374 _que les enfants conservent certains traits de leurs géniteurs temporels et spirituels. Nous entendrons donc par cc marxisme » ce qui subsiste au minimum de la pensée de Marx chez les divers marxistes contemporains, ce qui fait qu'en dépit de leurs controverses ils concordent sur tels points de doctrine. (De même, les chrétiens de toute obédience conservent entre eux quelques affinités.) Nous voyons bien que sur ce chapitre notre désaccord subsiste avec certains marxologues ou historiens des origines, qui ne tiennent pour recevable que ce qu'ils ont exhumé au prix d'un grand effort d'érudition, inutile aux yeux des simples. Nous aurons donc pour tâche de produire ce que nous estimons, malgré tout, affleurer de ces excavations. Nous ne pourrons nous fonder que sur une modeste connaissance des écrits de Marx et une non moins modeste subodoration de ce qui continue, de nos jours, à en porter la marque, quel que soit le mode de transmission. La méthode qu'à tort ou à raison nous appelons axiomatique doit nous permettre de fixer les éléments d'une sorte de credo commun aux marxistes. Ce credo, nous pensons qu'il se trouve effectivement chez Marx, en dépit de tout ce qui peut maintenant venir se greffer de façon parasitaire sur la pensée des origines. Reste à faire face à la seconde objection, qui n'est pas la moindre. Il pourrait s'y ajouter celle de pédantisme vain. ou d'emploi à contretemps ·d'un terme d'allure « scientifique », à des fins parodiques ou charlatanesques. Pour notre excuse, nous ne pouvons oublier . qu'un autre nom du « marxisme », dû à une prétention de ses fondateurs, est le « socialisme scientifique». C'est sans doute une des raisons pour lesquelles nous avons cru pouvoir aller chercher dans l'arsenal de la pensée scientifique contemporaine une méthode qui permette d'éprouver la validité dudit socialisme scientifique, après en avoir exposé correc- . tement .les grands traits. Apprenti sottement ambitieux, n'allons-nous pas, après avoir dérobé . l'instrument, en faire un mauvais usage ? Le marxisme, au sens où nous l'avons entendu et ..qui nous dispense désormais d'employer les guil- , lemets, n'a rien à voir avec les mathématiques ,pures puisque aucune théorie des mathématiques · pures ne concerne les faits, tandis que le marxisme traite des faits humains. Nous pouvons répondre ·à l'objection, mais seulement de façon partielle, en faisant valoir que de nos jours on n'axiomatise pas seulement les mathématiques pures, mais aussi les théories physiques qui doivent rejoindre, · au moins en dernière analyse, les faits. Les faits . humains ne sont-ils pas eux-mêmes, pourvu qu'on prenne le mot dans un sens suffisamment large, des faits de la nature ? Si. l'on admet avec Spinoza que « l'homme n'est pas dans la nature comme un empire dans -un empire », on doit pouvoir aussi axiomatiser les . doctrines relatives aux sciences humaines. ·_.·L'axiomatisationdans les sciences de faits· est Biblioteca Gino Bianco DÉBATS ET RECHERCHES précisément ce qui permet de formuler clairement les hypothèses dont il y a lieu ensuite de chercher à éprouver la validité dans des expériences. Mais le premier modèle se trouve dans les sciences mathématiques que nous appelons « pures » parce qu'initialement elles nous allègent du souci des faits, en nous permettant de ne prêter attention qu'à la pure conséquence logique. Pour soumettre notre pensée· au contrôle des faits, encore faut-il d'abord la constituer. Jusqu'à preuve du contraire, on ne connaît pas d'autre méthode que celle qui consiste à procéder selon le modèle offert par le mathématicien. · On s'excusera d'avoir à rappeler un truisme d'école afin d'éliminer une équivoque séculairement dénoncée mais toujours renaissante. S'inspirer du modèle d'analyse offert par le mathématicien, ce n'est pas nécessairement, comme lui, faire des mathématiques, ne considérer que les objets dont il s'occupe (nombres, points, droites, plans, etc.) : <c ••• considérant, dit Descartes dans le Discours de la méthode, qu'entre tous ceux qui ont ci-devant cherché la vérité dans les sciences il n'y a eu que les seuls mathématiciens qui ont pu trouver quelques démonstrations (...) je n'eus pas dessein pour cela d'apprendre toutes ces sciences particulières qu'on nomme communément mathématiques ... ». Mais cela doit nous inciter à rabattre de nos propres prétentions : si nous tentons de faire usage de l'axiomatique, ce n'est point pour jouer au mathématicien. En particulier, nous ne saurions, dans le domaine qui nous occupe, chercher comme lui à « formaliser », c'est-à-dire à oublier jusqu'à la signification concrète ou application empirique des mots que nous aurons à employer. Renonçant à la « formalisation », quel avantage espérons-nous d'une inspiration puisée dans la méthode appelée axiomatique ? Expliciter les axiomes ou postulats, c'est-à-dire les propositions que l'on reçoit pour servir de base à ce que l'on a dessein de démontrer; étudier leurs conditions d'indépendance, de suffisance et de compatibilité; dégager les systèmes, partiels ou complets, que l'on pourrait constituer en se débarrassant de certains d'entre eux, quitte à les remplacer. Enfin, ·puisque.nous évoquons la prétention du marxisme à constituer un socialisme scientifique, étudier les conditions d'adéquation, c'est-à-dire éprouver par les faits la validité <lesdits axiomes, considérés dès lors à titre d'hypothèses. LA·MONTAGNvEa maintenant accoucher d'une souris. Lés postulats de la doctrine reçue sous le nom de marxisme, et pour laquelle nous pouvons disposer du sigle M, vont être explicités de la manière suivante : Mx. - L'homme est aliéné, c'est-à-dire qu'il n'éprouve pas sa condition comme satisfaisante ..(humanisme).
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