Le Contrat Social - anno XII - n. 1 - gen.-mar. 1968

24 ...,onpays en Russie depuis janvier 1912. Nommé vice-consul de Grande-Bretagne à Moscou, il s'était livré à une intense recherche de renseignements, tant sur la Russie que sur l'Allemagne. Son agent principal, Michel Likiardopoulo, dit Liki, comédien au théâtre des Arts de Moscou, lui avait procuré nombre de contacts utiles dans 1es milieux les plus divers. Camouflé en négociant grec en tabac, .Liki avait ·entrepris, pour le compte de, Lockhart,J plusieurs voyages en Allemagne. Les informations recueillies et les rapports documentés sur les divers aspects de la situation en Russie étaient hautement appréciés à Londres. En 1 1915, malgré sa jeunesse, Lockhart fuf nommé. consul général de Grande-Bretagne à Moscou, à titre temporaire toutefois (pour la durée de la guerre). Dès la création d'un service de propagande à l'ambassade britannique de Pétrogra4, Lockhart prit en outre la direction du bureau mosèovite de ce service. Au début de l'automne de 1917, il. fut convoqué à Londres et présenté au premier ministre Lloyd George, qu~ lui dit : «. C'est vous, monsieur Lockhart ? Vos rapports font preuve· d'une telle maturité_ d'esprit q~e je m'attendais à recevoir un homme à bàrbe blanche ... 5 » Renvoyé en Russie en janvier 1918· à la t~te d'une mission spéciale chargée de contacts officieux a~ec les autorités bolchévistes, en vue de les inciter à continuer la guerre, Lockhart commença par obtenir de Trotski luimême un laissez-passer qui lui assurait une entière liberté de mouvement et la possibilité de visiter les régions interdites .aux étrangers. Pour étudier la· situation en Sibérie, Lockhart, en accord avec ses collègues américain et français~ y envoie un groµpe d'enquêteurs, parmi lesquels !'Anglais Hiks et !'Américain Webster. Trotski _leur· délivre des lettres de recommandation pour les soviets locaux, prescrivant de prêter aide et assistance aux intéressés et de nè gênèr en rien leurs dépla~ements 6 • · . Mais cette collaboration amicale avec les bolchéviks, née du refus par· ceux-ci. des conditions allemandes .~t de la rupture, le 10 (2.3) février 1918, des ;pourparlers de paix à Brest-Litovsk, ne pouvait être que fort éphé- , •mere. -Le 18- février (ancien style), ·les. Allemands reprirent leur avance sur l'ensemble du front. Ils occupèrent les régions baltes, une grande ·partie de la Russie Blanche, pénétrèrent en Ukraine et menaçèrent Pétrograd. Le .3 mat.:, 5. L'Etat soviétique ... , op. cit. 6. Ibid. -BibliotecaGino Bianco LE CONTRAT SOCIAL la paix fut signée. Le gouvernement soviétique, installé depuis le 10 mars à Moscou, ratifia le traité de Brest-Litovsk le 15 mars 1918. ])ès lors, il ne pouvait plus être question pour les Alliés d'une collaboration quelconque avec les bolchéviks. La situation de ces derniers semblait, d'ailleurs, des plus précah-es : Les contingents anglais, américains et français, aidé~ ·par le~ .antdbolchéviks- ~usses, occugèrent, en mars ·1918; Moûtmansk, puis Kem et ·Onéga. En août, ils prirent Arkhangelsk, où s'installa un gouvernement de la Russie du Nord 1 • . Pour les Alliés, il s'agissait en premier lieu d'empêcher la mainmise des Allemands sur les énormes stocks de matériel de guerre importés par eux pour l'armée tsariste dans cette région. Les Japonais débarquèrent à Vladivostok en avril 1918. Ils furent suivis, puis évincés, par des contingents américain, anglais, français et italien. ., . · · · ~ Le corps tchécoslovaque, fornié. en E.us~ie en 1916-17 de pris9nniers slaves· àutrichierls, s'était rebellé le 25 mai 1918 contre· le pouvoir soviétique qui voulait le désarmer. Forte de 40.000 à 50.000 hommes~ y compris beaucoup d'antibolchéviks russes camouflés, cette armée fut autorisée par Moscou ·à transiter par la Sibérie vers !'Extrême-Orient afin d'être rapatriée de là en Europe occidentale. Or, au lieu de se dir~ger pacifiquement vers leur port d'embarquement, Vladivostok, 1es Tchécoslovaques s'étaient emparés, entre mai ~t août 1918, de Samara, Kazan, Simbirsk, Ekaterinbourg, Tchéliabinsk et autt;es points importants _le long du Transsibérien. Un immense territoire, avec de riches régions industrielles et agricoles, tomba ainsi aux mains des ennemis du bolchévisme, lesquels_y rétablirent une régime « bourgeois ». Des gouvernements anticommunistes surgirent à Samara, Omsk, Ekaterinbourg, etc. Les généraux Kornilov, Dénikine et Alexéïev organisèrent, au printemps et en été de 1918, au Caucase du Nord, une armée blanche de volontaires qui entra en campagne cqntre le . . , . pouvotr sov1et1que. Durant l'été de 1918, les trois quarts du pays étaient aux mains des contingents étrangers ou des gardes-blancs. L'Ukraine, le Caucase, l'Ou• ral, la Sibérie, !'Extrême-Orient étaient occupés, et 1; Asie centrale coupée de Moscou. Lë1 République soviétique était prise dans un cercle de fer, coupée des principales sources de ravitaillement et de matières premières. On manquait de tout : pain, armes, v~tements. 7. G.E.S., 28 éd., t. 50, pp. 212-14.

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