100 · taliste, - qui donc a besoin de cette misérable bande d'esclaves vendus ? Il était évident que personne n'avait besoin de cette·« bande d'esclaves vendus», les chefs les plus vénérés de l' «avant-garde ». Et Staline de conclure : En 1937, Toukhatchevski, Iakir et autres monstres ont été condamnés à être fusillés. Après, ont eu lieu les élections au Soviet suprême de l'U.R.S.S. Ces élections ont donné au pouvoir soviétique les suffrages de 98,6 % de tous les votants (sic). Au début de 1938, Rosengolz, Rykov, Boukharine et autres monstres ont été condamnés à être fusillés. Après, ont eu lieu les élections aux Soviets suprêmes des Républiques fédérées. Ces élections ont donné au pouvoir soviétique les suffrages de 99,4 % de tous les votants (sic). On se demande où sont les signes de « décomposition » [ du régime, de l'Etat, de l' « avant-garde »], et pourquoi cette « décomposition » ne s'est pas traduite dans les résultats des élections ... Cette étrange comptabilité des suffrages truqués et des «monstres» liquidés faisait partie de l' «éducation »du peuple. Il a fallu que Khroucht~hev appliquât la même sinistre comptabilité à son prédécesseur pour que les surhommes qui, dans le monde entier, se croyaient «taillés dans une étoffe spéciale», abandonnent leurs lamentables chimères et mettent une sourdine à leurs prétentions éducatrices. Mais n'est-il pas quelque peu affligeant d'entendre un des directeurs les plus vénérés de la secte lui proposer, en se faisant le plus petit possible, la tâche jugée «énorme» de réhabiliter quelques-unes des évidences qu'elle avait mis tant d'acharnement à bafouer ? Réapprendre : ce fut le mot qui fusait de toutes parts pendant cette courte période. Et si c'est le seul qu'on n'a pas pu traduire en slogan, n'était-ce pas parce qu'il était le seul qui exprimât une pensée ? « Réapprendre » ce qu'on a désappris ÉCOUTONS p. Togliatti : Il faut réapprendre une vie démocratique normale, c'est-à-dire réapprendre l'initiative dans le domaine des idées et dans la pratique, la recherche du débat passionné, réapprendre ce degré de tolérance envers les erreurs qui est indispensable pour découvrir la vérité, réapprendre la pleine indépendance du jugement et du caractère ... Voilà ce qu'il a fallu rappeler après un siècle de marxisme ... Fallait-il mettre le feu au mondé pour «réapprendre » le · B, A, BA des mœurs civilisées ? Fallait-il tomber de si haut pour découvrir que les prétendues «libertés formelles » sont indispensables à la vie politique, à l'existence des partis ? Etait-il nécessaire de passer par cette école de cynisme retors et de plate servilité pour cc réapprendre la pleine indépendance du jugement et du caractère» ? · Biblioteca Gino Bianco . LE CONTRAT SOCIAL L'apprentissage de la sincérité et de la véracité sera une «tâche » autrement plus «énorme » pour ces dispensateurs de la «science». Reprenons une des premières pensées de Marx : L'ignorance est un démon. Nous redoutons qu'elle ne provoque encore plus d'un drame. C'est avec juste raison que les plus grands poètes grecs l'ont représentée, dans les drames poignants des maisons royales de Mycènes et de Thèbes, comme la tragique fatalité 6 • Il ne savait pas si bien dire : cette «tragique fatalité» devait réapparaître à l'arrière-fond d'un drame qui allait se jouer devant d'autres maisons royales que celles de Thèbes et de Mycènes. Marx ne pouvait pas connaître la terrifiante signification que la «Maison du Parti_)>allait revêtir aux yeux des masses asservies, et il ne pouvait pas prévoir que cette «fusion de la science et du prolétariat» dont rêvaient Lassalle et Rosa Luxembourg 7 , allait un jour se réaliser contre le marxisme. En effet, la seule révolution du xxe siècle, et peut-être la seule révolution depuis 1848 qui fût réellement scellée par cette entente de l'« humanité pensante» et de l'« humanité souffrante » que réclamait Marx, a été la révolte qui a uni intellectuels, ouvriers et paysans en Pologne et en Hongrie et les a dressés contre le despotisme à la fois idéologique, politique et économique des adeptes du «marxisme orthodoxe ». «Plus, avait dit Marx, les événements laisseront à l'humanité pensante le temps de se recueillir et à l'humanité souffrante le temps de s'unir, et plus parfait naîtra le produit que le présent porte en lui 8 • » Il n'a pas fallu longtemps aux intellectuels et aux travailleurs hongrois pour prendre conscience de l'« aliénation» que leur faisait subir un «système de normes » absurde et tyrannique, aussi bien dans le domaine de la production intellectuelle que dans celui de la production matérielle. Et ce fut l'Association des écrivains qui se révolta la première : la lutte de l' «humanité pensante » pour la vérité précéda la lutte de l' «humanité souffrante » pour la liberté. La lutt~ pour la vérité . ' EN FAIT, les intellectuels n'avaient pas moins souffert que les travailleurs : pour les économistes, les historiens, les philosophes, les écrivains, les professeurs de lycée qui se succédèrent à la · tribune du Cercle Petœfi, la lutte pour leur droit à la vérité était inséparable de la lutte de tout un peuple pour sa libération nationale, politique, économique et sociale. Ecoutons Gyula Hay : Nous en :mmmes arrivés au point où le problème le plus essentiel est celui de la vérité. Les meilleurs écri6. Article dans la Rheinische Zeitung, Mega, I-1, p. 248 (1842). 7. Rosa Luxembourg : « Masses et chefs», in Marxisme contre dictature, 1946, p. 37. 8. Marx : Lettre à Ruge, mai 1843.
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