122 et consciencieux qu'ils sont, ils sont incapables de s'intéresser, l'un à autre chose qu'au statut de la propriété, l'autre à autre chose qu'à des plans de bataille. Ils ne savent pas ce qu'a été la révolution espagnole, ils ne savent pas ce qu'a été la guerre civile, ni ce qu'a été l'Europe au temps de la guerre civile espagnole. Pour accéder à la dignité d'historien, il ne suffit pas de s'intéresser au problème de la propr~été, à celui de la guerre ou à tout autre : il faut s'intéresser à ces êtres et à ces groupements qui, plongés au cœur de tous les problèmes à la fois, se débattent au milieu des événements, et parfois les maîtrisent un moment avant d'être emportés par la tempête. YVES LÉVY. Un adversaire des ph_ysiocrates · F. GALIANI : Dialogues sur le commerce des bleds. Milan et Naples, Riccardo Ricciardi ed., s.d., XXVIII-604 pp. V 01c1, réédités avec un soin extrême, les Dialogues écrits par Galiani contre la libre exportation des blés que les physiocrates avaient eu le crédit de faire instituer en France en 1764. Ces dialogues jouissent d'une estime méritée. Ils sont pétillants de vie et d'esprit, le style en est de bout en bout vif et entraînant. Galiani y multiplie les arguments contre l'esprit de système, et il émet au passage bien des jugements intéressants sur des sujets plus ou moins proches de l'objet essentiel de son ouvrage. La présente édition, fort bien présentée, est précédée d'une introduction de M. Fausto Nicolini, qui a en outre fait suivre le texte d'onze appendices. Ceux-ci occupent la moitié du volume et forment un ample dossier de textes relatifs à l'intervention de Galiani dans la question du commerce des blés, et aux réactions qu'elle provoqua. On y lit des textes inédits de Galiani, des articles, des lettres (quelques-unes inédites), des jugements de contemporains, etc. L'éditeur examine aussi le problème de la participation de Diderot à la rédaction de ces Dialogues. Secrétaire à l'ambassade de Naples à Paris, Galiani fut brusquement _rappeléet dut, en juin 1769, retourner dans sa patrie. Il confia son manuscrit à Diderot et à Mme d'Epinay, et leur demanda de le corriger. M. Nicolini se fonde sur diverses considérations pour .·réduire à presque rien la part de Diderot. Son argumentation n'est pas absolument. convainèante. Sans doute toutes les idées, tous les développements, tout l'esprit est-il de Gall~. Et Galiani, d'ailleurs, connaissait fort bien notre langue. Il y a Biblioteca Gino· Bianco LB CONTRAT SOCIAL cependant dans les Dialogues une certaine vivacité où l'auteur du Neveu de Rameau semble bien avoir quelque part, et certaines suppressions, certaines additions du texte imprimé par rapport au manuscrit subsistant (M. Nicolini suppose que Galiani aurait rédigé une deuxième version, très proche du texte imprimé, version qui aurait disparu) nous paraissent dénoncer la main et la décision du professionnel. Ceci dit, le mérite des Dialogues sur les bleds n'en revient pas moins à Galiani seul. Diderot semble s'être gardé de rien mettre de son cru, et avoir seulement voulu user de ses dons exceptionnels pour accroître un brio dont le mouvement était déjà chez Galiani. Notons que les Dialogues n'avaient pas été réimprimés en français depuis qu'ils avaient été placés, en 1848, dans la « Collection des principaux , . econom1stes ». Y. L. Économie soviétique ALEC. NOVE : The Soviet Economy. An Introduction. Londres 1961, George Allen & Unwin, 328 pp. LES ÉTUDESconsacrées aux différents aspects de l'économie soviétique se multiplient à un tel point que les spécialistes eux-mêmes n'arrivent plus à : tout lire ; quant aux économistes, attirés par d'autres domaines, ils tendent, à de rares exceptions près, à les ignorer purement et simplement. C'est dire combien il serait utile de .rassembler les résultats les plus importants dans un tableau d'ensemble digne des trois grands ouvrages de synthèse que nous devons respectivement à Serge N. Prokopovicz (Russlands Volkswirtschaft unter den Sowjets, Zurich 1944, Histoire économique de l'.U.R.S.S., Paris 1952) et à Harry Schwartz (Russia's Soviet Economy, Englewood Cliffs, 1950 et 1954). ' En rëdigeant le présent livre, M. Alec Nove a voulu se charger de cette tâche, dont on ne saurait trop souligner les difficultés : le grand économiste qu~ fut Prokopovicz ne publia le · premier des ouvrages mentionnés ci-dessus qu'après avoir étudié l'économie russe.pendant quelque quarante ans. Malheureusement, en se mettant au travail, M. Nove ne semble pas s'être rendu compte de sa responsabilité. Ce qu'il offr~ au lecteur e~t un écrit bâclé. · L'auteur a omis de traiter plusieurs aspects fondamentaux de l'économie soviétique. On cherche en vain dans son livre une· description des richesses naturelles du pays. L'étrange développement démographique, qui depuis bientôt cinquante ans est une ·succession d'effondrements et de poussées tout à fait extraordinaires, _ •
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