QUELQUES LIVRES étranges dans l'histoire post-stalinienne des pénitenciers soviétiques. L'auteur rapporte le bruit qui circulait à l'époque parmi les prisonniers, suivant lequel cet établissement aurait été réservé aux « complices de Béria ». Version déjà relatée par d'autres rapatriés, certains indices suggérant même que les gardes y auraient cru. L' « internement des complices de Béria » est un chapitre de la mythologie propre au· monde concentrationnaire. Prisons et camps ne se comptent plus où l'arrivée imminente de ces personnages était prévue, où l'on vit passer les trains les emmenant vers des contrées plus perdues encore, où l'on entendit sur leur sort des récits de la bouche des détenus transférés à d'autres établissements, etc. Tout cela n'exclut évidemment pas la véracité de l'une ou de l'autre des nombreuses rumeurs qui purent avoir cours. En ce qui concerne Verkhnié-Ouralsk, il paraît probable que cet important pénitencier reçut à partir de 1954 une affectation spéciale. Mais on ne sait toujours pas au juste laquelle. P. B. La tête en bas GEORGECSAsTELLAN: La République démocratique allemande (R.D.A.). Paris 1961, P.U.F., coll. « Que sais-je ? », 126 pp. L'AUTEURp, rofesseur à la Faculté des lettres et des sciences humaines de Poitiers, présente lui-même son opuscule comme une « étude condensée, mais scientifique». Le lecteur de notre compte rendu jugera de la valeur « scientifique » de l'étude en méditant ce passage, où M. Castellan compare le niveau de vie dans les deux Allemagnes (p. 49, souligné par nous) : A cette date [1950] les Allemands de l'Ouest étaient parvenus à un niveau supérieur. Par la suite, l'écart entre les deux Allemagnes a diminué et l'habitant de la République démocratique consomme même un peu plus que son homologue de l'Ouest en sucre, viande, beurre, matières grasses... Enfin, à cette augmentation directe du niveau de vie s'ajoute l'accroissement des dépenses sociales : éducation, santé publique, sport et culture. La comparaison cette fois est évidemment tout entière favorable à la R.D.A., système socialisé. Cet opuscule ayant été imprimé au cours du quatrième trimestre de 1961, l'auteur ne pouvait ignorer les événements qui se sont déroulés à la frontière des deux Allemagnes, laquelle est devenue une muraille de Chine traversant Berlin de r,art en part afin d'empêcher les Allemands de 1Est de fuir le paradis décrit par M. Castellan. Ce livre porte le numéro 964 de la collection. Qui en aura achevé la lecture « saura » le contraire de la vérité. Il s'est trouvé une maison d'édition pour présenter de telles énormités. LUCIEN LAURAT. Biblioteca Gino Bianco Pétrole antique pétrole moderne 125 JEAN-JACQUEBSERREBY: Histoire mondiale du pétrole. Paris 1961, Ed. du Pont-Royal, 259 pp., abondante iconographie. S'IL ESTBONde savoir que nous ne sommes plus au temps de la lampe à pétrole, il est utile de connaître l'histoire de ce dernier puisque nous continuons à nous chauffer et à faire fonctionner la plupart de nos véhicules, terrestres, maritimes et aériens, avec un combustible peut-être antédiluvien, et que nos matières plastiques ont la ,.. . . meme ongme. La partie la plus attrayante du présent ouvrage, magnifiquement illustré, est sans doute celle qui se rapporte à l'antiquité des usages du pétrole, antiquité que l'on ne· soupçonne pas toujours. M. Berreby a su rendre presque évidente l'hypothèse plausible qui consiste à ramener au commun dénominateur du pétrole le feu sacré de Zoroastre, celui de Prométhée, le buisson ardent de Moïse, la flamme olympique et celle que devaient conserver les prêtresses de Vesta. Le témoignage de l'histoire supporte cette conjecture et celui de la géographie l'encourage. Après les usages religieux viennent les usages pharmaceutiques et militaires, le pétrole entrant très vraisemblablement dans la composition du fameux « feu grégeois » comme dans celle de nombreux remèdes. Enfin sont venus les usages industriels que nous connaissons bien et dont l'histoire, plus proche, nous est plus familière. A l'âge industriel, on peut dire que le pétrole n'est plus seulement une arme, mais un enjeu de la guerre. On sait déjà que les anciens Egyptiens au moins ont connu certaines applications de l'électricité, tandis qu'une petite machine à vapeur avait été construite, sous forme d'un jouet d'enfant, par l'ingénieur Hiéron d'Alexandrie. Ainsi, pétrole, vapeur, électricité, rien ne paraît avoir manqué à l'Antiquité des sources d'énergie dont nous faisons honneur aux deux derniers siècles d'avoir découvert les principes. Dans l'ordre technique, ces principes étaient connus. Il faut donc dissocier l'histoire des découvertes techniques de celle de leurs applications industrielles, beaucoup plus récentes. Les Anciens ont connu l'usage religieux, ludique, pharmaceutique, militaire. Le monde moderne a mis au service d'une civilisation de masse les moyens que l'Antiquité réservait à d'autres destinations. L'ouvrage de M. Berreby, en même temps qu'un régal pour les yeux, est un aliment pour la réflexion. Luc GUÉRIN.
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