Le Contrat Social - anno XI - n. 2 - mar.-apr. 1967

L 'Expérience communiste . LIN PIAO ET LES « GARDES ROUGES» par Karl A. Wittfogel IL N'ÉTAIT PAS NÉCESSAIRE d'être un Occidental pour s'interroger sur les secousses qui ébranlent la Chine communiste. Les « gardes rouges » ont envahi grand nombre de villes, rebaptisant rues, magasins, maisons privées, écoles et collèges, de noms inspirés par la « révolution culturelle prolétarienne » et organisant des manifestations gigantesques dont la plus· spectaculaire se déroula à Pékin. Y assistèrent des dizaines de dignitaires haut placés, sous la présidence de Mao Tsé-toung qui sourit débonnairement, mais resta silencieux, et du ministre de la Défense, Lin Piao, qui parla « au nom du président Mao et du Comité central du parti communiste ». Des comptes rendus de ces manifestations monstres ont paru dans toute la Chine ainsi que dans_la presse étrangère. Elles ont suscité un grand nombre de questions et maintes explications relatives à la signification de cette « révolution » pour la situation inté- .rieure de la Chine rouge ainsi que pour ses relations avec les pays étrangers. Trois faits sont faciles à établir : 1. Les manifestations qui ont reçu tant de publicité n'ont pas marqué le début de la « révolution culturelle » et les « gardes rouges » n'ont faJt leur apparition que dans une phase tardive de ce nouveau « soulèvement » ; 2. L'ascension de Lin Piao a commencé il y a plusieurs années, mais s'est considérablement accélérée durant la révolution culturelle; 3. Ces événements se sont déroulés sous un régime autocratique et il est nécessaire, lorsqu'il s'agit d'un régime de ce genre, de comprendre le rôle de l'autocrate. Mao Tsé-toung est à la . . ·Biblioteca Gino Bianco .., tête du parti communiste depuis 193 5. Depuis 1949, il est le chef suprême du continent chinois. Et c'est dans le bureau de Mao que ·convergent encore tous les leviers de commande, que ce soit lui ou quelqu'un d'autre qui - les manipule. La carrière de Lin Piao, la révolution culturelle et les gardes rouges, tout doit être examiné sous cet angle. La santé de Mao . KHROUCHTCHEV DÉCLARA en 1960 que Mao était « un fou ». Il est vrai que les. faits suggèrent qu'à cette époque (voire un peu· plus tôt) certaine tendance irrationnelle apparaissait dans sa conduite. Les faits suggèrent également - que l'aggravation récente de cette tendance - ,coïncide, est peut-être même liée à la -détério- .ration de sa condition physique. Depuis quelques années, Mao est en mauvaise santé et sa compétence politique s'en est trouvée· affectée. Au cours des années 50, il parlait encore en public, mais il était rare que ce fût longuement. Au VIIIe Congrès du Parti (septembre 1956), ce fut Liou Chao-chi, alors héritier présomptif, selon. t~utes les apparences, qui fit l'intervention la plus impor-. tante. Si, par la suite, Mao a bien prononcé quelques longs discours à huis clos, lorsqu'il - s'agissait de prendre la parole en public cela revenait a un petit nombre de ses familiers, tels Liou Chao-chi, Chou En-lai et Teng Siao- - ping. C'est en septembre 1965 que Lin Piao fit pour la première fois un discours de ce genre. Mao estimait-il qu'il était indigne de lui de remplir une tâche que . Lénine et Staline

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