Le Contrat Social - anno I - n. 5 - novembre 1957

316 troupes soviétiques en Hongrie serait posée dans son ensemble au cours de négociations avec les autres signataires du pacte de Varsovie ; l'organe officiel du Parti, Nepszabadsag, était encore plus explicite, déclarant le 18 novembre : « L'indépendance de notre pays exige qu'il n'y ait pas de garnisons étrangères en territoire hongrois. » Chijfons de papier Les espoirs que ces déclarations avaient fait naître furent anéantis par les actes ultérieurs du régime. Dès le 29 mars 1957, un communiqué hungaro-soviétique établissait que cc les deux gouvernements considèrent comme absolument nécessaire le maintien temporaire de troupes soviétiques en Hongrie». Un accord, signé le 27 mai et concernant le statut des forces d'occu-- pation, stipulait que cc les dispositions arrêtées en commun resteront en vigueur aussi longtemps que des unités soviétiques stationneront en Hongrie», cependant qu'aucune mention n'était faite d'un délai quelconque d'évacuation. Kadar s'était déjà prononcé à ce sujet le 2 avril : « Les troupes soviétiques resteront ici aussi longtemps que leur présence sera nécessaire. » En même temps, la presse officielle se livrait à une campagne de propagande orchestrée afin de justifier l'intervention armée soviétique de novembre et le maintien des forces soviétiques d'occupation. Le communiste Geza Kas-saï, porteparole archi-stalinien du régime, écrivait dans le Nepszabadsag du 14 avril 1947 : Les événements d'octobre et de novembre derniers ont prouvé que dans certaines situations non seulement l'aide armée d'un autre État socialiste est aussi légitime que nécessaire, mais que recourir à cette aide est un devoir patriotique, de même que l'accorder est un devoir international. Quelques jours plus tard, un ex-leader démocrate passé aux communistes, Szakazits, poussait la chose encore plus socialArpad loin : Le gouvernement Kadar peut revendiquer fièrement la responsabilité d'avoir fait appel à l'aide soviétique ... L'intervention armée de l'Union soviétique passera à la postérité comme une des phases les plus lumineuses de l'histoire du monde. r Non- moins criante"'îut la~carence du régime de Kadar à remplir ses engagements du 4 novembre qui promettaient un gouvernement de coalition comprenant les chefs des partis non communistes, ainsi que ceux qui découlaient de la déclaration de Kadar le 15 novembre, préconisant non seulement un système multipartite, mais des élections · « libres et honnêtes ». Le 26 avril 1957, cinq mois après la révolution, le Nepszabadsag cherchait à sauver la face par une argumentation assez embarrassée. Il justifiait la persistance du monopole communiste en matière BibliotecaGinoBianco L'EXPÉRIENCE COMMUNISTE politique après cinq mois écoulés, en expliquant rétrospectivement qu'au moment où les promesses initiales avaient été faites les partenaires possibles des communistes dans un gouvernement de coalition s'étaient montrés mal disposés à collaborer sur la base du programme présenté par Kadar. Le journal ajoutait: Ce n'est pas d'une coalition pour l'amour de' la coalition que nous avons besoin, mais d'une coalition pour le bien du socialisme. La réapparition d'autres partis n'était pas désirable ; elle eût procuré aux forces antisocialistes le camouflage de la légalité. Le régime s'en est donc tenu au stratagème pré-révolutionnaire du cc Front populaire» sous le contrôle et la direction exclusive du Parti, ajoutant qu' cc un système multipartite comme en Chine ou en Pologne » est inadmissible en l'occurrence, compte tenu des cc conditions spéciales» qui existent en Hongrie. De plus, au lieu de permettre des << élections libres», le gouvernement s'est abstenu au contraire de toute application du suffrage populaire : lorsque le mandat du parlement sortant expira en mai dernier, une simple décision administrative prorogea de deux ans la législature, au mépris des dispositions constitutionnelles. , En dépit des assurances prodiguées depuis la disgrâce de Rakosi, la restauration intégrale - du stalinisme tend à s'affirmer dans tous les domaines. L'étude obligatoire du russe et celle du marxismeléninisme ont été réintroduites dans les écoles. Les cc conseils ouvriers » - qui s'étaient formés à divers échelons pendant la révolution et avaient été formellement reconnus par le régime Kadar encore à ses débuts - ont fait l'objet d'une politique sournoise d'émiettement et de neutralisation. * Ce que sont devenus les Conseils ouvriers L'histoire de l'émiettement du « système des conseils » est significative. On commença par abolir les conseils centraux et régionaux ; puis on réduisit l'autorité des conseils locaux et d'entreprise jusqu'à _en faire des organes purement consultatifs·. -Enfin ' on estime à environ trois cents le nombre des membres des conseils ouvriers qui ont été jetés en prison ou déportés dans les camps de concentration. Dès juin 1957, un certain nombre de porte-parole du Parti firent état d'une opinion, lourde de menace, selon laquelle la légalité des conseils était << discutable » puisqu'ils avaient fait leur apparition comme produit de la cc contre-révolution » anti~ communiste. cc Par esprit de conciliation », toutefois, le régime , avait continué à tolérer leur existence, la position officielle du Parti - énoncée à la Conférence nationale du 27 au 29 juin - étant que les fonctions des conseils ne peuvent être * Le 1er octobre, la presse annonçait leur remplacement définitif par des « conseils d'usine » (que dirigent exclusivement les syndicats contrôlés oar l'État, c'est-à-dire le Parti). •

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