Le Contrat Social - anno X - n. 4 - lug.-ago. 1966

248 syndicalisme libre, aujourd'hui clandestin, prend nécessairement un aspect politique et ·révolutionnaire. Les statistiques démographiques reflètent la mutation de la société espagnole. De 1960 · à 1964, les changements d'activité . sont importants. Le secteur primaire (agricole) diminue de 41 3 % à 34,6 % ; le secteur secondaire (indus~riel) augmente de 31,4 % à 35 %. Si les transports et les services varient peu, le commerce passe de 7,8 % à 11,1 % . Il s'agit donc d'une évolution qui apparente l'Espagne de 1960 aux nations industrielles de la première moitié du XXe siècle. Si l'importance du tourisme, en favorisant le commerce et les services, fausse un peu les comparaisons, on peut néanmoins affirmer que l'Espagne peut devenir rapidement une nation industrielle à condition que se maintiennent les rythmes actuels des mutations sociales. Cependant les campagnes. présentent à peu de chose près le même tableau qu'au siècle dernier : insuffisance de l'irrigation, absence de moyens mécaniques, extrême parcellisation, enfin mauvaise répartition des propriétés où coexistent d'immenses latifundia et une multitude de minifundia. La contradiction s'accentue entre la· croissance des villes industrielles et la permanence des campagnes, ~rchaïques : il n'est pas douteux qu'en cela res1de toute la gravité du problème social. ·--L'Espagne est grosse d'une révolution politique à laquelle la plupart des classes sociales se sentent intéressées ; et cette révolution à venir est la conséquence de l'essor économique et de l'ouverture au monde extérieur. Marx y verrait la vérification d'une de ses thèses : le Biblioteca Gino Bianco -•, LE·, CONTRAT ·soCJAL développement .des forces productives modifie · les rapports de production et fait craquer. les vieilles superstructures politiques, fondées .sur l'immobilité sociale et la stagnation économique. -Il n'est évidemment pas .question de revenir à. l'étatisme stérilisant que le pays a connu après la victoire de Franco. Il .s'agit de créer une· démocratie moderne .permettant à la population de bénéficier des, progrès . éc?nomiques amorcés sous la poussee du capitalisme libéral ; il s'agit d'intégrer . l'Espagne_ au Marché commun, d'industrialiser des campagnes actuellement misérables. Cela demande, en marge de la révolution politique, d'énormes investissements que l'Espagne seule n'est pas à même de fournir. Un lent processus de libéralisation s'opère sous nos yeux : la censure gouvernementale fait place à une .autocensure, .w;t projet vise à autoriser la grève pour raisons économiques, et, au moment où nous écrivons, on parle d'un nouveau régime parlementaire. « _Lasuccession est ouverte », comme dit l'auteur du livre. ~n faveur de Don Juan ou de son fils, p~nsent les uns ; d'une République, espèrent les autres. Sans parler des revendications nationales de minorités, basques ou catalanes, hostiles. à la vieille Espagne centralisée de. la monarchie et de la République de 1931... En attendant un proche avenir, nous assistons au pourrissement du régime franquiste, de sa police et de ses institutions, entraves au développement économique comme aux aspirations à la libe~té.. De ces aspirations, la jeune génération, prenant le relais de l'ancienne émigration politiqué, se ·fait chaque jour davantage le--c:hampion intransigeant. MICHEL COLLINET. , 0

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