Le Contrat Social - anno XI - n. 6 - nov.-dic. 1967

QUELQUES LIVRES fonction dt l'évolution des rapports de force politiques, diplomatiques et militaires. Certes, les trois moments de la stratégie se chevauchaient, mais il importe de les distinguer clairement, car ils n'ont cessé de déterminer la marche des opérations. Ces trois voies, l'auteur les nomme : 1. Le Soulèvement général (la majuscule est de M. Pike) ; 2. le règlement politique ou diplomatique ; enfin, 3. la guérilla l\Iao-Giap, stade ultime. « Mythe du type sorélien », le Soulèvement général (Khoi nghia) devait être l'aboutissement d'une campagne d'agitation menée partout à la fois par le F.N.L. et son noyau politique, le parti révolutionnaire populai~e (P .R.P.) Il devait être suivi d'une « série d'actions violentes, dont plusieurs d'ordre militaire », entreprises d'un bout à l'autre du pays par de petites unités allant en importance jusqu'au bataillon, accompagnées de mouvements de rébellion parmi les forces armées sud-vietnamiennes et de l'assassinat en série de représentants du pouvoir de Saigon. Dans son principe le plan excluait, à ce stade, la constitution de grandes unités capables de livrer des batailles rangées (comme à Diên-Biên-Phu, par exemple), pour la raison qu'on déclencherait ainsi une guerre véritable avec les Etats-Unis. Cette stratégie n'atteignit cependant p;as son but et, vers le milieu de l'année 1963, le F.N.L. dut accentuer son effort proprement militaire en réponse à l'activité militaire accrue de Saigon. A partir de ce moment, le F.N.L. allait être de plus en plus dominé par des cadres professionnels, chargés d'assurer la transformation des groupes de combat, jusque-là plus ou moins autonomes, et leur intégration dans des unités de type plus classique, capables d.'exécuter des missions militaires proprement dites. La deuxième voie envisagée pour assurer la fin des hostilités et la victoire finale, celle du règlement politique et des négociations, se rattachait de façon générale aux perspectives ouvertes par la première, celle du Soulèvement. Dans les milieux dirigeants du F.N.L., la méthode dite « politique » conserva longtemps un certain attrait ; il se peut qu'en 1963 encore, le F.N.L. songeait à quelque formule de gouvernement de coalition, dans l'espoir de s'emparer ultérieurement de la totalité du pouvoir sans devoir s'engager dans la troisième étape du plan de guerre. Dès 1964, toutefois, il fallut constater que cette deuxième voie n'était plus ouverte. L'intervention militaire accrue des EtatsUnis suscita en même temps un débat doctrinal qui ébranla la direction du F.N.L. ; pour la Biblioteca Gino Bianco • 377 première fois la théorie du Soulèvement général, prédominante jusqn'alors, fut mise en cause. Comme il fallait s'y attendre, les cadres militaires du Nord l'emportèrent en imposant le recours à l'arme suprême : la guérilla MaoGiap. Décision funeste, étant donné que les forces conjointes du F.N.L. et du Nord-Vietnam ne pouvaient d'aucune façon espérer remporter une victoire militaire complète sur celles, réunies, du Sud-Vietnam et des Etats-Unis. Le F.N.L. ayant ainsi échoué dans sa mission, les Nord-Vietnamiens en assumèrent la direction. Le Soulèvement ne s'était pas produit, les négociations étaient hors de question jusqu'à nouvel ordre. D'importants éléments de la population - minorités ethniques, fidèles de certaines religions - n'avaient pu, malgré tous les efforts d' « organisation », être suffisamment noyautés, et l'esprit de clocher des paysans constituait toujours un problème. On ne pouvait plus compter, autant qu'à l'époque où la partie semblait gagnée, sur les vocations pro-F.N.L. suscitées par l'opportunisme, et on manquait de plus en plus de ces militants à toute épreuve sans lesquels l'organisation ne pouvait fonctionner. La « relève » par les Nord-Vietnamiens avait d'ailleurs commencé dès le milieu de 1963, par l'élimination progressive des cadres dirigeants auxquels ils ne pouvaient se fier. Ainsi épuré au sommet, le F.N.L. sut résister avec succès aux remous incessants de la vie poli tique sud-vietnamienne, provoqués par l'effervescence anti-Diem, qui risquaient de réduire son influence, voire de favoriser dans ses rangs les tendances simplement réformistes. Les jusqu'auboutistes de la révolution continuèrent à se défaire des éléments récalcitrants, tant et si bien que dès le début de 1965, le choix de la stratégie révolutionnaire - entre les trois voies possibles - « n'appartenait plus au F.N.L., mais relevait en premier lieu d'Hanoï et de Pékin ». * * * En quoi l' « idéologie » du F.N.L. est-elle communiste ? Au moins pendant la premièr~ phase de la guerre ( 1960-64 ), c'est seulement, selon Douglas Pike, dans les hautes sphères de l'organisation que le communisme était considéré comme « une nouvelle forme de sagesse qu'il convenait de connaître, de comprendre et d'appliquer ». Dans son ensemble, si le mouvement était communiste, c'était par alliance et par affiliation plutôt que par conviction. Mieux que l'adhésion au marxisme-léninisme, la ferveur que le F.N.L. est censé inspirer à

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