Le Contrat Social - anno X - n. 4 - lug.-ago. 1966

B. KERBLAY sont passés de 30,7 millions à 27,3 millions, soit un accroissement de la productivité de 55 % en treize ans. Ce sont, à mon avis, les deux changements essentiels. Si nous examinons de plus près l'évolution, nous pouvons distinguer une première période qui va de 1954 à 1958, pendant laquelle les progrès ont été relativement rapides ; vient ensuite une période de stagnation, de 1959 à 1962 ; enfin une année de crise : 1963. Brejnev, dans son rapport de mars 1965 au plénum du Comité central, indique que, dans les années 1955-59, la production s'est accrue de 7,6 % par an, tandis que de 1959 à 1964 elle n'a prog~essé. que de 1,9 %. Quels ont été les facteurs de cette croissance assez remarquable de 7 % par an dans la première période? Tout d'abord, on est parti d'un niveau extrêmement bas (il faudrait relire le rapport de Khrouchtchev au plénum de septembre 1953, qui montre que l'élevage était alors en crise) ; il y avait donc des réserves d'accroissement de la productivité que l'on pouvait assez facilement mobiliser, à condition de prévoir les stimulants indispensables. Ceux-ci ont joué sous deux formes : l'une qui a favorisé le secteur privé, par la réduction des impôts et celle des livraisons obligatoires, l'autre, les finances des kolkhozes, par le relèvement des prix agricoles. Pour beaucoup d'observateurs occidentaux, le stimulant des prix a été le facteur essentiel de l'accroissement rapide de la production 2 • Une autre cause de la croissance rapide de l'agriculture, de 1954 à 1958, a été la politique d'extension des surfaces, la mise en culture de terres vierges : la surface emblavée s'est accrue de 23 % , soit de 25 millions d'hectares, ce qui représente un effort exceptionnel. A titre de comparaison, le Tsélinny Kraï, une des provinces du Kazakhstan, a une surface emblavée qui est à peu près identique à celle de la France ; mais dans cette région on a mis en cu!ture 22 millions d'hec2. Quand on parle du niveau très bas de la production agricole, et surtout de l'élevage, en 1952-53 par rapport à 1927-28, il faut aussi tenir compte d'un certain nombre de changements réalisés depuis la collectivisation. Lorsque Malenkov et Khrouchtchev ont succédé à Staline, ils ont trouvé une agriculture très différente de celle que Staline avait reçu en charge après la mort de Lénine. Tout d'abord, au lieu de compter 25 millions de petites exploitations paysannes, la culture céréalière est concentrée en quelque 50.000 grosses exploitations mécanisées. D'autre part, 11 y a eu un accroi11ement très sensible de la commercialisation dei produit• agricoles - obJectU principal de la collectivllation, - puisque la commerciallaation des céréales est pa1He de 16 % de la production brute en 1928 à 44 % en 1953. Biblioteca Gino B~anco 213 tares avec seulement 800 entreprises agricoles et 3,4 millions d'habitants, alors que nous avons en France environ 2 millions d'exploitations agricoles pour une superficie comparable. On a pu, grâce à cette extension des emblavures dans les terres vierges, centrer l'attention dans les régions traditionnelles sur l'accroissement des fourrages pour améliorer l'élevage, qui était le point faible en 1952-53. Les superficies cultivées en maïs ont été portées de 3 millions et demi à 30 millions d'hectares. En résumé, deux facteurs essentiels dans cette croissance : les stimulants qu'ont constitué la révision des prix agricoles et les encouragements au secteur privé ; la politique d'extension des superficies. Voici quelques chiffres pour fixer les idées : le prix moyeP. des céréales payé par l'Etat en 1957 a doublé par rapport à 1952 ; quant à la valeur de la rémunération du travail agricole, elle est passée de 12,4 milliards de roubles en 19 5 2 à 47,2 milliards de roubles en 1957. Donc, améliora- , tion sensible de la rémunération du travail ' grâce à la revalorisation des prix. Après cette période de progrès, on enregistre des années de stagnation : de 19 59 à 1964, la production n'augmente que de 1,9 % environ par an ; elle ne s'est accrue que de 10 % en six ans au lieu des 70 % prévus. C'est là un rythme tout à fait insuffisant étant donné que la croissance de la population urbaine en Union soviétique est de l'ordre de 3 % par an ; par conséquent, l'accroissement de la production agricole de 19 59 à 1964 a été inférieur à la demande du secteur non agricole. Il n'est pas étonnant que, dans une telle période, des conditions météorologiques défavorables aient produit en 1963 une situation de crise. La production de céréales n'a atteint cette année-là que 10 7 millions de tonnes (ce chiffre n'a été publié qu'au mois de février 1965) contre 140 millions de tonnes en 1962, alors que Khrouchtchev fixait à 162 millions de tonnes la récolte qui serait nécessaire pour satisfaire complètement les besoins. L'un des signes de cette crise a été tout d'abord le rationnement du pain rétabli dans les grandes villes, et ce rationnement n'a été rendu possible que parce que l'U .R.S.S. a importé environ 12 millions de tonnes de céréales des pays occidentaux (c'est la plus forte importation de céréales de toute l'histoire soviétique ; même dans les années de guerre, le niveau des livraisons des Alliés n'a jamais atteint le volume des importations des années 1963-64). Un autre signe de la crise a

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