Le Contrat Social - anno I - n. 5 - novembre 1957

326 modérés - comptant avant tout, pour maintenir la Pologne dans l'orbite soviétique, sur la cc communauté d'intérêts ,, (et en particulier sur la ligne Oder-Neisse). 5 Ceci s'accorderait avec ce qui semble être la conception de Khrouchtchev sur l'opportunité d'assurer aux relations internes du bloc oriental une base plus stable que l'impérialisme - essentiellement politique, militaire et administratif - de Staline. Il est de fait que des événe:nents récents ont amplement démontré les défectuosités organiques des solutions staliniennes à cet égard. Dans l'hypothèse d'un assouplissement au sein du cc bloc », la Pologne, de façon graduelle mais croissante, serait à même d'affirmer son indépendance intérieure aussi longtemps qu'elle éviterait de donner à Moscou des inquiétudes diplomatiques, et, par là même, des raisons d'intervention politique directe. Si la Pologne obtient, dans ces conditions délicates, le soutien économique de l'Occident (des crédits ont déjà été accordés par la France, les États-Unis et le Royaume-Uni), les incidences de l' cc aide fraternelle » russe sur sa politique intérieure ne pourraient que diminuer d'autant. Par contre, les liens d'État à État devraient être maintenus sur la base, assez étroite, du Pacte de Varsovie, afin de 5. D'après des témoignages dignes de foi, recueillis cet été à Varsovie, il semble que pendant les conversations GomulkaUlbricht, les Allemands de l'Est auraient suggéré à· Djedrychowski, directeur de la planification polonaise, l'utilisation et la gestion communes du port de Szczecin (alias Stettin). Ce sondage n'eut aucune suite, car Djedrychowski, après avoir consulté la direction suprême, se refusa à toute discussion à ce sujet, et la déclaration commune qui clôtura l'entretien réaffirma le caractère définitif des frontières actuelles. Malgré tout, l'appréhension subsiste chez les Polonais, qui estiment en effet que les gouvernants de l'Allemagne de l'Est, dont on connaît la servilité devant les Russes, n'auraient jamais osé prendre eux-mêmes cette initiative. Ces inquiétudes montrent bien de quel levier puissant disposent les Russes en Pologne, du fait de la question territoriale. BÎbliotecaGinoBianco L'EXPÉRIENCE COMMUNISTE se prémunir contre .tout risque de rupture ouverte telle qu'elle se produisit en Hongrie. La plupart des Polonais semblent sentir d'instinct qu'étant donnée l'attitude des autres partis communistes (en particulier le chinois et le yougoslave), les Soviétiques ne pourraient se permettre d'intervenir en Pologne ~ sauf en cas de révolution du type hongrois, mettant en question l'alliance russe. C'est cette conviction qui rend les Polonais beaucoup plus sûrs d'eux-mêmes aujourd'hui qu'ils ne l'étaient il y a six mois; et cela, malgré la crainte assez répandue que l'Occident ne veuille ou ne sache pas saisir l'occasion qui s'offre à long terme dans les circonstances actuelles. Les perspectives, en effet, paraissent être les suivantes : une économie relativement prospère et une autonomie politico-sociale assurée renforceraient considérablement l'influence idéologique de la Pologne sur ses voisins communistes, sa...11msême en excepter l'URSS; de plus, la démocratisation intérieure rendrait le régime plus sensible encore aux exigences de l'opinion. Étant donné le climat de révisionnisme et de retour sur soi-même qui prévaut en Pologne même parmi les communistes (leurs méditations ayant été, dans bien des cas, facilitées par de longs séjours dans les prisons de Staline) - cette orientation « libérale » pourrait continuer à s'affirmer même si la Pologne devait porter, pour bien des années encore, l'étiquette de cc démocratie populaire». Et l'on peut croire qu'une telle combinaison d'équilibre économique et de libéralisation politique serait un exemple fascinant pour les autres pays « socialistes », faisant ainsi effectivement de la Pologne le « cordon ombilical» rattachant l'Empire soviétique au reste du monde. (Traduit de l'anglais) ZBIGNIEV BRZEZINSKI ,

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