Anniversaire MAXIME LEROY (1873-1957) par Édouard Bonnefons Pour la deuxième fois, la rédaction du Contrat social commémore la disparition de son doyen, ami et collaborateur si regretté, Maxime Leroy, président de l'Institut d'Histoire sociale, décédé le 15 septembre 1957. Pour marquer ce triste anniversaire, AXIME LEROY ne devait être que trois ans votre confrère. Après une vie de labeur, de recherches et d'études, qui lui permit d'assister en observateur sagace à l'évolution la plus extraordinaire des sociétés humaines, il fut appelé par vous à succéder à Jacques Lacour-Gayet. Je suis sûr qu'aucun d'entre vous n'a oublié la finesse et la bienveillance de ce visage empreint de sagesse et de philosophie. La multiplicité de ses titres, la variété de ses ouvrages, le caractère encyclopédique de sa culture le désignaient tout naturellement à vos suffrages. Esprit curieux, attentif à tous les problèmes de notre temps comme à ceux du passé, il avait un charme et une abondance d'idées auxquels étaient sensibles tous ceux qui l'ont approché. Pour évoquer une carrière aussi dense que la sienne, il faudrait emprunter à Maxime Leroy lui-même ses dons de biographe. Mais la richesse de son œuvre, la multiplicité dè ses actions, la noblesse de son personnage vont faciliter singulièrement ma tâche. En retraçant la vie illuminée de bonté de Maxime Leroy, comment ne pas évoquer un de ces explorateurs dont parle Guillaume Apollinaire qui voulait « explorer la bonté, contrée énorme où tout se tait » ? NÉ en 1873, il nous a tout dit de lui-même sur son enfance*. Son père, qui était critique musical, fut l'un des introducteurs d~ Wagner en France. BibliotecaGinoBianco • on a cru devoir reproduire, ici l'éloge de Maxime Leroy prononcé par M. Edouard Bonnefous, son successeur à l'Académie des Sciences morales et politiques, dans la séance du 2 mars dernier. En l'entendant évoquer cette période de sa· vie où sa précocité d'esprit fut surprenante, on croit voir apparaître soudain la géniale simplicité d'un Descartes qui lui inspira des pages émouvantes : Enfant un peu abandonné (...) je suis resté des journées entières, seul, dans l'appartement de mes parents.·; ils n'y étaient pas ; j'y logeai seul, vers treize ou quatorze ans déjà, dormant sur le canapé de mon père, enveloppé dans sa robe de chambre, sans couverture ni oreiller. J'ai pris là de bonnes habitudes de simplicité ; je sais faire mon ménage, s'il le faut ; je sais descendre m'acheter des légumes, du pain ou des œufs. Était-il vraiment seul ? Non, car déjà son univers était peuplé de livres : « Je suis devenu leur sujet, leur administré, leur prisonnier. Je les ai maniés, feuilletés (...) J'ai rêvé en regardant les lignes noires, de page en page»~ Tel Lamennais, lecteur de Rousseau à 10 ans, Maxime Leroy enfant lisait déjà• Proudhon, Saint-Simon et Sainte-Beuve. Et cependant, à , , . . , . . . cette epoque ces ecr1vams etaient tnJustement relégués au purgatoire des Lettres. Que cherchait le jeune lycéen dans de telles œuvres ? La description de l'humanité malheureuse ? Sans doute, mais surtout, ainsi qu'il l'avoue lui-même : « [Ces livres] développèrent en moi cet instinct qui probablement y était déjà : celui de chercher l'explication ». Comme ces enfants qui veulent tout savoir et inlassablement accumulent les questions, Maxime * Cf. Contrat social, septembre 1958 : «· Itinéraire intellectuel ». ( N.d.1.R.)
RkJQdWJsaXNoZXIy MTExMDY2NQ==