au congrès de fondation du Comintern, en 19.19, mais en fait il appartenait à l'appareil dirigeant du Parti et de l'Etat soviétiques. Dans la période 1920 à 1930, il fut l'un des chefs de la police politique, puis commisaire adjoint aux forces armées soviétiques. Victime de Staline il trouva la mort le 28 juillet 1938, date révélée récemment dans un ouvrage officiel 14 • Un sort identique fut réservé à beaucoup d'autres révolutionnaires étrangers de~enus, après 12. W. Münzenberg: S Libknechtom i Léninem, Moscou Léningrad 1930, p. 139. 13. Petite Encyclopédie Soviétique, Moscou 1958, tome I, p. 954 • 1960 14. Petite Encyclopédie Soviétique, Moscou , tome IX, p. 770.
B. LAZITCH octobre 1917, hauts dirigeants du Parti et de l'Etat soviétiques, tels RACOVSKI,chef du mouvement socialiste en Roumanie, devenu successivement président du gouvernement soviétique en Ukraine, ambassadeur à Londres et à Paris, et RouozouTAK,militant letton, promu membre du Politburo du P.C. soviétique (en 1926), grâce à Staline, et liquidé dans la grande purge par la volonté de ce même Staline. L'anéantissement du P.C. polonais LORSQUELA FUREURde Staline s'abattit sur les communistes polonais réfugiés en U.R.S.S., rien ne fut signalé dans la presse du Comintern. Il est impossible de trouver dans les publications officielles la· moindre information sur la dissolution du Parti polonais et l'extermination physique de ses chefs. Il n'y a que l'accusation, formulée, sans la moindre preuve à l'appui, par Manouilski au XVIIP Congrès du P.C. soviétique, en mars 1939, au moment où la liquidation des communistes polonais était déjà achevée : « Le parti communiste polonais s'avéra le plus encombré d'éléments ennemis. Dans sa direction avaient pénétré des agents du fascisme polonais ( ...). Ils [les agents du fascisme polonais] jouèrent la comédie de l'autocritique devant l'Internationale communiste, la trompant comme l'avaient fait en leur temps Lovestone et les " fractionnistes " policiers des partis hongrois et yougoslave 15 • » Staline avait de multiples raisons personnelles d'assouvir sa haine des communistes polonais dans un bain de sang sans précédent et sans égal dans les annales du Comintern. Tout d'abord, il détestait les Polonais, y compris les communistes. Ensuite, outre les motifs d'ordre général qui provoquèrent ces massacres - le fait que de nombreux dirigeants communistes polonais appartenaient à l'entourage de Lénine avant octobre 1917 et qu'ils vivaient tous sans protection juridique en U.R.S.S. comme réfugiés, - les Polonais cumulaient deux autres péchés graves aux yeux de Staline. En premier lieu, lorsqu'en décembre 1923 - un mois avant la mort de Lénine, - la lutte pour sa succession fut pour la première fois discutée à la direction du P.C. soviétique, il n'y eut qu'un seul parti communiste - le polonais - pour prendre ouvertement la défense de Trotski et montrer à Staline, à Zinoviev et à Kamenev les graves dangers que l'élimination de Trotski pouvait entraîner. Le mois suivant Lénine mourut, mais à la veille de son décès le P.C. polo15. Co"e,pondance lnttrnatlonalt, 1939, p. 458. Biblioteca Gino Bianco 335 nais récidivait, comme Staline devait le reconnaître à l'époque : « Pour moi, déclara-t-il, il est clair que dans la première période de la lutte de la majorité du P.C. russe, les chefs du Parti polonais avaient ( ...) pris parti pour l'opposition ( ...). A l'époque où le Comité central du P.C. polonais fit parvenir cette résolution au Comité central du P.C. russe, il constituait sans nul doute la succursale polonaise de l'opposition opportuniste du P.C. russe 16 • » Un autre péché de certains dirigeants communistes polonais très en vue était d'être d'origine juive, ce que Staline ne pouvait souffrir. Ainsi, être en même temps juif, Polonais, réfugié, ancien compagnon de Lénine et ex-partisan de Trotski, cela offrait à Staline plus de motifs qu'il ne lui en fallait pour ordonner une extermination totale. De nombreux Polonais étaient coupables de ces cinq « chefs d'accusation », mais même ceux dont la culpabilité était réduite à deux « chefs d'accusation », comme Lenski qui n'était ni juif ni partisan de Trotski (au contraire, il fut le principal agent d'exécution de Staline dans l'opération menée contre le Comité central polonais en 1924 ), n'échappèrent pas à la liquidation. Le parti communiste polonais était dirigé par les « trois W » au moment de la mort de Lénine en 1924 : Warski, Walecki et Wera Kostrzewa-Kochtchva. A peine quelques mois plus tard, au moment du ve Congrès du Comintern, en juin-juillet 1924, Staline put régler le sort politique de cette direction: une Commission polonaise fut formée, avec lui-même comme chef et Molotov comme vice-président. La conclusion fut nette : il fallait éliminer cette direction. La manière dont usa Staline - présidant pour la première fois une commission à un congrès du Comintern et, ainsi, pour la première fois, participant" actif à un congrès international - ne devait déjà pas être très douce si l'on se réfère aux propos de W. Kostrzewa : « Ce ne sont pas, dit-elle, ceux à qui l'on peut briser les os pour les mêmes raisons qu'à nous qui constituent pour vous le danger principal, mais ceux qui n'ont pas d'os du tout 17 • » W. KosTRZEWAfut à l'époque de Lénine un membre actif de la direction du Comintern, rapporteur au IVe Congrès sur la question agraire (avec E. Varga). Elle réussit à se maintenir au Comintern, même après son élimination de la direction du P.C. polonàis. C'est 16. Correspondance internationale, 1024, p. 839. 11. La Queation polonaise au V• Congns de l'Internationale communiste, Moscou 1924, p. 91. ,
336 · ainsi qu'elle figurait au Présidium du ·VIe Congrès du Comintern, en 1928, et qu'elle prit la parole à ce congrès. Mais en été 1937 elle devait être arrêtée pour mourir à la prison de la Lioubianka. JULIAN LENSKI-LESZCZYNSKfIut l'un des nombreux communistes polonais qui exercèrent des fonctions dans le gouvernement soviétique : dès le 28 novembre 1917, il fut promu responsable des affaires polonaises au commissariat des Nationalités, dirigé par Staline. Au service de Staline au Comintern, il mena la campagne contre la direction polonaise en 1924. En récompense, il entra au Politburo polonais et exerça ensuite, de 1929 à 1937, les fonctions de secrétaire général du P.C. Aux trois derniers congrès du Comintern, les Ve, VIe et VIIe, il fut l'un des orateurs, devint membre de son Comité exécutif après le congrès de 1928, et de son Présidium après le congrès de 193 5. Néanmoins, la police. soviétique l'arrêta et il périt en 1939. EDWARDPROUCHNIAK(Sewer), seul Polonais parmi les élèves de l'école léniniste en 1911 à Longjumeau, près de Paris, devint membre du Bureau politique du P.C. polonais dès les premières années et secrétaire du « gouvernement provisoire polonais » formé à Bialystok, en 1920. Il prit une part active aux congrès et à la direction du Comintern : délégué de son parti, membre du Comité exécutif au IVe Congrès en 1922, il fut élu à la Commission de contrôle après le ve Congrès en 1924, siégea au Présidium du Comité exécutif dans les années 1926-27-28, à l'époque où Staline éliminait tous ses adversaires et ne tolérait plus d'opposition au Comintern; au VIe Congrès, en 1928, il fut réélu membre du Comité exécutif et au dernier congrès, en 1935, il figurait toujours comme membre suppléant du Comité exécutif. Il travailla dans l'appareil central du Comintern jusqu'à son arrestation en 1937, qui précéda celles de ses deux sœurs et de son frère cadet 18 • ]ERZY RYNG,membre également du Bureau politique du P.C. polonais, participa aux débats du vie Congrès du Comintern, en 1928. Il dirigeait le P.C. polonais clandestin et fut au nombre des chefs invités à Moscou pour « consultation » à la fin de 1937. Arrêté peu après par le NKVD, il disparut dans les geôles soviétiques. Son nom figure parmi les cinq premiers dirigeants communistes polonais réhabilités avant même le XXe Congrès du P.C. sovié18. Cf. Alfred Burmeister : « Rehabilitierte NKWDOpfer ,, in Ost Probleme, 12 aoüt 1955. BibHotecaGino Bianco ., LE CONTRAT SOCIAL tique (février 19 5 6) et le retour de -Gomulka en octobre de la même année. En effet, le l~r mai 1955, l'organe officiel du Parti, Tribuna Ludu, publiait les photographies de cinq dirigeants polonais liquidés en U.R.S.S. (mais, bien entendu, sans donner de détails) :. Warski, W. Kostrzewa, E. Prouchniak, Lenski et Ryng. BRONISLAWBRONKOVSKI-BORTNOWmSKemI, - bre du Bureau politique du P.C. polonais à l'époque stalinienne, fut élu membre du Comité exécutif et membre suppléant· du Présidium du Comité exécutif du Comintern, au dernier congrès en 193 5, ce qui ne lui sauva pas la vie au cours de la grande purge. HENRYKLAUER-BRANDmT,embre du Comité central du P.C. polonais dès ses premières années, auteur du livre (avec. M. Walecki) Le Communisme en Pologne, orateur au nom des communistes polonais aux IIIe et VP Congrès du Comintern, proche collaborateur de Piatakov à la Commission du Plan soviétique lorsqu'il fut arrêté en 1937. HENRYKHENRIKOWSKI(Saül Amsterdam), membre du Bureau politique du Parti, fut l'un des principaux dirigeants à partir de 1928-29. Il prit part aux débats du VIe Congrès, se rendit clandestinement en Pologne et se trouva parmi les invités du Comintern en 1937 à Moscou. Herbert Wehnert, à l'époque membre du Comité central du P.C. allemand, installé à l'hôtel Luxe, raconte dans ses souvenirs les derniers moments de ce personnage : « Dans une chambre du Luxe, le fonctionnaire· du Parti polonais Henrikowski séjournait depuis six semaines. Il venait de l'étranger pour présenter un prétendu rapport, mais il devait constater bientôt que la plupart de ses camarades polonais étaient introuvables. Lenski, qui était comme lui depuis des années un chef polonais de prefuier plan, venait d'arriver à Moscou et avait déjà disparu. Henrikowski ne quittait sa chambre que le soir pour acheter quelques vivres. Ceux qui étaient au courant de sa présence à Moscou s'attendaient chaque matin à voir un sceau apposé sur la porte de sa chambre, signe qu'il avait été emmené par le NKVD au cours de la nuit. Entre-temps, il " vivait " seul dans l'isolement le plus terrifiant 19 • » Il fut bientôt arrêté et disparut à son tour. ' STEFANKRULIKOWSKI,d' éputé communiste au Parlement polonais, avait participé aux discussions; animées sur le P.C. polonais au VIe 19. Herbert Wehnert : Erinnerungen, Bonn 1957, pp. 141-142.
B. LAZITCH Congrès du Comintern et il vint plus tard se réfugier en U.R.S.S. Il fut traité comme tous ses camarades. ToMASZDoMBAL,autre député au Parlement polonais, quitta le parti paysan de gauche pour rallier le mouvement communiste. Arrêté par les autorités polonaises, il put aller à Moscou en 1923 avec vingt-trois autres communistes sortis de prison. L'organe officiel du Comintern, la Correspondance internationale., annonçait leur arrivée sous le titre : « Dombal à Moscou. Accueil triomphal aux vingt-trois communistes polonais échangés par la Russie soviétique 20 ». Dès la fondation de l'Internationale paysanne rouge (Krestintern), Dombal apparut comme l'un de ses principaux dirigeants et en cette qualité parla au· VIe Congrès du Comintern. Cela ne l'empêcha pas d'être liquidé. STANISLAWLANCUSKIfut, avec Dombal, le premier député qui rallia le mouvement communiste dès 1920. Il vint se réfugier plus tard en U.R.S.S. et fut emporté dans la purge, comme tous ses collègues parlementaires. KAZIMERZCISZEWSKI, membre du Comité central du P.C. polonais, président du gouvernement de la Russie Blanche et de la Lithuanie au lendemain d'octobre 1917 ; WROBLEWSKI, membre du Comité central; STANISLASBoNINSKI, directeur adjoint de l'Université communiste des minorités nationales de l'Occident (KUN MZ) et beaucoup d'autres dirigeants polonais furent ainsi liquidés par la police soviétique au service de Staline, lequel avait fait exécuter dès 1934 JERZY SocHACKI, membre du Comité central du P.C., déclaré « espion et provocateur au service de Pilsudski ». L'extermination des dirigeants du P.C. yougoslave LE PARTI COMMUNISTEYOUGOSLAVEne comptait parmi ses dirigeants ni compagnons de Lénine ni juifs, mais il devait s'attirer la condamnation de Staline, car d'une part son premier chef, Sima Markovitch, s'était opposé en 1925 au nouveau maître du Kremlin au sujet de la « question nationale » et, d'autre part, le Parti étant hors la loi dans son pays, les chefs réfugiés en U.R.S.S. étaient à la merci du pouvoir soviétique. Il frôla ainsi la dissolution. Tito devait le dire plus tard : « Nous discutions la dissolution éventuelle du parti communiste yougoslave. Tous les dirigeants 20. Corrttpondanct lnltrnatlonall', 192.1, pp. 183-184. Biblioteca Gino Bianco 337 yougoslaves qui se trouvaient en Russie venaient d'être arrêtés ; j'étais seul, le Parti affaibli et sans direction 21 ••• » L'accusation formulée contre les dirigeants yougoslaves devait être la même que contre ceux de Pologne et de tous les autres pays dont les chefs communistes vivaient comme réfugiés en U.R.S.S. : agents provocateurs au service de la police et de l'espionnage capitalistes. Pour ces dirigeants étrangers, Staline n'avait pas besoin de monter un procès monstre : il suffisait de les arrêter et de leur notifier leur condamnation. Tous les chefs du P.C. yougoslave, en titre et en fait, furent ainsi déclarés « ennemis et espions » et subirent un même sort en conséquence. Voici les noms des plus importants : SIMA MARKOVITCHs,ecrétaire du Parti au lendemain de sa fondation en 1919, chef de la première délégation yougoslave en Russie soviétique lors du IIP Congrès du Comintern. Seul orateur à cette occasion, il échangea des propos relativement vifs avec Zinoviev, mais fut néanmoins nommé membre du Comité exécutif. Arrêté peu après son retour en Yougoslavie, il fut élu in absentia membre suppléant du Comité exécutif au ve Congrès, en 1924. Sa peine purgée, on le nomma à nouveau secrétaire général du Parti et, après plusieurs péripéties, il vint s'installer en U.R.S.S. Sans exercer de fonction dans le Parti ni dans le Comintern, il travailla à l'Académie des sciences et « en juillet 1939, il fut arrêté et condamné à dix ans de travaux forcés - sans droit de correspondre - comme agent de l'impérialisme » 22 • Il mourut en prison. PHILIPE PHILIPOVITCH,secrétaire du Parti à sa fondation en 1919 et président dès 1920, émigra en 1924, fut rapporteur au ve Congrès du Comintern et entra au Comité exécutif. Par la suite, sous le pseudonyme de B. Bochkovitch, il devint étroitement associé à l'appareil central du Comintern, comme membre de son Comité exécutif, confirmé au congrès suivant en 1928, et comme l'un des dirigeants de la Fédération communiste balkanique. On l'aperçut pour la dernière fois un soir, en 1937, à Moscou, alors qu'il était emmené par les agents du NKVD 2 ~. MILAN GoRKITCH (Yosip Tchijinski) fut employé dès les années 20 dans l'appareil central de l'Internationale communiste des jeunes 21. V. Dedtjer : Tito parle, Paris 19:l3, p. 401. 22. Lt MouVtmtnt syndical ttl Serbie, 1903-1919, Belgrade 1958, p. 600. 23. Borba, 10 Juin 1962.
338 (KIM), fut nommé au VP Congrès en 1928 membre de la Commission de contrôle du Comintern en tant que représentant du KIM. Secrétaire général du P.C. yougoslave de 1932 à 1937, il fut promu membre suppléant du Comité exécutif du Comintern lors de son dernier congrès. En 1937, il fut arrêté et exécuté, de même que sa première femme Betty Glane, ukrainienne, d'abord secrétaire de B. Souvarine au Comintern, ensuite directrice du Parc de culture et de repos à Moscou, arrêtée comme « espionne de l'intelligence Service ». D1ouKA TsvIYITCH, membre dès 1920 du Comité central, occupa ensuite longtemps le poste de secrétaire politique du Comité central. Alors que Markovitch dirigeait la fraction de « droite » du Parti, Tsviyitch était le chef de celle de « gauche ». Mais tous deux périrent de la même façon dans les geôles de Staline. STEFANTsvIYITCH (frère de Diouka), qui avait assassiné un gendarme, dut quitter son pays. En 1934, il devint secrétaire à l'organisation de l'Internationale des jeunesses communistes. Il fit des voyages clandestins dans presque tous les pays d'Europe occidentale, y compris l'Espagne en 1937. L'année suivante, il était incarcéré à Moscou et devait mourir en . prison. VoYA Vou1ov1TCHne fit pas sa carrière révolutionnaire dans le P.C. yougoslave, mais d'abord en France et ensuite dans l'appareil central de l'Internationale des jeunesses communistes, dont il fut secrétaire général. Orateur au nom du KIM au IVe Congrès du Comintern en 1922, membre du Comité exécutif du Comintern en 1924, il fut le seul membre du Comité exécutif qui se solidarisa publiquement avec Trotski en 1927, ce qui lui valut l'exclusion des organismes dirigeants, la déportation et la mort. Deux frères de Voya, étroitement liés au travail du P.C. yougoslave, partagèrent le même sort : RADA,membre du Comité central du P.C.· yougoslave, et GRÉ- · G0IRE,membre du Comité central des Jeunesses communistes yougoslaves, qui avaient purgé des peines de prison dans leur pays, vinrent s'installer en U.R.S.S., où ils perdirent la vie. VLADATCH0PITCH,député communiste et secrétaire· à l'organisation du P.C., partit pour l'U .R.S.S. en 1925, après une peine purgée dans une prison yougoslave, ·et fut représentant du Parti au Comintern et membre de son Politburo. Commandant en chef la XVe Brigade internationale dans la guerre civile d'Espagne, il fut rappelé en 1938, et arrêté avant de disparaître. BibliotecaGino Bianco LE CONTRAT SOCIAL YVANM. ALICHITCH-MARTIN0VITCH fit partie du premier groupe des communistes yougoslaves envoyés en Russie soviétique pour y être formés. Nommé secrétaire politique du Comité central en 1928., il garda ce poste jusqu'en 1931, avant de sombrer dans la « purge » stalinienne. · ANTONMAVRAK,également « apparatchik » formé au siège central du Comintern, succéda à Martinovitch comme secrétaire du Comité central du P.C. et disparut comme lui. KosTA NovAKOVITCHd, éputé communiste, s'évada de prison en 1926, entra dans l'appareil balkanique du Comintern, puis vint s'installer à Moscou où il fut arrêté en 1937. KAMIL HoRVATIN, membre du Comité central, quitta la Yougoslavie en 1929, devint membre du Bureau politique, mais fut arrêté en U.R.S.S. ainsi que sa femme Yovanka dès le début de la grande purge. Ivo GRJETITCH-FLEISCHERm,embre du Comité central, représentait le Parti au Comintern au début de la purge qui l'emporta en 1936. PETKOMILETITCH,membre du Comité central, fut glorifié dans la presse du Comintern comme « héros du prolétariat international » pour son attitude héroïque face à la police yougoslave : « Miletitch fut soumis aux tortures les plus effroyables, certainement inconnues de l'inquisition médiévale elle-même (...). Petko Miletitch supporta héroïquement ces tortures, comme seuls les bolchéviks peuvent les supporter i 4 ... » En 1938, Miletitch arriva à Moscou ; quelques jours plus tard, il fut arrêté comme « agent provocateur » et fusillé. SIMAMILIOUCHEd, éputé communiste, réfugié en U.R.S.S., fut appréhendé avec sa femme, de même que d'autres dirigeants yougoslaves comme MLADENTCH0NITCH,NIKOLA KoToUR,dont les noms sont totalement tombés dans l'oubli. ' Cet oubli est facilité par la « réhabilitation » discriminatoire pratiquée par le régime de Tito : il a réhabilité Philipe Philipovitch, . mais a laissé l'étiquette d' « antiparti » à Sima Markovitch; il a réhabilité Rada Vouiovitch, mais il garde le silence sur son frère Voya ; il a réhabilité Stefan Tsviyitch, mais pas son frère aîné Diouka. Le prédécesseur de Tito au secrétariat du Parti, M. Gorkitch, est toujours traité . ' . . pire qu un « antlpartl », presque comme un « élément suspect », alors que Petko Miletitch reste toujours un « agent de la police yougoslave ». 24. Correspondance internationale, 1934, p. 700.
B. LAZITCH . Assassinats de dirigeants communistes allemands LES CHEFSDU P.C. ALLEMANDqui s,opposèrent au diktat de leurs compatriotes à Moscou d'abord, à celui de Staline ensuite, ne cessèrent, de 1919 à 1933, de s'attirer les foudres du Comintern. C'est ainsi que Paul Frolich, Ernst Reuter (Friesland), Heinrich Brandler, August Thalheimer, Ruth Fischer, Arkadi Maslow et beaucoup d'autres étaient déjà exclus du Parti lorsqu'en 1933 ils émigrèrent en Occident (contrairement aux dirigeants polonais et yougoslaves, toujours membres du Parti, bien que souvent à l'écart, au moment de leur exil en U.R.S.S.). L'émigration communiste allemande qui gagna Moscou à partir de 1933 se composait donc exclusivement de dirigeants ayant participé à la stalinisation de leur parti et du Comintern. HuGo EBERLEIN,membre du Comité central du P.C. allemand dès sa fondation en 1918, fut le seul dirigeant allemand qui pût se flatter d'avoir participé au premier congrès du Comintern en 1919 et au dernier en 1935. A la fondation, il était le seul représentant allemand (et le seul vrai délégué de l'Europe occidentale), et présidait le premier congrès aux côtés de Lénine et de Platten. En 1922, il revint à Moscou, entra au Comité exécutif et au Secrétariat de l'I.C., présenta un rapport au IVe Congrès, fut élu au VIe Congrès, en 1928, à la Commission de contrôle, titre qui lui fut renouvelé au VIIe Congrès en 1935. En 1937 encore, la Correspondance internationale publiait un article de lui, intitulé : « La République soviétique des Allemands de la Volga - république allemande la plus libre du monde. » Mais quelques jours plus tard Eberlein allait perdre sa liberté, de même que la République allemande devait être supprimée plus tard. La soudaineté de cette arrestation est décrite ainsi par H. Wehnert : « Le soir après l'arrestation d'Hugo Eberlein, Eva Sindermann, épouse de Rudolf Lindau, laquelle travaillait à la section des cadres du Comintern, exprimait sa crainte d'avoir ellemême bientôt des ennuis. Tout récemment, elle avait participé à une fête à l'occasion de l'anniversaire d'Eberlein, organisée dans un cercle restreint, avec W. Pieck. Celui-ci avait même prononcé un bref discours, vantant les mérites d'Eberlein et déclarant que le moment approchait où ce dernier occuperait de nouveau des fonctions dirigeantes. Elle ne pouvait avoir le moindre pressentiment alors qu'Eberlein allait Biblioteca Gino Bianco 339 être peu après arrêté 25 • » La veille même de l'arrestation, Dimitrov en personne avait causé avec Eberlein de certaines questions budgétaires. HERMANNREMMELEm, embre du Politburo du P.C. allemand depuis de nombreuses années, député au Reichstag et membre du Comité exécutif et du Présidium du Comintern dans les années 1926-28, réélu au lendemain du VP Congrès, en 1928, lorsque Staline prit décidément en main le Comintern. Il représenta ensuite le P.C. allemand au Comintern jusqu'à son arrestation et celle de son fils, Helmuth, en 1937, suivies de l'extermination de toute sa famille. LEo FLIEG, élu au vp· Congrès du Comintern membre de la Commission de contrôle, fut l'une des « éminences grises » du communisme allemand : membre du Politburo, il était responsable de l'appareil secret, tant de celui qui relevait de l'OMS de Piatnitski (liaisons internationales, finances, faux papiers, etc.) que de celui qui noyautait l'armée allemande. Il , vivait à Paris lorsque, en 1937, on le rappela à Moscou. « Il débarqua ainsi à Moscou pour tomber aux mains du NKVD et l'on n'entendit plus jamais parler de lui 26 • » HANS KIPPENBERGERc,hef des services de renseignements militaires du P.C. allemand, député communiste, arriva à Moscou en 1936 et fut bientôt arrêté, accusé d'être un agent de la Reichswehr. HÉINZNEUMANNm, embre du Politburo, l'un des trois chefs du Parti dans la première phase de la stalinisation (avec Remmele et Thaelmann), émissaire du Comintern en Chine et en Espagne, réfugié en U.R.S.S., fut arrêté en avril 1937 et disparut à jamais dans les geôles. Sa compagne, Margarete Buber-Neumann, fut à son tour arrêtée et livrée en 1940 par Staline aux autorités hitlériennes. WERNERHIRSCH, secrétaire d'Ernst Thaelmann, qui s'enfuit en Union soviétique, fut également arrêté et liquidé ; ScHULTE et KREUTZBURG,membres du Comité central; HEINRICHSussKIND, rédacteur en chef de l'organe du Parti Die Rote Fahne; WILLY LEOW, vice-président des formations de choc du Parti, « Roter Frontkampferbund »; HEINRICHKuRELLA, rédacteur de l' Inprekor ( Correspondance internationale) subirent le même sort, alors que quelques rares autres dirigeants pas25. H. Wehnert, op. cil., p. 160. 26. Margarete Buber-Neumann : Von Potsdam nach Moakau, Stuttgart 1957, p. 203,
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