374 à des problèmes d'un tout autre ordre de gran- .deur - et dont on n'a pas fini de mesurer la portée~ Ce qui l'intéressait, en effet, c'étaient les monopoles, les cycles, l'accumulation, la croissance - autant de questions qui sont au premier plan des préoccupations des économistes de notre temps. * * * La théorie de la valeur-travail, par laquelle Marx a commencé, avait une fonction logique, car ayec cette notion - actuellement rejetée par la quasi-totalité des économistes - il cherchait à établir les conditions de l'équilibre économique. La conception marxienne de la valeur était évidemment d'ordre macro-économique, c'est-à-dire qu'elle s'étendait à l'ensemble de l'économie ; .appliquée à une entreprise unique, la notion du taux de plus-value ne pouvait être guère qu'une héroïque abstraction. Mais malheureusement, et sur ce point M. Wolfson a tout à fait raison, 1a théorie de la valeurtravail ne peut servir de modèle opérationnel et n'est donc pas applicable dans les cas particuliers. Essayer d'expliquer les modifications des niveaux de prix par la plus-value, c'est revenir au fameux problème de l'homogénéité du travail, celui de l'ouvrier qualifié et de l' ouvrier non qualifié. Ou encore : comment, dans le schéma marxien, fait-on intervenir les frais de conditionnement et de comptabilité dans l'établissement du prix de revient ? Qu'entendon exactement par « travail humain abstrait » ? Comment définir le « temps de travail socialement nécessaire » ? Bref, on n'échappe pas à la conclusion que les six premiers chapitres du Livre premier du Capital relèvent purement et simplement de la métaphysique. Pourtant, si compétent que soit ici l'examen de M. Wolfson, on constate que ses analyses ne mettent nullement en évidence le prétendu penchant de Marx pour les a priori rationalistes. Les commentaires de l'auteur se présentent presque exclusivement sous la forme quelque peu rébarbative de l'analyse économétrique : devant l'abondance des démonstrations mathématiques, on se demande pourquoi M. Wolfson a cru devoir les faire précéder d'une longue incursion dans le domaine philosophique. D'autre part, comme ce sont surtout la théorie de la valeur, les salaires, l'appropriation de la plus-value et les crises qui intéressent M. Wolfson, il néglige par trop les schémas marxistes de la circulation et de l'accumulation. C'est dommage, car pour nombre d'économistes les passages du Capital qui s'y rapportent, notamment dans le Livre II, constituent inconBibt.ioteca Gino Bianco LE CONTRAT SOCIAL testablement l'élément le plus impressionnant de la doctrine de Marx. Sont présentées, dans · ces passages, d'une part une théorie de la croissance qui va au fond des choses, d'autre part une analyse extrêmement féconde du rôle et des répercussions de l'accumulation. Marx distingue entre la production de nouveaux moyens de production, celle des produits indispensables à la subsistance des travailleurs, enfin celle des articles de luxe dont se délectent les capitalistes. Dans chacun ·des trois secteurs interviennent capital variable, capital constant et plus-value, celle-ci pouvant être soit consommée, soit investie; dans ce dernier cas, elle se transforme ou en capital constant ou en capital variable. Autrement dit, Marx présente en substance une analyse du flux du revenu national - en l'espèce l'un des tout premiers modèles de ce type dans l'histoire de la pensée , . econom1que. Marx commence par poser un premier schéma, où il n'y a pas accumulation, mais simplement reproduction, comme dans l'image stati- . que de l'économie politique classique. A ce stade, le flux est simplement fonction de l'offre globale et de la demande globale : le progrès technique n'intervient pas, le rapport capitaltravail reste constant - ce sont là des procédés analytiques traditionnels. L'élément dynamique est introduit par la « reproduction élargie », où Marx montre comment le capital s'accroît et comment le rythme de sa croissance peut varier d'un secteur à l'autre. Du fait m~me de cette croissance et de ces décalages, on peut conclure à une instabilité intrinsèque au système; d'où les crises qui le secouent périodiquement. La façon dont M. Wolfson traite de cet aspect de la doctrine n'est pas entièrement satisfaisante. La contradiction flagrante entre la baisse du taux de profit et la « loi » de la paupérisation croissante semble se perdre dans .un dédale d'équations mathématiques. D'après Marx, la diminution du taux de profit découle de la structure même de l'économie (car la diminution de la demande globale n'entre pas ici dans le schéma) : elle accompagne nécessairement l'élévation non moins nécessaire <le la composition organique du capital, c'est-à-dire l'accroissement du rapport capital-travail. Or comment l'accumulation peut-elle se poursuivre en l'absence d'un taux favorable du profit ? Sans profit, il ne peut y avoir accumulation. Si Marx avait révisé son modèle en y prévoyant l'éventualité d'une décroissance relative du capital constant, il aurait pu faire face, dans son système, à un type particulier de progrès techniques : ceux qui permettent des économies
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