Le Contrat Social - anno IV - n. 2 - marzo 1960

• HISTOIRE ET MYTHOLOGIE par Leonard Schapiro LA NOUVELLE Histoire du parti communiste de l'Union soviétique réunit en un volume différents chapitres déjà parus dans des périodiques à Moscou depuis l'automne 1958 1 • La paternité de l'ouvrage est attribuée à B. N. Ponomarev, en sa qualité de chef du comité de dix membres chargé de la rédaction. Il est révélateur qu'un haut fonctionnaire de l'appareil du Parti ait coiffé les historiens professionnels en majorité au comité. De plus, Ponomarev passant pour être à la tête de la section étrangère au secrétariat du Comité central, il est permis de supposer que la nouvelle Histoire, qui sera traduite en de nombreuses langues, s'adresse tout autant aux communistes et compagnons de route des pays non communistes ou neutres qu'aux lecteurs soviétiques. La nouvelle Histoire doit son origine aux critiques fotmulées devant le :xxe congrès du Parti à l'égard du Précis que s'attribuait Staline. Mikoïan d-:!clara alors que l'historiographie du Parti était «Je secteur peut-être le plus retardataire de notre travail idéologique », et invita les historiens soviétiques à ne plus s'en remettre aux archives des journaux mais à commencer d'examiner les sources documentaires. Anna Pankratova, à l'époque rédactrice en chef de la revue Questions d'histoire, alla jusqu'à plaider avec éloquence la cause de la vérité dans la relation des événements historiques. Questions d'histoire avaient déjà anticipé sur la nouvelle tendance en publiant dès 1955 un article où certains événements de la révolution de 1905 étaient traités avec une relative objectivité inconnue en Union soviétique depuis vin~-cinq ans. Dans le courant de 1956, la revue avait continué dans cette voie. Mais en accord avec la réaction au «dégel», un décret du Comité central, le 9 mars 1957, mettait brutalement fin à ce nouveau départ dans l'historiographie 1. lstoria kommounistitcluskor partii 1oviltskovo sorouza, Motcou 1959. Biblioteca Gino Bianco du Parti. Pankratova (déc.édée depuis) fut rappelée à l'ordre, et son principal adjoint, E. N. Bourdjalov, révoqué. Les principales raisons invoquées dans les critiques officielles sont à retenir, car elles motivent le trait caractéristique de l' Histoire actuelle, apparemment en préparation alors. Il était reproché à la revue d'avoir., dans nombre d'articles, omis de souligner la «différence de principe entre les bolchéviks et les menchéviks sur une question aussi fondamentale que l'hégémonie du prolétariat dans la révolution»; d'avoir« embelli le rôle des menchéviks et minimisé celui des bolchéviks» pendant l'année révolutionnaire 1905-06; et de n'avoir pas, en général, mis l'accent sur la critique « léniniste » de la tactique opportuniste et divisionniste des menchéviks 2 • En juillet 1957, une nouvelle revue consacrée exclusivement à l'histoire du Parti faisait son apparition : Questions d'histoire du Parti. Depuis, elle a publié nombre d'articles manifestement destinés à réparer le mal causé par l'objectivité relative des Questions d'histoire et à préparer la nouvelle Histoire. Ces articles offrent quelques affirmations bien surprenantes et qui relèvent de la pure imagination (reproduites plus tard dans !'Histoire), notamment : l'échec de la révolution de 1905 serait dû au fait que le soviet de Pétersbourg fut dirigé par les menchéviks qui, opposés à toute action révolutionnaire, visaient à un compromis avec la bourgeoisie ; le renversement de la monarchie en février 1917 aurait été mené par les bolchéviks ; ce dernier point expliquerait la prédominance des menchéviks et des socialistes-révolutionnaires dans les premiers soviets, les bolchéviks étant trop occupés à se battre pour pouvoir faire de la propagande électorale; après février 1917, le parti bolchévique aurait été le seul parti révolutionnaire, l'objectif 2. Spravotchnik partiiMtJo rabotnika (• Guide du militant•), Moscou 19s7, pp. 381-82.

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