Emile Vandervelde - La Belgique envahie et le socialisme international

SUR LA LIGNE DE FEU • * * 21 Cette guerre de tranchées doit paraître à nos soldats aussi monotone et fastidieuse que leur travail d'ouvriers industriels. Pendant des semaines rien ne se passe. Les hommes dorment, jouent aux cartes, parcourent, en bâillant, un journal, sans autre diversion - de temps à autre - qi.i'un arrosage de shrapnells. Parfois, deux ou trois camarades sont tués par un obus. On les enterre à qô.elques pas des abris et, peu à peu, une ligne de tombes vient doubler la ligne des tranchées. Je vois encore, à P ... , quelques-unes de ces tombes, avec leurs croix de bois blanc, coiffées de la casquette du mort, ou coul'onnées de fleurs, ou précédées d'un tertre de gazon, avec des arabesques en douilles de cartouches. De l'autre côté, dans l'eau des inondations, on me montre une chose noirâtre et informe, puis une autre, avee un ceinturon brillant au soleil : des cadavres allemands du dernier hiver, remontés à la surface, ballonnés, décomposés, couverts de moisissures. La mort devant, la mort derrière, et au milieu de jeunes soldats, _séparésde tout, n'ayant guère autre chose à faire que de penser, de penser à ce qui, peut-être, les attend demain.

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