L. LABBDZ Le rapport au XIX8 congrès du Parti en octobre 1952 fut présenté par Malenkov. Le détail est omis. Au lieu de cela, on cite quelqu'un d'autre qui prit la parole à cette occasion : « Le XIXe Congrès discuta le rapport sur les modifications dans les statuts du Parti, présenté par N. S. Khrouchtchev. » Joukov Dans la description des batailles de Moscou et de Stalingrad ainsi que de la chute de Berlin, le nom du maréchal Joukov n'apparaît jamais. Traitant de la bataille de Moscou, le manuel fait état des exploits militaires du général Panfilov et du politrouk ( commissaire politique) KlotchkovDnevy ; à propos de Stalingrad les noms des généraux Tchouïkov, Rodimtsev, Gourtev et Gorokhov sont prononcés; quant à Berlin, les seuls noms donnés sont ceux des sergents Iégorov et Kantaria (qui hissèrent le drapeau soviétique sur le Reichstag). Le maréchal n'est pas nommé à propos de la dernière guerre et c'est seulement vers la fin du chapitre relatif à celle-ci qu'il apparaît, une seule fois, sur une liste de « grands chefs militaires». Pour faire bonne mesure, d'autres généraux soviétiques du dernier conflit partagent la même distinction. A l'exception de ceux qui sont cités plus haut, tous les autres sont simplement inscrits sur cette liste unique, sans aucune allusion à leurs mérites particuliers. C'est toujours le Parti qui est l'artisan collectif de la victoire, soit comme « organisateur du tournant décisif dans le cours de la grande guerre patriotique», soit « comme organisateur de la libération du territoire soviétique des envahisseurs fascistes». Cette façon de procéder fait sans doute contrepoids aux efforts de Joukov pour implanter « le culte de sa personnalité et exagérer fortement son rôle dans la grande guerre patriotique », qui, selon le manuel, furent la cause de sa disgrâce. Khrouchtchev DANS LB NOUVEAU MANUEL, Khrouchtchev ne prend de l'importance qu'avec la guerre et, bien entendu, après la mort de Staline. Il est question de lui en de précédentes occasions, mais son nom figure généralement en compagnie d'autres noms. Pendant la Grande Purge, il était déjà premier secrétaire du P. C. ukrainien et membre du Politburo lors du XVIll 8 Congrès; mais la nécessité de cacher la culpabilité collective du Politburo staUoien pendant les « violations du principe de la direction collective», ainsi que la suppression des noms de Malenkov, Molotov et KaP.Dovitch, ont apparemment contribué à la décision de faire commencer la carrière historique de Khrouchtchevplus tardqu'enréalité. Cela se comprend.Prenant la parole à uneréunion Biblioteca Gino Bianco 37 publique, le 30 janvier 1937, Khrouchtchev déclare au sujet du second procès de Moscou : Ces misérables nullités voulaient détruire l'unité du Parti et de l'État soviétique... Ils levèrent leurs mains perfides sur le camarade Staline( ...) Staline notre espoir, Staline notre désir, Staline le phare de l'humanité avancée et progressiste, Staline notre volonté, Staline notre victoire. Comme le rôle joué par .Khrouchtchev dans l'épuration avait été manifeste, son discours au XVIIl 8 Congrès (non cité, bien entendu) ne saurait être interprété comme un alibi : La desLruction d'agents fascistes et de tous ces méprisables trotskistes, boukhariniens et nationalistes bourgeois, nous la devons, avant tout et personnellement, à notre chef, le grand Staline. L'attaque de Khrouchtchev contre la mémoire de Staline dans son discours secret au XXe Congrès aurait peut-être pu servir de justification historique, mais elle demeure «secrète». D'où de nouvelles difficultés pour les auteurs du livre qui citent le Compte rendu sténographique du xxe Congrès, sans pouvoir se référer au discours lui-même, puisqu'il ne figure pas au Compte rendu. Le nouveau manuel n'est pas entaché d'un «culte de la personnalité » comparable à celui de l'ancien Précis. Mais plus on se rapproche du présent, plus les pages sont fréquemment émaillées du nom de Khrouchtchev. Toutes les décisions et réalisations importantes de l'ère poststalinienne sont attribuées à son initiative personnelle, à commencer par la condamnation du culte de la personnalité. Le lecteur éprouve un certain soulagement en ce sens que le nouveau secrétaire n'a pas maintenu le chapitre sur le « Matérialisme dialectique et historique » écrit par Staline et que d'innombrables citoyens soviétiques étaient tenus d'apprendre par cœur. Non plus qu'il n'en a imposé un de son cru. Désormais, la philosophie est laissée à Lénine. « Demain, le monde entier ... » LE NOUVEAU MANUEL s'adresse à un public plus instruit. Les grossiers mensonges du Précis ont fait place à une manière plus subtile de tourner la vérité. L'ouvrage n'en est pas plus honnête pour autant ; il est simplement plus long. Il ne rend pas la découverte de la vérité plus facile aux lecteurs qui ne connaissent pas le sujet à fond. S'il a cessé d'être une autobiographie romancée de Staline, il n'est nullement devenu un véritable ouvrage historique. Comme devant, les considérations du moment déterminent la présentation des événements et des personnalités; comme dans le,Précis, l'histoire. est toujours la politique d'aujourd'hui projetée dans le passé.
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