Le Contrat Social - anno X - n. 2 - mar.-apr. 1966

T. KATELBACH 6.249 Polonais sont rentrés de Russie en 1955, 30.786 en 1956, 93.872 en 1957, 85.865 en 1958. Soit 216.952. Il faut ajouter à ce chiffre celui donné par la T rybuna Ludu du 19 juillet, 28 .400. Le total dépasse 24 5 .000. 15 % , cela fait à peine 30.000 ou 40.000 prisonniers. Pendant tant d'années, il n'en est pas revenu davantage du fond des provinces russes. Et les autres ? Ils sont encore dans des camps et des prisons soviétiques. C'est pourquoi, dès la fin de mars 1959, nous avon~ exigé des autorités communistes de Pologne qu'elles reprennent les négociations avec les Soviétiques, afin d'obtenir la prolongation de l'accord et donner à tous la possibilité de rentrer dans leur patrie. Nos appels ne reçurent aucune réponse. Les gouvernants polonais, qui s'éloignaient à grands pas de la route tracée en octobre 1956, estimaient que la question du rapatriement était réglée et qu'il convenait de l'oublier au plus vite. Nouvelle campagne pour le rapatriement UN ANAPRÈSla fin de l'accord sur le rapatriement, en avril 1960, nous sommes revenus sur cette question. Nous avons défini notre position lors de l'émission « Evénements et opm1ons » : Nous avons déjà souvent parlé des Polonais déportés au moment de la guerre. Mais nous mettrons, pour revenir sur ce sujet, la même ténacité que les Soviétiques mettent à répéter que pleine liberté est laissée à tous en Russie, et qu'il ne s'y trouve pas d'étrangers retenus de force. Il n'y a qu'une solution : l'intervention du gouvernement de Varsovie. Pourquoi l'Italie a-t-elle rappelé l'existence de ses ressortissants en Russie, et avec succès? De même l'Amérique, l'Allemagne de l'Ouest? Pourquoi les Français ont-ils posé à Khrouchtchev la question des Alsaciens engagés de force dans les troupes hitlériennes et faits prisonniers en U.R.S.S. ? Le gouvernement de Varsovie n'a pas le courage de réclamer ses ressortissants. Pourquoi s'est-il contenté d'un rapatriement de toute évidence partiel ? 'Il est difficile de comprendre pourquoi cette question peut être posée et traitée d'une manière réaliste entre les deux blocs, alors qu'à l'intérieur du camp dit de l' « amitié », elle est considérée comme un tabou ? C'est sans doute la preuve que les Soviétiques considèrent les pays de leur empire comme des vassaux. Et que les gouvernements soumis acceptent ce traitement et se résignent à ne pas prendre la défense de leurs nationaux. Le 1er juillet, nous disions : Combien de Polonais déportés pendant la guerre se trouvent encore en Russie? On ne le sait pas exactement. D'après les estimations superficielles faites à Varsovie en mars de l'année dernière, ils doivent être 7.5.000 ou 100.000. Or, ces chiffres sont très inférieurs à la réalité. Nous pensons que plus de 200.000 Polonais vivent encore cr, Union soviétique. Tous devraient BibliotecaGino Bianco 117 pouvoir, à un titre ou à un autre, rentrer en Pologne. Quand on parle de 75.000 ou 100.000 personnes, il s'agit de celles dont le sort est plus ou moins connu, et dont on peut assurer qu'elles sont en vie. Une partie d'entre elles se trouvent encore en prison. Nous rappelions ensuite les incroyables difficultés opposées par l'administration soviétique au moment d'appliquer l'accord. L'émission se terminait ainsi : Nous comprenons bien que le rapatriement s'est terminé en mars de l'année dernière aux termes de l'accord polono-soviétique. Telle est Îa lettre des textes. N[ais le problème existe toujours, et l'opinion polonaise tout entière doit exiger qu'il soit résolu. C'est pourquoi nous répétons notre question : « N'estil p~s ~ossible d~entreprendr~ des démarches pour faciliter a nos dermers compatriotes en Russie le retour dans leur patrie ? » Il n'y a sans doute qu'une réponse : « Cette possibilité existe ! ». Telle n'est pas apparemment l'opinion des autorités communistes de Varsovie, car on n'entend toujours pas parler d'une quelconque action en faveur des Polonais détenus en Russie. Le problème, paraît-il, est résolu : il n'y a plus de déportés. Pour la deuxième fois, nous rompons le silence pour informer l'opinion publique polonaise et mondiale du résultat de nos recherches systématiques de ces cinq dernières années. Certes, les nouvelles mettent longtemps à parvenir d'U.R.S.S., et elles ne sont pas absolument complètes. Mais nous en avons trouvé une triste confirmation dans le recensement de la population soviétique de 1960. Les documents publiés deux ans plus tard firent apparaître un chiffre remarquable : plus de 1.380.000 Polonais, c'est-à-dire des personnes de souche polonaise, parlant la langue ou se reconnaissant comme tels, vivaient disséminés dans les diverses Républiques soviétiques, dont 118.000 dans la République de Russie (R.S.F.S.R.) et plus de 53.~00 au Kazakhstan. Avant la guerre, il n'y avait de Polonais ni dans la Réoublique de Russie ni au Kazakhstan. Ils y so~t arrivés contre leur gré, victimes de déportations ou de condamnations injustes. D'après le recensement soviétique, ils sont plus de 170.000. En réalité, ce sont 200 .000 ou 250 .000 Polonais qui selon les estimations les plus prudentes sont' encore déportés en U.R.S.S. Il est temps de se souvenir d'eux, il est temps de réveiller l'opinion publique. Comme en 1955 et 1956, la Voix de la Pologne libre commencera ses émissions par ~es listes de noms et de camps où, plus de vingt ans après la fin de la guerre des Polonais sont encore détenus. ' THADÉE KATELBACH. (Traduit du polonais)

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