Le Contrat Social - anno IX - n. 4 - lug.-ago. 1965

QUELQUES LIVRES poursuive son étude jusqu, à nos jours ; il trouverait une matière abondante dans les récentes polémiques (biologie, économie) qui ont agité le monde scientifique en U.R.S.S. E. MANINT. A propos d'Henri de Man et de Léon Blum UNE ERREUR TYPOGRAPHIQUE nous a fait avancer d'une année, dans le compte rendu de L'Œuvre de Léon Blum, 1934-1937, paru ici même (mai-juin 1965, pp. 202-205), la date des articles que le leader de la S.F.I.O. consacra au « Plan du travail » du Parti ouvrier belge. Le Populaire les publia, non en janvier 1933, mais en 1934. L'erreur est patente, mais Henri de Man est tombé - fort injustement - dans un tel oubli que le lecteur· n'aura peut-être pas rectifié de lui-même. En janvier 1933, de Man se trouvait encore en Allemagne, à Francfort, où, depuis 1929, il enseignait à l'université la psychologie sociale. C'est de ce mois et de cette ville qu'est datée la préface de l'édition allemande (édition originale) de L'Idée· socialiste. L'ouvrage parut le 7 mars 1933, deux jours après les élections qui consacrèrent la défaite finale de la social-démocratie et du K.P .D. (parti communiste allemand). En manière de défi, de Man avait écrit dap.s cette préface : « Celui qui m'obligerait à choisir entre les étiquettes marxiste et non marxiste, en donnant au mot marxiste le sens que lui donnent les adversaires du 1nouvement ouvrier socialiste, recevrait de moi une réponse qui exclut toute équivoque : que, sans hésiter, il me range parmi les marxistes les plus décidés *. » En conséquence, les exemplaires de L'Idée socialiste furent brûlés par les étudiants, sur la place de l'Hôtel-de-Ville de Francfort, le Romerberg, le 10 mai 1933. Le dernier chapitre de l'ouvrage, intitulé : « La réalisation du socialisme », était un exposé • L'Idée aocia/iste fut publiée en français en 1935, aux Éditions Bernard Orauet, dans la collection « les Ecrits» que dirigeait Jean Ouebenno. En annexe fiauraient les Thise11 de Pontigny, pr~sentées par H. de Man à la réunion internationale pour l'~tude des plans aocialiates d'économie diriaée, tenue à l'abbaye de Pontigny les 14, 15 et 16 septembre 1934, et la r~solution adoptée par le P.0.8. à son conpk de Nœl 1933. Cette résolution comportait l'énoncé du Plan du travail. L'ltUe •oclall1te avait été traduite de l'allemand pa1 H. Corbin et A. Kojevnikov. Leur traduction a 6té critiquée. Oc Man lui-meme en ttait peu satisfait, et il déclarait à Frédéric Lefèvre que cela l'avait cMdd6 à ne pluaécrirequ'en français (/t's NoUl't'/les littlralrt':r, 11 mai 1935). Biblioteca Gino Bianco 261 du « planis1ne ». L'auteur en avait fait approuver les idées principales quelques mois plus têlt par la section de Hambourg du parti socialdémocrate, et celle-ci avait réussi à faire inscrire à l'ordre du jour du prochain congrès du paru l'étude d'un nouveau programme. Bien qu'il se plaçât « au-delà du marxisme », de Man partageait le sentiment des marxistes pour qui les socialistes allemands étaient nécessairement les chets de file du mouvement socialiste, les gardiens de la doctrine et ses interprètes légitimes, ceux donc qu'il fallait convaincre en premier si l'on voulait faire triompher une nouvelle version de la vieille promesse. La social-démocratie précipitée au néant, Henri de Man se tourna vers le P.O.B. Il y fit un peu figure de revenant. Onze ans plus tôt, les dirigeants du parti n'avaient pas été fâchés de voir s'éloigner, sans trop d'éclat, un homme qui se montrait aussi peu soucieux de conformisme doctrinal et dont la valeur personnelle faisait un concurrent dangereux. En 1933, le désarroi des esprits était tel qu'on l'accueillit, avec ses idées, non comme un sauveur (Vandervelde n'a jamais cru beaucoup au planisme et De Brouckère en fut toujours l'adversaire déclaré), mais comme un bonimenteur dont la formule originale réveillerait l'intérêt, ferait prendre patience aux militants et aux masses, permettrait de sortir sans trop de dommage d'une période difficile. De Man prétendait rénover la pensée du parti : on attendait de lui qu'il en renouvelât la propagande. Confiant dans ses propres forces, 1nisant sur le délabrement intellectuel du P.O.B. (et de 1'en~emble du mouvement socialiste), il accepta l'offrè qu'on lui faisait, bien qu'il sût qu'elle était pour une part un piège. Quand se tint le congrès du P.O.B. (Noël 1933), il réussit à faire adopter,· dans l'enthousiasn1e, beaucoup plus qu'un programme d'action pour manifeste électoral : le « Plan du travail », le premier de_tous les « plans » qui ont fleuri depuis. La décision du congrès socialiste belge posait à Léon Blum un problème particulièrement difficile. Il ]ui était impossible de rejeter tout à fait des idées auxquelles venait de donner une adhésion spectaculaire ]a section de l'Internationale dont les socialistes français étaient le plus proches. Or ces idées étaient à la fois très différentes des conceptions qu'il défendait depuis quinze ans et très voisines de celles qu'il avait condamnées quelques mois plus tôt chez les « néosocialistes », lesquels ne pouvaient manquer de tirer profit du renfort que le P.O.B. leur apportait ainsi.

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