revue ltistorÎIJUeet critique JeJ faitJ et Jes iJée1 Juillet-Août 1965 Vol. IX, N° 4 VINGT ANS APRÈS par B. Souvarine VINGT ANS ont passé depuis la fondation des Nations Unies et les accords de Potsdam qui, dans l'esprit des leaders occidentaux de la coalition victorieuse à l'issue de la deuxième guerre mondiale, devaient assurer à l'Europe et au monde une paix et un ordre durables. En réalité Truman et Churchill, continuant plus ou moins la politique aberrante de Roosevelt et spéculant sur une coopération communiste illusoire, avaient concédé à Staline des avantages injustifiables qui confirmèrent l'ex-partenaire d'Hitler dans ses intentions de passer outre aux engagements conclus et d'agir à sa guise au mépris de la parole donnée. Toute l'histoire consécutive aux conférences de San Francisco.et de Potsdam consiste essentiellement en violations systématiques de tous les traités signés par Staline et consorts 1 • En sorte qu'aux Etats-Unis finit par prévaloir l'idée d'avoir « gagné la guerre et perdu la paix », formule séduisante et trompeuse puisqu'en bonne logique gagner une guerre implique d'imposer une paix conforme aux intérêts de ceux qui la 1. Accords, Pactes et Traités violés par !'U.R.S.S. (Faits et références). B.E.I.P.I. Supplément du n° 59, Paris, 1 c-r janvjer 1952. United Nations World, n° 11, novembre 1950. Background Information on the Soviet Union in International Relations. Washington 1950. Russia's Violations of its Agreements with the United States, by Reprcsentative Louis B. Heller. From the CongressionalRecord, June 7, 19.51. Soviet Political Treatiesand Violations. United States GovernmentPrintingOffice. Washington19.5.5. Soviet Political Agreements and Results. United States GovcrnmentPrintingOffice. Washington19.56. Biblioteca Gino Bianco gagnent. En fait une troisième guerre mondiale dont l'issue est imprévisible a co1nmencé, sous des aspects changeants et des formes inédites, peu après Potsdam et, chaude ou froide, bat son plein à l'heure actuelle. L'esprit routinier se refuse à interpréter exactement ces aspects changeants et ces formes inédites que la fixité du vocabulaire ne permet pas de définir en termes adéquats. On appela « guerre des nerfs » le genre d'hostilités que menait Hitler contre des ennemis imaginaires avant de déchaîner ses offensives en rase campagne, puis « drôle de guerre » la période écoulée entre les déclarations de guerre et les inva~ns proprement dites. Il fallut alors inventer la « non-belligérance » de certains pays pour la différencier de la neutralité correctement comprise, voire la « non-belligérance active » signifiant une solidarité inavouable avec « l'Axe » (autre expression de circonstance) et préparant la belligérance tout court pourvu que les événements s'y prêtassent. Ce que l'on entendit ensuite en Occident par « guerre froide », synonyme de « guerre des nerfs », Staline le qualifia de « coexistence pacifique », mais il s'agissait toujours d'hostilités inlassables exercées par des Etats contre d'autres qui s'avèrent impuissants à y faire face, quitte à s'armer en prévision d'une guerre atomique jusqu'à présent exclue des perspectives raisonnables. Ces hostilités, d'abord conduite par le seul Etat dit soviétique, puis par plusieurs Etats participant de gré ou de force à la même entreprise, sont précisément une troisième guerre plus « mondiale » que les deux précédentes, sous les aspects chan-
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