QUELQUES LIVRES fication à la portée des paysans du Sud en répétant des formules comme celle-ci : « Un royaume ne peut être gouverné par deux rois; le Vietnam ne peut avoir deux maîtres. » Cela dit, il suffit de s'entretenir avec n'importe quel homme politique du Sud-Vietnam pour constater que le particularisme survit, et que l'esprit de clocher demeure un facteur politique qu'on ne saurait neutraliser du jour au lendemain, même à l'intérieur du F.N.L. D'autre part, que sont devenus les dirigeants sud-vietnamiens éliminés lorsque fut décidée, contre leur volonté, la guerre en grand ? S'ils étaient si haut placés que l'indique Pike et s'ils n'ont pas été « liquidés », peut-on supposer qu'ils ont accepté et appliqué d'une âme sereine les décisions de Hanoï, en dépit même des revers militaires subis par la suite ? L'hypothèse émise à ce propos par Pike ne s'accorde pas complètement avec la préface de son livre, où il reconnaît n'avoir pas tenu compte des- « conflits internes du F.N.L. et des solutions intervenues », et aussi que « nous n'avions aucun moyen précis d'évaluer le degré de cohésion des cercles dirigeants » (p. XI). Le préfacier de l'ouvrage, M. Millikan, constate qu'en fait l'auteur estime « que dans certaines circonstances, en cas de règlement du conflit vietnamien, la divergence d'intérêts qui se trouve pour le moment réprimée pourrait se manifester à nouveau, en particulier entre les éléments Nord et Sud du F.N.L. » (p. V). Disons donc, pour conclure, que le livre de Douglas Pike apporte, outre une précieuse vue d'ensemble du F.N.L. pendant les années de transition, nombre d'observations pénétrantes. L'analyse des techniques de prise en main des populations, de façonnage des âmes, mises au point par l'appareil politique du F.N.L., est particulièrement intéressante, bien que cet aspect soit parfois souligné aux dépens de certains autres. Malheureusement, le lecteur ne sera guère en mesure avant longtemps de remonter aux sources de M. Pike, pour y réfléchir de son côté. Certes, une petite partie des matériaux est accessible, surtout à Saigon ; mais la plupart des documents sont encore considérés comme confidentiels. En sa qualité de fonctionnaire du Service américain d'information, Douglas Pike a passé plus de six ans au Vietnam et a pu consulter à titre officiel nombre de pièces tenues sous clef. A propos des preuves incontestables, tant par leur nombre que par leur nature, du rôle de premier plan joué par les Nord-Vietnamiens dans la lutte, Pike déclare : « En dernière analyse, les conclusions que l'on tire sont nécessairement, Biblioteca Gino Bianco 379 à peu de chose près, affaire de conv1ct1on. » Il est bien d'autres questions posées par la guerre du Vietnam, et bien d'autres réponses, qui demeurent jusqu'à nouvel ordre affaire de convir.t•')n. JOHN DoNNELL. (Traduit de l'anglais) Mort d'un Empire LEo V ALIANI : La Dissoluzione dell'AustrialJ ngheria. Milan 1966, Ed. Il Saggiatore, 505 pp. CET OUVRAGE présente la totalité des faits et des documents connus sur ce que nous appellerions volontiers la grande tragédie européenne du xxc siècle, car sans le démembrement de l'Autriche-Hongrie sans doute n'y eût-il eu ni Hitler ni seconde guerre mondiale. Ayant eu accès aux archives qui ne sont ouvertes aux chercheurs que depuis 1945, l'auteur a pu reconstituer l'événement dans tous les détails et il est douteux qu'un document quelconque encore à découvrir puisse modifier l'essentiel du tableau. Notes et références, souvent longues, occupent 140 pages du volume, ce qui est tout dire. Il est évidemment impossible de résumer un tel monument d'historiographie. Force nous est de nous contenter d'y relever certains points particulièrement dignes d'intérêt. M. Valiani caractérise tout d'abord la situation austro-hongroise d'avant 1914. Tout le monde - ou à peu près 1 - se rendait compte que le problème des nationalités réclamait une réforme profonde des structures de l'Empire bicéphale. On trouve la même préoccupation chez le prince héritier François-Ferdinand et dans la social-démocratie. Le premier projetait la transformation de la double monarchie en une triple monarchie afin de donner aux Slaves la place correspondant à leur importance numérique. Karl Renner, de son côté, élaborait un programme fédéraliste tendant à conférer aux nationalités une autonomie non point territoriale (solution impraticable, voire absurde, étant donnée l'existence de tant de territoires et de cités à populations enchevêtrées), mais juridique. De telles tentatives présupposaient la démocratisation, ce qui était naturel chez les sociaux-démocrates ; pour François-Fe~dinand, 1. Exception : les pangermanil'tea incurables et l'obtuse aristocratie honRrnlse.
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