Le Contrat Social - anno IV - n. 1 - gennaio 1960

36 paru, mais dans un autre rôle. L'allusion à la grande épuration est presque explicite : Beaucoup d'honnêtes communistes et de sans-parti absolument innocents furent victimes de la répression. Pendant cette période, un aventurier politique, Béria, se faufila aux postes des plus hautes responsabilités de l'État. Ne reculant dans ses desseins criminels devant aucun forfait, exploitant les défauts personnels de J. V. Staline, il calomnia et extermina nombre d'honnêtes gens dévoués au Parti et au peuple. Pendant la même période, Iéjov, commissaire du peuple aux Affaires intérieures, joua un rôle infâme. De nombreux travailleurs entièrement dévoués au Parti, communistes et sans-parti, furent calomniés et perdirent la vie de son fait. Pour leur activité criminelle Iéjov et Béria subirent un châtiment mérité. On ne peut que supposer ce qu'a été le châtiment dans le cas de Iéjov, puisqu'il n'est pas révélé. Le caractère anonyme de cette période frappe, d'autre part : aucun autre dirigeant du Parti en activité à l'époque n'est nommé. Molotov et Kaganovitch LES HISTORIENdSu Parti ont vu de nouvelles difficultés s'ajouter aux anciennes quand il s'est agi de traiter des dirigeants. Le tabou dont les victimes de Staline faisaient l'objet dans le Précis a désormais été étendu à certains de ses « plus proches compagnons». La vieille garde stalinienne épurée a rejoint au purgatoire communiste la vieille garde léniniste. La technique du « trou de -(mémoire» du Ji romancier Orwell est appliquée à certains ; pour d'autres, on espère que le souvenir de leurs actions se sera estompé. Les noms de Molotov et de Kaganovitch, à deux exceptions .l près, sont supprimés dans le nouveau texte, et cela jusqu'à la défaite du « groupe antiparti » en juin 1957. Dans le Précis, il y avait une référence à la lutte contre les « groupements antiparti » à l'époque du xe Congrès : elle a désormais disparu. Rien d'étonnant à cela, puisqu'on y lisait qu'en Ukraine la lutte était « dirigée par le camarade Molotov [alors qu'] en Asie centrale i_la ~ lutte contre les groupements antiparti avait àlsa tête le camarade L. Kaganovitch ». Le Précis affirmait que «!'Armée rouge fut victorieuse (...) parce que son éducation politique était aux mains d'hommes tels que Lénine, Staline, Molotov, Kalinine, Sverdlov, Kaganovitch... » A présent la liste des artisans de la victoire ne comprend plus Molotovni Kaganovitch. La biographie de Béria a été remplacée dans la Grande Emyclopédie Soviétique par un article sur le détroit de Behring et le navire appelé « Molotov» est rebaptisé « Baltika ». La villé de Molotov est redevenue Perm ; tous les tableaux et documents qui font état du rôle joué par Molotov pendant la révolution (il était alors direçteur de la Pravda) ont été retirés du musée Lénine de la Révolution. La station de métro la plus proche Biblioteca Gino Biarico L,EXPÉRIENCE COMMUNISTE du"musée, précédemmenf'appelée « Lazare Kaganovitch » ((celui-ci /-_avaittr,dirigé les <trava~ du réseau souterrain de la capitale), s'appelle maintenant «Okhotny Riad » (nom de la grande voie où elle se trouve). Malenkov Dans l'étude de l'histoire soviétique contemporaine, les retours sur le passé récent qu'offraient les précédentes sources imprimées peuvent donner une idée des règles simples qui régissent le travail des compilateurs. La distribution changeante de la gloire et des mérites pour les succès soviétiques pendant la dernière guerre en est une excellente illustration. Dans le tome VII de la Grande Encyclopédie Soviétique, le Comité d'État pour la Défense, institué le 30 juin 1941, se composait de Staline, Molotov, Vorochilov, Malenkov et Béria. Dans un volume postérieur, publié après la mort de Staline et la chute de Béria, il ne restait que quatre no~s : Staline, Molotov, Vorochilov et Malenkov. Au moment où ce volume fut publié, Malenkov était encore chef du gouvernement et Molotov ministre des Affaires étrangères, mais Béria était déjà un «non-être». Dans le présent ouvrage, postérieur à la chute du « groupe antiparti », le Comité d'État pour la Défense a complètement disparu de l'histoire de la « grande guerre patriotique ». On nous dit en revanche que« K. E. Vorochilov, A. A. Jdanov, D. Z. Manouilski, N. S. Khrouchtchev et A. S. Chvernik furent désignés pour un travail de premier plan dans l'armée». Ainsi exeunt Molotov, Malenkov et Béria des pages de l'histoire. Ils ne sont pas nommés non plus comme ayant été les trois orateurs aux obsèques de Staline. Les obsèques elles-mêmes ne sont même pas mentionnées, bien qu'elles aient été préparées par Khrouchtchev en qualité de président du comité d'organisation des funérailles (ce qui lui inspira sans doute l'idée de son apostrophe aux capitalistes : « Nous vous enterrerons.») · La « direction collective» des trois équipes post-staliniennes est naturellement passée aussi sous silence. Les remaniements de structure opérés après la mort de Staline sont décrits de façon impersonnelle : « Il fut décidé d'avoir un seul organe, le Présidium du Comité central, au lieu de deux, le Présidium et le Bureau du présidium. » Les changements dans la composition de ces organismes ne sont pas mentionnés. Mais ceJ anonymat prend fin dans la phrase qui fait suite : « Il avait été jugé opportun de créer le poste de premier secrétaire du Comité central. En septembre 1953, N. S. Khrouchtchev fut élu premier secrétaire du Comité central du P. C. de l'URSS. » On ne dit pas ce qu'il était advenu du Secrétariat en mars 1953.

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