QUELQUES LIVRES jusqu'au droit de déclarer la guerre ( Contrat, II, 2, cité p. 89). Rousseau a-t-il voulu de plus réserver au Prince l'initiative des lois que le Souverain aurait pour fonction de ratifier seulement ? Le texte que cite M. Krafft sur le droit cc de proposer, de diviser, de discuter que le gouvernement a toujours grand soin de ne laisser qu'à ses membres » ( Contrat, IV, · 1, in fine) demeure d'interprétation incertaine, d'autant plus que Rousseau déclare vouloir réserver l'examen de ces questions à un autre traité. S'agit-il d'un point de droit ou d'un point de fait ? Rappelons qu'une excellente édition du Contrat social, précédée d'une remarquable introduction et accompagnée de notes de Bertrand de Jouvenel, a été publiée en ~947 aux éditions du Cheval ailé à Genève. A. PATRI. A la manière de ... PIERRE - C. PATHÉ : Essai sur le phénornène soviétique (Le démiurge du xxe siècle). Paris 1959, Éditions Besson et Chantemerle, 240 pp. L'auteur est une nouvelle victime du mal si contagieux dans certains milieux : l'identification de l'impérialisme soviétique avec la marche de l'histoire. Cette optique opportuniste et vulgaire a déterminé nombre de demi-intellectuels depuis 1944 à rallier le parti communiste, d'autres à devenir « compagnons de route» et d'aucuns à « garder le dialogue )j, c'est-à-dire à entretenir d'excellents rapports avec les communistes de l'espèce stalinienne, tout en conservant soigneusement les avantages de la société bourgeoise. L'orientation de ce M. Pathé est manifeste : « En créant la société soviétique, le peuple russe a joué le rôle de pionnier de l'histoire. Il a créé en avance les formes sociales que la marche de la Science rendra universelles dans des délais plus ou moins courts» (p. 216). Les sources de sa documentation et de son argumentation sont indiquées avec tout autant de clarté : « ••• J'ai surtout utilisé et interprété la littérature russe et la masse des publications soviétiques ...» (p. 10). Son livre se conforme donc· rigoureusement à la « ligne » soviétique, avec toutes les affirmations avancées d'innombrables fois par Khrouchtchev, par la presse communiste ou par le dernier fonctionnaire-robot de l'« appareil». En voici quelques échantillons (les majuscules sont de l'auteur) : Ainsi le bolchévisme a réalisé la Société sans privilèges à laqu .:llc bien des utopistes avaient rêvé (p. 50). Cependant vers 1962 le niveau de vie soviétique aura rejoint c lui de l'Europe occidentale avancée en supposant simplement le maintien des rythmes actuels. 11 le dépassera inévitablement par L1 suite (p. 71). Biblioteca Gino Bianco 253 On se méprendra beaucoup en pensant que les Soviétiques ont occupé l'Europe Orientale dans le but d'y installer le communisme (p. 119) ... Il est fort heureux pour l'Occident que l'URSS ne veuille, pour des raisons de sécurité nationale, abandonner les pays de l'Europe Orientale (p. 209). Profitant de ce qu'il n'y avait, en Tchéco-Slovaquie, ni régime communiste, ni occupation soviétique, les agents américains se mirent en action pour entraîner ce bastion dans leur camp. Moscou prit les devants et le parti communiste tchèque saisit le pouvoir d'une manière parfaitement pacifique... (p. 121). Quant à la retentissante révolte hongroise de l'automne 1956, elle a été la plus grande insanité de l'aprèsguerre (...) L'action des émigrés, précipitamment amenés de leurs refuges par les organisations américaines, aggrava la situation. Les Soviétiques cherchèrent désespérément pendant plusieurs jours une solution amiable ... (p. 123). L'idée de répandre les doctrines communistes sur le monde par l' Armée rouge lui est parfaitement étrangère (p. 133). Même quand il formule des objections, l'auteur se soumet servilement aux thèses soviétiques en vigueur depuis le rapport secret de Khrouchtchev au xxe Congrès. Il reproche à Staline d'avoir provoqué inutilement le conflit avec Tito (pp. 124-25), de s'être laissé surprendre par l'attaque allemande de juin 1941 (p. 117) et d'avoir élargi la pratique des massacres aux staliniens euxmêmes. Sur ce dernier point, il descend au même niveau d'ignominie que Khrouchtchev (ce qu'il prendra probablement pour un compliment) en qualifiant de juste l'extermination des trotskistes, des boukharinistes et des chefs de l'Armée rouge : Sur le fond, Staline avait raison, le recul historique ne permet plus aujourd'hui d'en douter (... ) Bien des victimes des purges ont pu estimer leurs fautes légères par rapport aux traitements subis (sic), mais cela ne veut pas dire que, du point de vue national soviétique, tous étaient innocents ... (p. 109). Mais on alla plus loin. A partir de 1937, Staline s'est acharné sur les membres du Parti; des milliers furent fusillés ou emprisonnés (p. 110). Mais si le Secrétaire Général a pu, au cours de son règne, appliquer une telle tactique jusqu'à l'absurde, c'est que le peuple russe a plus ou moins consciemment accepté cette logique infernale dont il était victime (p. l 14). Le livre contient évidemment l'inévitable condiment frelaté de l'indigeste prose soviétocommuniste : l'anti-américanisme aussi perfide que systématique. Sans plus d'arguments à l'appui, M. Pathé enseigne que « la politique mondiale américaine s'est effondrée > (p. 234) ; qu'elle << a tourné le dos à l'histoire», ce qui ne l'empêche pas d'affirmer en même temps qu « la position des USA barre actuellement la réconciliation» (p. 232) av c le monde sovi tique, entièrement innocent, bien entendu, dan c cas comm dans tous les autre .
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