Le Contrat Social - anno III - n. 5 - settembre 1959

A. MARTIN LA LITTÉRATURE SOVIÉTIQUE consacrée à l'Afriq~e orie1!tale intertropicale est presque inexistante (citons 1examen du problème Mau-Mau dans Narody. Afn"ki et Imperialistitcheskaia Borba). Alors que se renforce l'attention sur l'Afrique en général, les régions orientales continuent d'être négligées. Aucun projet important n'est en voie ~'exécu~on ou s~pl~ment envisagé, à l'excepnon d etudes historiques sur la colonisation ar~be et sur !a composition ethnique du Tanganyika et de 1 Ouganda. Ce manque d'intérêt est dû pour une grande part, de l'aveu même des Soviétiques, au retard du mouvement national dans ce secteur. Les observateurs y ont relevé l'~pparition d'une bourgeoisie indigène, à vrai ~e en~ore pe_u ~ombreuse ~t sans grand poids econormque, amsi que la croissance d'une classe ouvrière ~u'ils es~ent beaucoup plus dense ~ue les chiffres _of!iciels~e le suggèrent. Malgré 1 absence de stansnques, ils s'affirment convaincus q~~ la ~~renciation e~tre paysans pauvres et atses est deJà fort avancee 25 • Dans les territoires arriérés, le mouvement anti-impérialiste est limité p~ 1~ cadre tri~al et représenté par des « groupes re~gieux sectatres », telle en Ouganda la secte Mizambwe. La révolte des Mau-Mau, « en dépit de ses résonances religieuses », est considérée comme un mouvement agraire« qui n'a, à aucun moment, déployé une activité particulière » 26 • le danger Mau-Mau serait un mythe dont le~ Bri!~qu~s . ont usé . contre les organisations ann-rmperialistes surgies en différents points du pays. « Mais il n'a pas fallu longtemps pour démasquer le mensonge du danger Mau-Mau. » Lors des événements du Bouganda, on a vu pour la première fois en Afrique orientale une organisation de la classe ouvrière à la tête d'un mouvement mobilisant le peuple tout entier. L'idée d'une fédération d'Afrique centrale est naturellement combattue et l'on prétend même que « les chefs féodaux du Bouganda et du Kabaka » ont rallié l'opposition. Quant à l'Éthiopie, il était admis jusqu'en 1955 que le gouvernement d'Addis-Abéba « collaborait avec les fauteurs de guerre améric.ajns pour transformer le pays en une base d'agression » ; les conditions locales étaient données comme déplorables, l'absence de liberté et le « double joug du féodaljsme médiéval et de l'impérialisme» dénoncés 27 • Par la suite, on avait découvert que le gouvernement abyssin jouissait après tout d'une certaine indépendance, qu'il était « inquiet de l'influence grandissante des ÉtatsUnis » et voulait « atténuer sa dépendance à leur égard», etc. 28 • L'accent était mis désormais 25. Narody A/riki, p. 449. 26. Ibid., p. 458. 27. S. Datline : • L'Afrique sous le joug de l'impérialisme ,, Moscou 1951, pp. 29-30 ; Narody Afriki, pp. 391-96. 28. D. R. Voblikov : • La rivalitc! anglo-amc!ricaine dans l'~thiopie d'apr~s guerre •, dans Soo. Voit. 1957, n° 4, pp. 36-38. Biblioteca Gino Bianco 283 sur les encouragements donnés par les autorités éthiopiennes au développement de l'industrie et de l'agriculture nationales ; l'absence de libertés démocratiques, dont il est fait encore mention, est reléguée au second plan. Aucun grand projet d'étude sur l'Éthiopie ne paraît être en chantier, à l'exception de certains travaux d'ethnographie. On peut s'en étonner, car l'intérêt de la Russie pour ce pays remonte au XIXe siècle et ne s'était pas démenti au cours des vingt premières années du nouveau régime 29 • ~es anciennes colonies italiennes de l'Afrique orientale ont retenu un instant l'intérêt des bolchéviks après la seconde guerre mondiale. Depuis lors, les commentaires se font rares et il semble que l'Érythrée et la Somalie soient considérées à Moscou, du moins pour le moment, comme zone d'influence égyptienne. Trois livres ont été consacrés au Soudan depuis 1950 30 , sans compter un certain nombre d'études plus succinctes. Rendant compte du soulèvement madhiste et de son arrière-plan économique, social et politique, Smirnov souligne que le m~uvem~nt avait ~ l' ori~ine un ~actère populatre, mats que l'anstocrane esclavagiste des tribus Baggara, en s'emparant du pouvoir, avait exacerbé la _guerre des classes. Dmitrievski donne de son côté un aperçu économico-géographique et, s'il effleure la politique, c'est selon l'optique de 1951 : le pays est avant tout une place d'armes de l'OTAN et le parti Umma est au service de l'impérialisme britannique. Pour Kisselev enfin, le mouvement de libération nationale, sous sa forme moderne, remonte au début des années 20. Malg_ré la croi~sance d'un prolétariat qui, dans certaines occasions, a pu mener le combat antiimpérialiste, la bourgeoisie a réussi à conserver sa position prépondérante 31 • La r~v~~é des diverses factions politiques est consideree comme le talon d'Achille du mouvement de libération et la bourgeoisie soudanaise est accusée d'« irrésolution et d'inconséquence» dans ses rapports avec les différentes races et religions du pays. Tout récemment, la base sociale de l'tJmma. était prétendue plus étroite que celle del' Ashiqqa, parti de la petite bourgeoisie urbaine, auquel de nombreux ouvriers accordent leur confiance. Il est en outre reproché à l'Umma d'avoir _préc~nisé l'« indépe~dance sous parrainage bntann1que » et de s'etre opposé au mot d'ordre de Nasser : « unité de la vallée du Nil ». Critiques modérées dans le ton, en comparaison 29_. Cf. par ex., Materialy po natsiona/110-kolonialny,n ~robl!4"'f!-m, n° 7, _Moscou 1935. Ce recueil ne traite que de 1 Î!thiop~e; depuis la seconde guerre mondiale aucune publicauon de cc genre n'a vu le jour. 30. S. R. Smimov : « La révolte mahdiste au Soud n » 1950 ; Y. D. ~mitrievski : « Le Soudan anglo-égyptien »: 1951 ; V. I. K1sselev : « Le Soudan en m rch v rs l'indépendance •, 1958. 31. V. I. Kisselev, op. cit., p. 179. •

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