QUELQUES LIVRES besoin de soumettre les activités des paysans à une surveillance de plus en plus serrée, le parti communiste doit tenir compte des nécessités du ravitaillement. Il s'agissait donc pour l'auteur de déceler la tendance fondamentale qui s'affirme à la longue malgré tous les flottements, et à laquelle on revient chaque fois que les circonstances le permettent. Grâce à une étude attentive de la documentation disponible, et aussi à une intelligence certaine des problèmes agricoles, M. Nacou a réussi, dans une large mesure, à exposer sa thèse d'une manière • convamcante. Cependant, cela n'est vrai que pour autant qu'il s'est attaché à la démonstration indiquée ci-dessus. L'ouvrage comprend également une partie historique, retraçant l'évolution depuis 1917 ; elle aurait très bien pu ne pas être écrite. Ignorant complètement les sources antérieures, l'auteur a fondé cet historique sur quelques ouvrages officiels publiés au cours des dernières années : Lénine et Staline eux-mêmes ne sont cités que de seconde main. Mieux encore, ou plutôt pis ; èn cherchant à réfuter un auteur aussi sérieux que Serge N. Prokopovicz, lorsque celui-ci affirme que la liquidation des grandes propriétés prit à l'origine la forme d'un mouvement spontané des populations rurales, il n'hésite pas à s'appuyer sur l'autorité d'une Mme Kotchétovskaïa, propagandiste soviétique, selon laquelle « la nationalisation des terres serait restée lettre morte si les ouvriers des villes n'étaient intervenus dans la vie du prolétariat rural». Dans le même ordre d'idées, il faut constater qu'à l'instar de bon nombre d'autres études récentes en français, l'ouvrage de M. Nacou ignore la littérature scientifique qui existe déjà sur l'agriculture soviétique. Les importantes recherches de Naoum Iasny, de Lazar Volin, de L. E. Hubbard, de Prokopovicz et autres sont presque entièrement passées sous silence. Les erreurs abondent dans les références, transformant par exemple L. Volin tantôt en Volin Lazar, tantôt même en V. Lazar, etc. L'ouvrage a pourtant été préparé sous les auspices du Centre national de la recherche scientifique ... PAULBARTON JEAN NICOLASA.A. : Onze ans au paradis. Paris, Librairie Arthème Fayard, 1958, 298 pp. LES SOUVENIRSdes rescapés des camps de concentration soviétique constituent déjà une littérature abondante. Et pourtant chaque ouvrage nouveau nous apprend quantité de faits encore i_gnorés. C'est le cas de ce livre écrit par un prêtre français qui a connu de nombreuses prisons, plusieurs camps (ceux de Karaganda et de Vorkouta entre autres) et, à la fin de son séjour« au paradis », la vie de prisonnier libéré, assigné à résidence forcée. Retraçant son expérience douloureuse de façon plutôt anecdotique, l'ouvrage n'a pas, Biblioteca Gino Bianco 111 certes, l'importance de la Grève de Vorkouta, de Joseph Scholmer (Amiot-Dumont, Paris 1954), ou de Der Katorgan, de Bernhard Roeder (Kiepenheuer & Witsch, Cologne 1956), qui hélas ! reste toujours inaccessible au public de langue française. Mais c'est une contribution importante à la connaissance d'un monde dont on ne saurait trop faire connaître les réalités. P. B. L'homme dans le paysage ANDRÉMEYNIER: Les Paysages agraires. Paris, Librairie Armand Colin, 1958, 199 pp. r LES PAYSAGESdont parle M. André Meynier, professeur à l'Université de Rennes, ne sont pas généralement ceux que recherchent les touristes dans leur désir de renouer avec la nature sauvage ; ce sont au contraire les paysages formés par l'homme depuis les débuts de la civilisation sédentaire pour satisfaire ses besoins alimentaires et s'y fixer. Ce sont ceux de l' ager, c'est-à-dire de la terre cultivée ou de la prairie artificielle, opposés au sa/tus, c'est-à-dire à la forêt, au désert à la prairie naturelle. La manière dont s'est formé le paysage agraire ne dépend pas seulement de facteurs physiques extérieurs comme la nature des roches, le climat ou le relief, mais aussi de l'activité des hommes ; elle est donc un chapitre de l'histoire et de la géographie humaines et intéresse ainsi le sociologue et l'économiste. Ces paysages agraires peuvent se classer en deux catégories extrêmes qui, à première vue, s'opposent radicalement : l'« openfield» et les cc pays d'enclos». L'openfield ou champ ouvert, le plus répandu en Europe centrale et au nordest de la France, se caractérise par l'absence de clôture entre les parcelles cultivées, leur forme ordonnée et leurs groupements en divers quartiers. Les habitations y sont concentrées dans le village ; les parcelles alignées parallèlement les unes aux autres y sont longues et étroites. Rien ou presque rien n'y gêne le passage de la charrue. Au contraire, dans les pays d'enclos ou pays de bocages, en Europe occidentale et particulièrement en France, les parcelles découpent la campagne en mailles irrégulières cernées par des clôtures construites ou plantées. Il existe un troisième type, intermédiaire, caractéristique de l'Europe méridionale et que l'auteur décrit comme un mélange de champs ouverts et d'enclos. M. Meynier n'adopte ~as la conception plus schématique, toute empremte de causalité historique, qui était celle de Roger Dion. Celuici, dans son Essai sur la formation du paysage rural français, assimilait le terroir provençal à c lui de la Bretagne pour les op1;1oser aux openfi lds germaniques. Depas ant le simple point de vu morphologique, il insistait sur ce que le droit
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