118 de clôture signifie de liberté individuelle en comparaisop. des contraintes communautaires et même gouvernementales des pays à openfields. Pour lui, ces deux grands types de civilisation agraire se sont rencontrés et pénétrés dans le val de Loire. Marc Bloch au contraire, dans les Caractères originaux de l'histoire rurale française, rattachait plutôt les régions méditerranéennes à 1' openfield nordique en insistant sur l'absence de clôture et certaines contraintes sociales pesant sur le cultivateur. On voit que le sujet est controversé; les antagonismes sociaux et historiques qui ont produit champs ouverts et champs clos peuvent se concilier dans une réalité plus complexe que les schémas explicatifs. M. Meynier se méfie d'ailleurs des explications et des descriptions unilatérales, comme des relations causales trop linéaires : les types agraires dépendent de trop de facteurs indépendants les uns des autres pour être expliqués exclusivement par l'un d'entre eux. Les facteurs physiques, techniques, économiques et politiques se mêlent en combinaisons trop variables avec ceux d'ordre traditionnel ou religieux pour que l'on puisse en tirer une sorte de loi générale. Cependant, sans nier leur multiplicité, l'auteur n'a pas craint d'isoler ceux qui lui paraissaient les plus déterminants. 11 n'y a guère de doute que l' openfield provient d'une communauté rurale solidement organisée mais dont les types furent très différents, allant du communisme intégral à une simple réglementation des activités individuelles, en passant par des formes intermédiaires : travail collectif ou travail individuel avec répartition des parcelles par voie d'autorité ou de tirage au sort, etc. Openfield et communauté rurale ont été partout liés à certaines époques historiques. Ils impliquaient au moins une organisation des assolements, sinon des labours, la vaine pâture, le libre parcours ·des bêtes, la structure des terres en lanières parallèles et généralement fort étroites. Il est difficile sinon impossible de déterminer une cause à la naissance des openfields : elle peut correspondre parfois, mais non généralement, à une séquelle des coutumes germaniques - ce qui reporterait la cause à un facteur social étranger; elle peut résulter d'un besoin de défense contre les exactions barbares ou féodales ; ou .simplement de la nécessité d'économiser la terre cultivable et, dans les pays secs, de nourrir le bétail. Si l'on en croit Roger Dion, une nécessité physique ne peut supplanter les plus fortes traditions historiques ou religieuses que dans les zones marginales, là où la présence simultanée de deux types agraires antagoniques a aidé le paysan à choisir rationnellement. BibliotecaGinoBianco LE CONTRAT SOCIAL Même difficulté d'ailleurs pour déceler une origine aux enclos. On hésite entre le besoin de protéger la culture contre un bétail abondant et celui d'affirmer par une marque tangible, comme les murs des châteaux forts, une prise de possession individuelle de la terre. Dans la plupart des cas, on ignore l'ancienneté des clôtures. Le mouvement des inclosures dans les temps modernes, dont a parlé Marx qui y voyait la genèse du prolétariat, est propre à l'Angleterre. En France, la clôture n'a pas en général la même signification sociale. Il faut ajouter qu'après s'être fermés, les champs s'ouvrent à nouveau. La haie plantée est souvent une survivance. Une évolution vers des champs ouverts, maintenant dégagés des contraintes ancestrales, s'amorce à partir des enclos. La lecture du petit livre de M. Meynier après celle de Marc Bloch plonge le lecteur dans un grand désarroi. Dans leur simplicité, les classifications morphologiques laissent insatisfait le désir de connaître le mécanisme social et économique d'une évolution indéniable des civilisations agraires. Malgré le progrès des recherches comparatives entre divers points du globe, un ordre évolutif, impliquant une ou plusieurs lois générales, devient insaisissable dès qu'on veut l'appliquer rationnellement à l'étude d'une région particulière. La frange irrationnelle s'épaissit à mesure que l'on pousse plus avant. Chaque paysage agraire a sa personnalité, qu'il semble impossible de définir par un nombre déterminé de traits spécifiques. Peut-être faut-il y voir un reflet des hommes qui s'y sont succédé et l'ont tour à tour modifié sous l'empire de leurs besoins et de leurs traditions ? Comme eux, il ne se réduit pas à un concept caractérologique. Au confluent des sciences naturelles et des sciences humaines, le paysage agraire est autre chose. On pourrait répéter à son sujet ce que Pascal disait de la nature : elle ne se lasse pas de fournir plutôt que l'esprit de concevoir. MICHEL COLLINET Errata Dans l'article de Michel Colinet sur « le Centenaire du matérialisme historique» ( Contrat social, janv. 1959), deux erreurs doivent être rectifiées : P. 40, 2e col., 16e ligne, au lieu de « son Journal de Cologne», il faut lire « son journal de Cologne». Il s'agit évidemment de la Neue Rheinische Zeitung. La citation qui suit est extraite du numéro daté des 2122 janvier,1849, commenté par B. Nicolaïevski dans sa biographie de Marx (p. 157). La même rectification doit être apportée à la note 14, p. 43. P. 43, 1re col., 7e ligne, il faut lire « épiphénomène d'un fait [au lieu de centre] purement économique».
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