QUELQUES LIVRES s'est vue contrecarrée dans la réalisation de ses propres projets.» A ce genre d'affirmations sans preuves ou contraires à toute vérité, on n'a pas envie de répondre. Plus loin il est dit (p. 44) (\Ue « l'aide accordée à Tchiang par l'Aménque (...) fut beaucoup plus importante que toute l'aide soi-disant fraternelle de Staline». De tels procédés d'information permettent de soutenir n'importe quelle thèse. « Si la Chine peut s'entendre avec l'Occident (...) la situation de la Russie deviendra automatiquement dramatique : la menace des deux fronts s'actualisera et se renforcera ... » (p. 31). Cela ne veut absolument rien dire : en fait de deux fronts, il n'existe même pas la « menace » d'un seul. Et cela continue ainsi pendant des pages : « Le Kuomiotang de Sun Yat-sen fut fondé d'après le modèle soviétique et formé avec l'aide soviétique, à tel point que l'ambassadeur de l'époque, Borodine, pouvait être considéré comme conseiller principal et comme l'un des maîtres de la Chine >> (p. 33). Tout est faux, mais écrit avec beaucoup d'aplomb. Le reste ne vaut pas mieux. 11 suffit de citer, le comme11taire devient superflu : Mao « affirmait que les paysans constituaient et constitueraient toujours le fondement de la révolution chinoise » (p. 46). Si les Américains avaient touché à la Mandchourie, lors de la guerre de Corée,·« cette opération aurait rendu inévitable la troisième guerre mondiale et ses conséquences» (p. 54). Sur l'armistice coréen:« la Russie venait de perdre définitivement la face par rapport à la Chine »(p. 54). Si Khrouchtchev envoie des jeunes gens en Sibérie, ce n'est pas pour exploiter les gisements minéraux ni défricher les terres vierges, mais pour peupler des territoires, en raison de la prolifération chinoise (p. 72). L'autorité de Mao « n'a pas été fondée dans le sang» (p. 77). Kao Kang et ses amis « furent liquidés au titre de rebelles et ·de défenseurs des intérêts de Moscou » (p. 78). Etc., etc. Mais le verbiage de W. Starlinger est d'une incontinence qui se prête mal aux citations, à moins de reproduire des page~ entières. Toute la thèse se ramène à la croissance démographique chinoise et à l'impossibilité de nourrir cette population accrue, sur les terres disponibles ; une invasion de la Sibérie devrait résulter de cet état de choses en devenir. Or personne n'est en mesure de vérifier les données officielles sur le dernier recensement chinois et le taux de natalité : comme elles sont de source communiste, elles ne méritent aucune créance, ce qui n'a plus besoin d'être démontré. D'autre part, un excédent de population chinoise, if any, n'impliquerait pas nécessairement qu'une armée jaune se mette en marche vers le nord (~our9.uoi pas vers le sud ?) et qu'une guerre s enswve avec l'Union soviétique. Aux objections qui lui ont été faites en matière démogral'hique, W. Starlinger répond en se fondant (p. 124) sur une Bibli•oteca Gino Bianco 311 analyse due... à des communistes tchèques, donc sans plus de valeur que les données chinoises. 11 invoque aussi les services compétents des Nations unies, qui ne font que compiler les renseignements officiels (et qui notamment attribuaient 214 millions d'habitants à l'URSS en 1956, chiffre ramené à 200 millions par la statistique soviétique). Enfin il tient pour acquis ce qu'il faudrait précisément prouver, à savoir que les mouvements de populations priment la politique, l'économique et la technique, ce qu'on est en droit de regarder comme absurde. Il manipule d'ailleurs les chiffres avec une désinvolture qui discrédite ses livres. P. 122, c'est « dans quelques dizaines d'années [que] le chiffre global de la population ne sera pas loin d'atteindre le milliard». Les pourcentages dont il se sert en matière agricole (pp. 96 et 98) sont inintelligibles et quand il traite (p. 113) de la récolte en 1955, c'est à n'y rien comprendre : la production a augmenté de 40% en cinq ans, par rapport à 1950, mais en 1953-1955 elle a « sensiblement baissé par rapport à celle de 1950-1952 ». Enfin il jongle avec les promesses communistes, dont on sait ce que vaut l'aune, comme si elles étaient réalisées ou réalisables, à la façon de tous les propagandistes prosoviétiques : « au cours des douze années à venir la récolte moyenne de céréales doit passer de 11-30 quintaux (en 1955) à 30-60 quintaux (en 1967) par hectare » (p. 104). Rappelons seulement qu'en Union soviétique, l'agriculture « la plus mécanisée du monde », comme s'en vante le pouvoir, obtient un rendement de 8 quintaux à l'hectare en moyenne ... Quant aux multiples faits précis, concrets, palpables, qui attestent depuis bientôt quarante ans la solidarité des partis communistes soviétique et chinois, à travers toutes les vicissitudes, les crises et même les divergences de vues relatives à la tactique, W. Starlinger les passe tout simplement sous silence. Les nombreuses déclarations de Mao, confirmées par ses actes, sur la prééminence nécessaire du parti communiste de l'URSS dans« le camp du socialisme mondial», W. Starlinger n'en tient non plus aucun compte. Des professions de foi comme celle de Soong Tching Ling (la veuve de Sun Yat-sen) intitulée: China and the Soviet Union Forever Stand Together, pour ne prendre qu'un seul exemple tout récent dans Peking Review (n° 22 du 2 juin 1959), cela n'existe pas davantage pour les exorciseurs du spectre jaune qui ne s'en laissent pas conter (mais si Mao, si Soong Tching Ling tenaient le moindre propos en sens contraire ...) Bref, il n'y a que la « biologie » qui importe. Cependant W. Starlinger a pris soin de se mettre à couvert, au début de son livre : « Au fond, ce sont là des questions que l'on ne peut résoudre ni à l'avance ni même apr s complètement [ ?]. Elles sont essentiellement déterminées • •
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