Le Contrat Social - anno XI - n. 2 - mar.-apr. 1967

108 le serons de moins en moins à mesure que les choses iront de mieux en mieux pour nous et que nous pourrons de plus en plus nous passer d'aide étrangère. Enfin Tchitchérine assurait que << le gouvernement soviétique, tout en indiquant l'impossibilité pour lui de limiter la liberté de la presse révolutionnaire, se déclare prêt le cas échéant à inclure dans un accord général avec les puissances de !'Entente l'engagement de ne pas s'immiscer dans leurs affaires intérieures >>. Sur ce dernier point... trêve de commentaires. C'est à ce document officiel que le correspondant du Temps se réfère plus loin en écrivant : << Le fameux manifeste de Tchitchérine daté du 4 février et adressé aux grandes puissances venait de paraître. Sans aucun doute, Lénine ne ferait que le confirmer et le commenter. Mais en quels termes? >> On verra que ce fut en des termes n'ayant rien de commun avec le pseudoléninisme de Mao et consorts. Encore que la Chine de nos jours ne soit pas exactement la Russie de 1919, e1le a d'autant plus besoin 1 comme Lénine le disait en vrai marxiste, << de nombreux rapports avec les nations plus avancées qui l'avqisinent >>, ainsi que << de techniciens, de savants et de toutes les innombrables œuvres de l'industrie universelle >>. C'est prendre le contre-pied du marxisme et du léninisme que de vouloir substituer aux progrès de la culture moderne la << pensée >> inculte et indigente d'un mégalomane en délire, incapable de dévoyer la civilisation chinoise autrement que par la force des armes. Les propositions de Lénine quant à la reconnaissance des dettes de la Russie et quant aux concessions << forestières et minières >> à des étrangers, voire à des << cessions de territoires >>, n'étaient pas propos en l'air. Il en a été question pendant plusieurs années et ce sont les courtes vues des gouvernements occidentaux qui ne permirent pas d'y donner suite. Bien entendu, Lénine et Trotski restreignaient leurs dispositions conciliantes tandis que s'affermissait le pouvoir soviétique. Il y aurait ·lieu de traiter spécialement le sujet des emprunts russes, sur lequel l'opinion publique fut et reste encore si mal informée, au détriment des << petits porteurs >> qui ont perdu là toutes leurs économies. Il n'est pas vrai qu'à cet égard le << léninisme >> se soit figé, intraitable, sur une position de BibliotecaGino Bianco -•~ LE CONTRAT SOCIAL principe intransigeante. L'interview avec Lénine, publiée ci-après, date de février 1919. Mais encore en 1921, la situation soviétique ayant assez évolué, et les bolchéviks s'avisant alors de réciprocité dans les revendications respeçtives, ils s'exprimaient en ces termes à l'inten.'... · tion des puissances de !'Entente qui allaient tenir conférence à Bruxelles : << ••• Le gouvernement de la Russie déclare que la proposition de reconnaître à certaines conditions les dettes anciennes va actuellement audevant de ses propres intentions. Dès le début de son existence, le gouvernement soviétique a posé comme un des buts essentiels de sa politique la collaboration économique avec les autres puissances. Il s'est toujours déclaré prêt à consentir suffisamment de bénéfices aux . capitalistes étrangers· qui l'aideraient à exploiter les richesses naturelles de la Russie et à rétablir son armature économique >> (texte approuvé par Lénine le 24 octobre 1921 ). Quelques jours auparavant, le 15 octobre, Tchitchérine avait écrit à Lénine pour suggérer des décisions propres, selon lui, à améliorer_ les relations soviéto-extérieures : Lénine et Trotski renonceraient à faire partie du Comité exécutif de l'Internationale communiste et une déclaration signée Lénine, Trotski et Tchitchérine · reconnaîtrait le~ dettes de la Russie tsariste, en liaison avec la promesse de crédits faite par la conférence dé Bruxelles pour l'aide aux victimes de la famine en Russie. Lénine répondit le 16 octobre : << Que je quitte; ainsi que Trotski, !'Exécutif de l'Internationale, il ne saurait en être question. Sur les dettes, il suffit d'en parler à Kra~sine. » Le 17 octobre, Tchitchérine réitéra sa proposition des trois signatures au bas d'une déclaration officielle sur la reconnaissance des dettes russes. Lénine, le 18, se prononça contre, prévoyant que ce serait interprété comme signe de faiblesse et jugeant suffisante une interview de Krassine sur ce point et une polémique de presse. Le Politburo chargea Tchitchérine de rédiger et de signer la déclaration sur les dettes de la Russie tsariste, citée plus haut, et publjée le 29 octobre 1921 (cf. Leninski sbornik, XXXV et XXXVI, Moscou 1945 et 1959). Nous reproduisons intégralement la conver-. sation de Lénine avec Ludovic Naudeau, sauf quelques lignes de commentaires inutiles à l'intelligeµce du texte principal . . , ... '

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