Le Contrat Social - anno III - n. 5 - settembre 1959

280 UN BREF APERCU de l'organisation de l' enseignem~nt peut apporter quelque lumière sûr la question. La cellule mère était l'Institut d'ethnographie qui concentrait et coordonnait à Moscou et à Leningrad les recherches sur l'Afrique centrale. et méridionale. Pour ce qui est du nord du contmen!, la position n'était pas nettement définie :. l'Egypte et l'Afrique du Nord française entraient dans les études régionales publiées par !'_Institut, alors que la plupart des monograp~es sur les_ autres pays étaient parrainées par divers orgarusmes. En outre, une subdivision africaine de l'Institut des études orientales fut créée en 1956 : encore peu importante aujourd'hui, elle paraît devoir assumer dans l'avenir les tâches jusq~'ici dévolues à l'Institut d'ethnographie. Il existe enfin des sections africaines de l'Institut d'économique mondiale et des relations internationales, ainsi que de l'Institut de géographie. Les études africaines sont actuellement en pleine réorganisation. Les spécialistes, réunis en février 1958 par l'Académie des sciences, ont ~roposé la création d'une association pansoviétique des experts africains et la publication d'un périodique qui centraliserait les travaux des instituts de recherche. · Une résolution prévoit également la création d'une chaire d'études africaines à l'université de Moscou et l'ouverture dans d'autres villes de cours spéciaux sur l'histoire, l'économie et la littérature de l'Afrique. Malgré le petit nombre d'inscriptions à ces disciplines (seuls dix étudiants ont choisi les langues afric~ines l'année dernière à Leningrad, centre prmc1pal des études), les autorités font un gros effort pour y intéresser la jeunesse universitaire. En mai 1958, le ministère de l'Enseignement supérieur décidait d'inviter à Leningrad des spécialistes étrangers et d'envoyer outre-mer plusieur_s professeurs et étudiants diplômés pour y parfaire leurs connaissances linguistiques. Le swahili, l'amharique et !'haoussa sont déjà enseignés à Leningrad; le louganda, le louba et le yorouba le seront dans les trois prochaines années. Il est également prévu que l'université de Moscou formera des spécialistes. Le programme dé recherches pour 1958-1961 est plus aD?-bitieu~.Il comprend trente-cinq titres sur des suJets qui vont du Développement économique et lutte des peuples de la Nigeria contre l'asservissement impérialiste après la deuxième guerre mondiale au Peuplement et habitat chez les Bantous, en passant par un Essai sur la syntaxe swahili. Entre 1917 et 1945 quelque 110 ouvrages sur l'Afrique furent publiés en Union soviétique, contre 100 pendant les seules années 1945-1956; à vrai dire il s'agissait surtout de brochures, non de livres : on y trouvait maintes traductions de l'anglais et du français, ainsi que des études de philologie ou de géographie. Quant à l'histoire politique, seules deux ou trois œuvres originales et dignes d'intérêt virent le jour entre 1936 et 1956. BibliotecaGinoBianco - LE CONTRAT SOCIAL On doit au nouveau programme de recherches quelques études sérieuses sur une plus vaste échelle_ et il est vraisemblable que l'effort va se • pourswvre. LA LIGNE soviétique à l'égard du mouvement national en Afrique (et plus généralement en Orient) a subi un changement marqué depuis la deuxième guerre mondiale. Jusqu'en 1955, Moscou estimait ne pas pouvoir faire confiance à la bourgeoisie qui avait pris la tête du mouvement : sa lutte contre le colonialisme était présentée comme « pure comédie » et on s'attendait à la voir, tôt ou tard, trahir la cause nationale. Seuls la classe ouvrière et son avantgarde, le parti communiste, étaient capables de mener victorieusement le combat anti-impérialiste jusqu'à sa conclusion logique. Si le prolétariat urbain était numériquement faible, la bourgeoisie ne l'était pas moins et les auteurs soviétiques étaient optimistes quant à l'issue de la lutte pour la direction du mouvement : L'expérience de la lutte de libération nationale dans les pays coloniaux montre que la bourgeoisie est incapable de représenter les intérêts nationaux d'une manière conséquente, car elle incline au compromis et à la collaboration avec les impérialistes, avec une tendance à restreindre le mouvement national d'indépendance au cadre étroit de ses propres intérêts de classe. Quand les impérialistes sont disposés à faire des concessions (et ils en font invariablement, si minimes soient-elles) pour maintenir leur domination, la grande bourgeoisie cesse de jouer le « jeu de l'opposition » pour devenir le fidèle soutien des milieux dirigeants du pouvoir colonial 3. Ces observations, faites à propos de l' A.-O.F. et de l' A.-E.F. représentent bien l'attitude générale d'alors ; il n'est cependant pas inutile d'entrer dans le détail et de montrer comment la « ligne dure » du début des années 50 fut appliquée aux différentes parties du continent. On se méfiait beaucoup à Moscou des pays qui avaient acquis l'indépendance ou étaient en passe de l'acquérir. Cette indépendance, prétendaiton, ne pouvait pas être réelle ; elle était en fait une manœuvre de l'impérialisme britannique appuyé,e par la bourgeoisie indigène. Si l' Angleterre avait accordé à l'Inde, à la Birmanie, au Pakistan et à Ceylan une « indépendance de façade » dont les organisations nationalistes petitesbourgeoises se contentaient, l'économie, les finances et les forces armées n'en demeuraient pas moins entre les mains des Britanniques 4 • A travers toute l'Afrique, la classe ouvrière constituait désormais la force dirigeante dans la lutte anti-impérialiste et l'alliance des paysans et du , 3. S. Datline in « La Lutte impérialiste pour l'Afrique et le mouvement de libération des peuples », Moscou 1951, pp. 258-259. 4. I. Potekhine : « L'Ethnographie soviétique », 1950, . 2, p. 26.

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