Le Contrat Social - anno X - n. 2 - mar.-apr. 1966

, L'OBSERVATOIRE des deux Mondes Toujours le Vietnam L'INTERMINABLEGUERRE du Vietnam bat son plein, avec des alternatives de pauses et d'acharnements, dans les conditions horrifiantes que nous avons dites précédemment (voir notre « Observatoire» de septembre et de novembre 1965). Les Etats-Unis, avec des appoints mineurs venus d'Australie, de Nouvelle-Zélande et de Corée, c'est-à-dire de pays où l'on a pleine conscience du proche danger communiste, les Etats-Unis sont seuls à contenir l'offensive du communisme asiatique pour le compte de tout l'Occident aveugle et sourd. En même temps, le défaitisme aussi bat son plein, et d'abord aux Etats-Unis d'où il se propage dans tous les pays qui profitent de la protection américaine et en désavouent les moyens. Sous les masques divers du pacifisme, du libéralisme, de l'humanitarisme, la propagande communiste avouée ou non se donne libre cours sans rencontrer d'obstacles, alimentée aux Etats-Unis par les défaitistes invétérés du genre Walter Lippmann, favorisée par les déclarations incessantes et publiques de sénateurs ignares et d'experts inconscients, approuvée par des « intellectuels» stupides ou pervers, colportée à travers le monde par la grosse presse mercantile et vulgaire pour qui les affaires sont les affaires. Il en résulte la pire confusion des· esprits dans les milieux sociaux apparemment les moins enclins à accepter d'emblée les sophismes du communisme conquérant, et singulièrement en France où la bourgeoisie égoïste et bornée spécule ouvertement sur l'avance du « péril jaune» en direction des mers du Sud. Or, de quoi s'agit-il? La question ne saurait être mieux posée que Salvador de -Madariaga ne l'a fait en 1959 dans la N eue Zürcher Zeitung, ainsi que nous l'avons cité dans Est et Ouest, n° 225, de novembre 1959 : « Il est donc inutile de céder aujourd'hui dans l'espoir d'arrêter l'effritement d'une position, car la conséquence d'une telle politique serait que cet effritement continuerait et que le monde libre, demain, se verrait contraint de céder exactement comme il aura déjà cédé la veille et précisément parce qu'il aura déjà cédé ( ... ). Ce qu'on nous demande, c'est non seulement d'évacuer telle ou telle position, mais de renoncer à tout notre système défensif ( ... ). Si nos reculades ont déjà été suffisamment désastreuses, la renonciation à une vraie liberté en échange du plat de lentilles d'une fausse paix aurait si possible des conséquences plus graves encore pour le monde ( ... ). Ce qui ressort le plus net de l'histoire la plus récente, c'est que Biblioteca Gino Bianco le communisme attaque chaque fois que l'adversaire recule ou se prête à un compromis, et qu'il rentre ses cornes chaque fois que cet adversaire reste ferme.» Reste à savoir si un raisonnement aussi sensé demeure pertinent, appliqué à la situation présente au Vietnam. L'opposition pseudo-libérale à la politique extérieure des Etats-Unis dont la guerre au Vietnam n'est que le prolongement par des moyens militaires, cette opposition telle qu'elle s'exprime par la voix de M. George Kennan, de M. Thant, des sénateurs Fulbright et Mansfield, du New York Times, etc., n'ose pas préconiser une capitulation pure et simple devant le Vietcong, instrument du Nord-Vietnam que soutiennent à fond la Chine et l'Union soviétique. Elle propose seulement l'arrêt des bombardements aériens (équivalant à une quasi-suspension unilatérale des hostilités), l'ouverture de négociations avec l'ennemi (qui les refuse obstinément et exige le départ inconditionnel des forces américaines), l'application des accords de Genève (que le Nord-Vietnam a systématiquement violés, qu'il violera nécessairement encore si rien ne l'en empêche), des élections libres au Sud-Vietnam, pas au Nord («libres» sous le chantage et la terreur, comme en Chine et en Russie soviétique). Les communistes ne demandent pas autre chose : ce sont leurs exigences minimales. Que satisfaction leur soit donnée, que le Sud-Vietnam tombe ainsi sous leur coupe, et sera réglé ensuite le sort du Cambodge, du Laos, de la Thaïlande, de la Malaisie, de tout le Sud-Est asiatique. · * ,,.,,. Le général Maxwell Taylor, ex-ambassadeur à Saïgon et l'un des conseillers du président Johnson, disait le 18 février dernier devant une commission du Sénat américain que le Vietcong espère gagner la guerre à Washington, non sur les champs de bataille, comme il l'a gagnée en 1954 à Paris sur le plan politique. C'est en effet ce qu'escomptent les communistes, dont la conviction se renforce à mesure qu'ils collectionnent les informations rapportant les démarches, manœuvres et manifestations de leurs auxiliaires et de leurs dupes aux Etats-Unis et autre part. Ils s'entendent à mobiliser ce que leur impudence appelle « l'opinion mondiale» ou même cette « conscience universelle» qui, « d'ailleurs, n'existe pas», écrivait naguère Anatole France. Les populations du globe sont con1plètement étrangères aux remous, aux meetings, aux éclats suscités par les manipulateurs éhontés de l'opi-

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