Le Contrat Social - anno III - n. 4 - luglio 1959

l30 Seul, le mufti de Tachkent, Ziautdinov BaboKhanov, joue exceptionnellement un rôle politique assez important. Intelligentsia soviétisée EN UNIONSOVIÉTIQUl'Eexpression intelligentsia est comprise dans un sens très large. Elle englobe pratiquement tous ceux qui ne sont pas ouvriers et paysans (l'« intelligentsia kolkhozienne » comprend les comptables et les présidents, mais aussi les «brigadiers », parfois même les tractoristes). Nous limiterons la notion d'intelligentsia à la classe possédant l'instruction supérieure. L'intelligentsia musulmane est caractérisée par plusieurs traits, qui la rapprochent de l'intelligentsia russe et la distinguent de celle des autres pays musulmans. Parmi ces traits, les principaux sont : l. Son importance quantitative et qualitative dans la vie des peuples musulmans de l'URSS. Au contraire de ce qui se passe au Moyen-Orient où elle ne constitue encore - à l'exception de la Turquie - qu'une mince couche sociale, l'élite intellectuelle des républiques musulmanes de l'URSS est une classe sociale importante. Son champ de recrutement, constitué par les ·établissements d'enseignement supérieur et secon..: daire technique, s'élargit sans cesse grâce à l'effort accompli par le régime soviétique dans le domaine de l'instruction publique. Rappelons, à titre d'exemple, qu'en Ouzbékistan (population totale : 7.300.000 habitants en 1956), les 31 instituts d'enseignement supérieur comptaient, en 1958, 78.300 étudiants et les 99 technicums, 57.900 3 • Bien entendu ces chiffres comprennent de très nombreux Russes; par exemple, en 1940 à l'Université d'Asie centrale de Tachkent, les musulmans ne représentaient que 32,5 % de l'ensemble des étudiants 4 , mais le pourcentage des Russes est en diminution constante tandis que celui des jeunes cadres nationaux augmente régulièrement. 2. Sa jeunesse. L'écrasante majorité des intellectuels musulmans appartiennent à la génération .p9strévolutionnaire : ils ont reçu l~urs grades 11njversitaires dans les années 30~ c'est-à-dire après le remplacement de l'alphabet arabe par l'alphabet latin s. Ils ont donc grandi sans contact . . . . . .. ~. . . . ·J. R. Goulamov : « Sous l'étendard léniniste .de l'amitié éies :peuples». Communiste, n ° 15, i958. · · · .. : . · · ·4. Les Vingt ans de l'université d'Asie centrale, Tachkent, 1940, pp. 20-21. . 5. ·L'alphabet arabe a partout été remplacé par l'alphabet latin _entre 1926 (Azerbaïdjan) et ~929 (Tatarstan); entre 1938 ét 1940 il a cédé à son tour la~ placé à l'alphabet cyrillique dQment modifié. • · · Bibli'oteca Gino Bianco l,EXPÊRIENCE COMMUN/STE avec le monde musulman extérieur et sont coupés de la culture musulmane du passé. A de rares exceptions près, c'est une intelligentsia «soviétique» dont la formation ne doit rien à la culture traditionnelle de l'islam. 3. Son monolithisme, dû au caractère uniforme de l'enseignement public. Bien que chaque républiqu~ ..musulman<! de l'Union ait son propre ministère de !'Éducation nationale, l'organisation et les programmes scolaires sont partout identiques. La jeune intelligentsia musulmane est façonnée d'après un modèle uniforme et les différences techniques tendent à s'effacer pour donner naissance à un type d'intellectuel « musulman soviétique » dont les réflexes et le comportement psychique et social, voire politique, sont presque partout les mêmes 6. D'autre part, son origine sociale la différencie quelque peu de l'intelligentsia soviétique. Cette dernière, émanation d'une société «sans classes », groupe les ·sujets d'élite provenant de toutes les couches de la population. Ce principe semble assez bien. observé en ce qui concerne l'intelligentsia «russe », il l'est moins dans les territoires musulmans. Bien que l'enseignement supérieur soit maintenant largement ouvert à toutes les couches de la société (y compris aux enfants des anciennes classes dépossédées), l'origine sociale de l'intelligentsia musulmane présente quelques particularités. L'absence d'une classe ouvrière (sauf en Azerbaïdjan) avant 1917 explique la faible part de .l'élément issu· du prolétariat. La majeure ·partie des , jeunes intellectuels musulmans· :.s·ont des· fils ·de paysans, moins détachés du milieu familial et des· traditions du passé que ceux des· ,ouvrièrs 7 ; certains, et ils sont relativement nombreux, sont issus des ex-classes privilégiées (noblesse foncière). Il faut noter aussi un facteur particulier aux territoires où se pratiquait naguère le nomadisme (Kazakhstan, Turkménistan, Karakalpakistan) : la· forte survivance de l'esprit de clan. Elle favorise la promotion de nouveaux cadres intellectuels selon · de·s -critères traditionnels s. Ainsi, l'intelligentsia· musulmane apparaît, malgré sa jeunesse, plus ·proche de la génération de ses parents que ··la russe. · · ·· ' . . . . . . .. . . .. . . . ~- ... 6. L'extension prévue du système d'internats qui sous• traira les enfants à l'influence des parents doit, à l'avenir, uniformiser ~ncore .davantage· la prochaine génération selon un type ·« soviétique ». . . .... 7.·. Un des. grands·_.reproches. cfuë les. auteurs soviétiques ~dr~ssent à la jétine întëllige~tsia musulmane. est la persistance de l' « aksakalisme » ( dti turc ·ak : blanc et sakal : barbe) c'est-à-dire le «.respect excessif» envers les parents. ... 8. De. :nombreuses. attaques de la presse soviétique du Kazakhstan, _et du Turkménistan contre ce phénomène confirment la persistance en plein régime soviétique de l'ancienne structure ·« féodale ».

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