Le Contrat Social - anno VI - n. 5 - set.-ott. 1962

284 qui est responsable de sa mort. Plus nous étudions les matériaux se rapportant à la mort de Kirov, plus nous voyons surgir de questions», dit Khrouchtchev au XXll 8 Congrès. Aujourd'hui, il ne parle plus d' « accident » d'automobile, mais déclare ouvertement que le tchékiste qui, le 2 décembre.,se rendait en voiture à l'interrogatoire« fut tué par les hommes qui l'accompagnaient », et que, par la suite., ceux-ci furent aussi fusillés. « Visiblement., ce ne fut pas là un effet du hasard., mais un crime prémédité. Qui a pu le commettre 2 ? A l'heure actuelle., les circonstances qui entourent cette affaire complexe sont soigneusement étudiées.» A son tour, Serdiouk verse du sel sur la plaie : «Le jour même de l'assassinat [de Kirov], suivant les · instructions transmises de Léningrad · par Staline, une loi fut adoptée pour activer., simplifier et instruire les procès politiques. On aurait dit qu'on attendait ce prétexte pour mettre en œuvre., après avoir induit le Parti en erreur.,des méthodes antiléninistes, antiparti, afin de garder la haute main sur le Parti et l'Etat. » Et tout ce «travail pour tirer au clair cette affaire n'est pas encore terminé», et «cela et beaucoup d'autres choses devront être étudiées avec le plus grand soin »... L'heure n'est-elle pas venue «de dire honnêtement et sincèrement toute la vérité au peuple », tout au moins sur le meurtre de Kirov ? 6. Les choses ne vont pas mieux et peut-être sont-elles pires encore au sujet de Toukhatchevski, Iakir, Ouborévitch et autres. Depuis longtemps il est reconnu que toutes les accusations portées contre eux et contre un grand nombre d'officiers de l'Armée rouge qui, après Toukhatchevski, ont péri dans le gouffre du « iéjovisme », étaient dénuées de tout fondement. Cette réhabilitation des chefs militaires est due vraisemblablement à la pression morale de l'armée. Khrouchtchev, dans son discours de clôture au XXIIe Congrès, a parlé de cette affaire pour la condamner en termes sévères - et faire le plus vif éloge de Toukhatchevski. A ce propos, on a pu lire. dans ce discours les invraisemblables lignes suivantes : 2. Pour aider Khrouchtchev à sortir de sa perplexité, on pourrait lui conseiller de lire l'article de B. Nicolaievski : Staline et l'assassinat de Kirov, paru dans les numéros de mai, octobre et décembre 1956 du Courriersocialiste russe. Bibl.ioteca .Gino Bianco L'EXPÉRIENCE COMMUNISTE Une information passablement curieuse parut un jour dans la presse étrangère où il était dit que Hitler, préparant· son attaque contre notre pays, avait lancé, par l'entremise de son service de renseignements, un document fabriqué suivant lequel Iakir, Toukhatchevski èt d'autres étaient des agents de l'État-Major allemand. Ce « document » prétendument secret tomba aux mains du président tchécoslovaque Benès qui, croyant bien faire, l'envoya à Staline. Iakir, Toukhatchevski et d'autres camarades furent arrêtés et exécutés. Que signifie : « Une information passablement curieuse parut un jour dans la presse étrangère» ? Khrouchtchev a accès à toutes les sources et il doit savoir si cette information est vraie ou fausse. Si elle est fausse.,pourquoi en faire état ? Si elle est vraie, pourquoi la présenter comme si elle n'était qu'un bruit «curieux» qui a couru dans la « presse étrangère » ? Et cette expression dosée avec soin : «Une information passablement curieuse» ? Lancé ironiquement, le mot «curieuse » s'en trouve adouci et l'auditeur (ou le lecteur) voit ses doutes s'éveiller : qui sait, après tout., il y a peut-être là une part de vérité ? Lorsque le chef du gouvernement soviétique tient ce langage et se borne à ne dire que cela sur les origines de cette sinistre affaire, ses propos., si on les examine attentivement, laissent l'impression que tout cela est dit non pour faire la lumière, mais - si l'on emploie les termes dont s'est servi Khrouchtchev au xxe Congrès en parlant du meurtre de Kirov - afin de «faire disparaître les traces ». Et le plus étrange peut-être est que Khrouchtchev lui-même ne se rend pas compte combien sa manière de traiter «l'affaire» Toukhatchevski est monstrueuse. ON le voit, la réaction contre le système de terreur stalinien est loin d'être close. Beaucoup de Soviétiques s'en rendent compte, les uns très nettement, les autres plus confusément, mais les uns et les autres le sentent. Et dès lors ils ne peuvent plus se taire. On est frappé par le fait que, ces derniers mois, le thème de la terreur stalinienne est de plus en plus évoqué en U.R.S.S. dans les œuvres littéraires. La chose èst significative. Il y aura lieu maintes fois d'y revenir. S. SCHWARZ. ( Traduit du russe) , :,

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