G. ARONSON t~ent de la défendre furent les raisons qui poussèrent à tenir une conférence des délégués d'usine, laquelle eut pour elle la sympathie active du prolétariat de Pétrograd. Le 18 janvier 1918 se tint la première assemblée, présentée dans la presse comme « Conférence ouvrière du syndicat de défense de l'Assemblée constituante » et qui marqua l'ouverture des conférences de délégués d'usine. Ce mouvement ne découlait pas seulement de l'état d'esprit des masses « sans-parti » où il trouvait son principal appui, mais aussi de l'initiative des militants, du parti socialdémocrate surtout, qui, dès la révolution d'Octobre, manifestèrent une opposition irréductible aux « accapareurs du pouvoir ». Au congrès de novembre (1917) du P.O.S.D.R. (parti ouvrier social-démocrate de Russie), « internationalistes » et « centristes » formèrent un bloc symbolisé par les noms de Martov et de Dan. Se tenant strictement sur le plan de la _démocratieet luttant contre la terreur, le bloc tenta néanmoins de trouver un terrain d'entente avec les bolchéviks ; il entra en pourparlers avec eux (par l'intermédiaire du syndicat des cheminots), ayant pour objectif la formation d'un gouvernement socialiste homogène. Un certain nombre de militants en vue du parti social-démocrate, ceux surtout qui dirigeaient l'action ouvrière dans les soviets et les syndicats, refusèrent d'adhérer à ce bloc et, démissionnaires du C.C. avant le congrès, ne le réintégrèrent pas au cours de celui-ci. Ce groupe de « droitiers » socialdémocrates, ne trouvant plus à employer ses forces dans le Parti, se mit à organiser par ses propres moyens les ouvriers· antibolchévistes. C'est ce groupe, où l'on trouvait des militants tels que B. Bogdanov, B. Batourski, H. Koutchine, K. Ermolaïev, A. Dubois, S. Zaretskaïa, A. Troïanovski, A. Krasnianskaïa, _qui lanca, à Pétrograd, l'idée de réunir une conférence de délégués d'usine. D'éminents représentants ouvriers de Pétrograd tels que A. Smirnov, F. Ioudine, K. Gvozdiev, M. Kefal-Kamermakher, Golikov, Borissenko, etc., répandirent l'idée dans les masses. C'est au nom de ce groupe que H. Koutchine fit un rapport à la conférence du 18 janvier des délégués d'usine. De Pétrograd, le mouvement gagna rapidement Moscou, puis s'étendit à la province. L'attitude du comité central du parti ouvrier social-démocrate de Russie passé aux mains des internationalistes n'est pas aisée à définir. A Pétrograd (et plus tard à Moscou); la discussion à l'intérieur du parti roula sur la question suivante : réélection des soviets ou Biblioteca Gino Bianco 203 formation de comités permanents de délégués d'usine. Les internationalistes du C.C. et du comité de Pétrograd étaient pour le· maintien des soviets, tandis que les droitiers s'élevaient qusque dans la presse) contre toute participation à la réélection des soviets, faisant valoir qu~ cela é~u!vaudrait à coopérer avec le pouvo1~ bolchey1ste. D'autre part, les internationalistes craignaient que le parti social-démo- ~rat; n'ait à en pâtir, qu'il ne perde son 1ndependance et sa position de principe en se diluant dans la masse amorphe des « sansparti », où· les initiateurs des comités permanents de délégués propageaient leur mot d'ordre. Remarquons que jusqu'à mars-avril 1918, les dirigeants du parti restaient dans l'expectative et que Martov et Dan se tenaient à distance du mouvement. Mais l'essor pris par celui-ci, l'aggravation de la situation dans le pays et la croissance de l'antagonisme entre la politique bolchéviste et les aspirations de la population les amenèrent à abandonner leur attitude négative. En avril, l'idée des comités permanents de délégués d'usine l'emporta au C.C. et la vieille idée d'Axelrod de faire appel à un congrès ouvrier pour concrétiser l'opinion de la classe ouvrière et rétablir son unité retrouva un accueil favorable chez les dirigeants menchévistes. Quant aux s.-r., en dépit de leurs faibles att~ches avec la classe ouvrière, ils appuyèrent activement le mouvement des délégués d'usine. Parmi les ouvriers s.-r., Berg et quelques autres, de concert avec des ouvriers social-démocrates, prirent la tête du mouvement. A la conférence de Pétrograd, V. Tchernov fit un rapport sur ce dernier. En mai l'organisation social-démocrate de Mosco~ adopta une attitude favorable envers les comités de délégués. Entre-temps, le comité central menchéviste s'était transporté à Moscou. Le 16 mai, le comité de Moscou du P.O.S.D.R., dans une résolution reconnaissait la nécessité de « convoquer à bref délai une g~an_de conférence ouvrière de délégués d usine ». Le mouvement, parvenu à maturité, ayant permis de convoquer une conférence panrusse de délégués d'usine (les !ll~mbres de la conférence furent arrêtés le 23 Juillet par la Tchéka), R. Abramovitch l'un des dirigeants de la tendance internatio~aliste y prit la parole en qualité de délégué d~ comité central du P.O.S.D.R. Ainsi l'idée des comités permanents de délégués d'usine avait fini par faire l'unanimité de toutes les tendances opposées au bolchévisme. Dans une large mesure, ce résultat s'explique par la I r
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