Le Contrat Social - anno IV - n. 6 - novembre 1960

326 intérieurs absorbants) engendra l'impuissance diplomatique à arrêter à temps l'agression allemande et japonaise. Pendant ce temps, au Japon comme en Allemagne, l'opposition la plus résolue aux hommes politiques relativement pacifiques des années 20 était le fait de ceux dont les ambitions remontaient à la réaction nationaliste des origines de la modernisation. On peut en dire à peu près autant du choix de Staline, arrêté définitivement à la fin de 1945 ou au début de 1946. Le peuple soviétique et le monde entier espéraient alors que l'URSS consacrerait ses ressources à la reconstruction et au bien-être. Mais encore une fois les soucis intérieurs de l'Occident, qui l'avaient amené à procéder à un désarmement précipité et à laisser un vide en Europe orientale, se combinant avec les possibilités incontestables qui s'offraient en Chine, créèrent une situation trop tentante pour l'expansion •soviétique. Pourquoi Staline, comme les Allemands et les Japonais avant lui, succomba-t-il à cette tentation au lieu de faire du bien-être son objectif premier ? Il faut de nouveau remonter à la réaction nationaliste qui contribua à créer la Russie moderne et qui devint un élément des impératifs particuµer~. à l'idéolo~ie communiste et ~ la politique interieure de 1 URSS. De plus, il est évident que Staline n'était pas prêt à affronter toutes les conséquences intérieures de l'âge de la haute consommation ; pas plus que ne le sont encore ses successeurs. Dans la mesure où les grandes luttes de puissance du :xxe siècle ont une base économique, celleci ne réside pas dans l'impérialisme, dans les nécess~tésd'~ prétendu stade de monopole du capitalisme ni même dans une compétition inévitable pour les colonies. Elle réside dans les contours de l'~ène. d~ puissance eurasienne, tels qu'ils sont determine~ p~r les stades rela!ifs de croissance, et en particulier dans les tentations et les craintes inspirées aux nouvelles puissances mûres par les sociétés de transition en Europe orientale et en Chine. Il peut paraître étrange que cette analyse s'arrête à 1951, la lutte entre le monde communiste et l'Occident n'ayant en effet pas pris fin avec le cessez-le-feu en Corée. Néanmoins au début des , ' annees 50 cette lutte a changé de forme, en raison de l'importance prise par les nouvelles armes nucléaires_et par suite des conséquences du processus de croissance en de nombreux points du globe. VII. - Un programme de paix VOYONS MAINTENANT, dans les grandes lignes comment on p~ut résoudre le problèm~ commun le plus important, celui <;l'une paix durable. Biblioteca Gino Bianco --- LB CONTRAT SOCIAL L'Union soviétique, les États-Unis et la GrandeBretagne possèdent aujourd'hui, la France et d'autres posséderont demain, des armes dont l'emploi pourrait provoquer l'anéantissement de celui qui en use aussi bien que de nous tous. En passant du duopole à l'oligopole nucléaire, la gamme des circonstances dans lesquelles ces armes P?U~r~ent être . rationn~llement employées se retrecit. Certes, si une puissance prend une avance assez grande pour pouvoir détruire d'un seul coup la capacité de rétorsion de toutes les autres la domination mondiale· pourrait constituer ~ objectif à court terme ; les efforts que fait l'Occident pour que Moscou n'ait pas cette terrible tentation sont justifiés. On dirait pourtant qu'une farce cosmique a été faite à l'homme. Si les armes nouvelles concentrent une énorme puissance aux mains de quelques sociétés parvenues à la maturité technologique l'effet en est de réduire leur capacité à user ration~ nellement de la force. La politique des grandes puissances est actuellement menée à deux niveaux distincts : l'un la dissuasion nucléaire mutuelle; l'autre, le nivea~ de la diplomatie, de la politique économique et des armes traditionnelles, où les grandes affaires du monde continuent à se traiter .. A ce niveau inférieur, les puissances ont à agir avec circonspection à l'égard d'États beaucoup plus faibles. En défiant Staline en 1948, Tito a fait en quelque sorte œuvre de pionnier dans l'exploitation de ce paradoxe. Nehru, Nasser, Ben Gourion, Adenauer entre autres (et à l'intérieur du bloc communiste Mao Tsé-toung et Gomulka) ont exploité !a même :7ein~. Les faibles ne peuvent pas touJours y reussir, comme les Hongrois en firent l'expérience en 1956; mais ils furent vaincus non pa~ avec des armes atomiques, mais par l'infanterie et les chars, et cela coûta cher à Moscou dans la lutte diplomatique et idéologique. Des sociétés qui en sont encore à la période des conditions préalables, comme l'Égypte, ou aux premiers stades du démarrage, comme l'Inde, la Chine, .la Yougoslavie, peuvent souvent faire figure de grandes puissances dans la diplomatie mondiale, grâce à la dispersion de puissance amenée par les armes nouvelles. Nouveaux théâtres de conflit Cette dispersion de la puissance ira en s'accentuant grâce à l'accélération des conditions préalables ou des débuts du démarrage dans l'hémisphère austral. De plus, la Chine et une partie de l'Europe orientale s'endurcissent avec leur démarrage ; le théâtre des deux guerres mondiales et de la première phase de la guerre froide n'existe plus. La Chine et l'Inde ont commencé à démarrer. Le Pakistan, l'Égypte, l'Indonésie et d'autres n'ont peut-être que dix ans de retard sur elles. 1:,edé~arrage est achevé au Mexique et en Argentine, en cours au Brésil et au Venezuela. Dans ..

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