Le Contrat Social - anno XI - n. 1 - gen.-feb. 1967

... 10 _liance ouvrière qui avait réussi à obtenir son approbation. Largo Caballero devint, dès ce moment, un partisan convaincu de l'Allliance. · L'Alliance ouvrière s'étendit en Catalogne et, le 13 mars 1934, déclara la grève générale par solidarité avec les travailleurs de Madrid. C'était la première fois qu'une grève générale était déclenchée en Catalogne en marge de la C.N.T., voire contre sa volonté. L'Alliance ouvrière n'était déjà plus un simple slogan de propagande ; elle s'était transformée en puissant instrument de lutte. Peu à peu, une certaine sympathie se développa dans le pays - particulièrement dans les Asturies - pour cette forme de Front unique créé en Catalogne. Le parti communiste, lui, combattait l'Alliance ouvrière avec acharnement .. EN 1934, le parti communiste s'adapta au changement de tactique du Comintern motivé par la nouvelle situation en Allemagne. Hitler avait pris le pouvoir, en grande partie grâce "à la ·politique qui dénonçait le « social-fascisme », longtemps préconisée par Moscou. La présence d'Hitler à la Chancellerie du Reich inquiéta Staline, et le Kremlin- effectua un virage de 180 degrés. Il fallait chercher un contact non seulement avec les partis socialistes et les organisations ouvrières réformistes, mais aussi avec la bourgeoisie libérale. Du jour au lendemain~ la lutte contre le parti socialiste, la C.N.T. et l'Alliance ouvrière prit fin. Plus encore : il fallait réaliser le Front unique ouvrier. Mais ce front unique existait déjà sous le ·nom d 'Alliance ouvrière. · La. B:0. C., qui était la bête noire du parti ' communiste, avait été capable de créer le front unique des ouvriers et des paysans (l'Union des rabassaires, la grande organisation des paysans catalans, faisait partie de l'Alliance), tandis que le parti communiste s'était rendu odieux à toutes les organisations ouvrières. . L'Alliance ouvrière fit passer, pendant l'été de 1934., de mauvais moments à la direction du parti communiste. La campagne que cette direction avait menée contre elle s'était avérée infructueuse. L'Alliance ·continuait à progresser, laissant loin en arrière le parti communiste. Sachant que Largo Caballero était un fervent partisan -de l'Alliance ouvrière, le parti communiste essaya de l'influencer pour que le nom de l'organisation fût remplacé par un nouveau : s•iblioteca Gino Bianco LE CONTRAT SOCIAL Un individu appelé Medina - je ne pense pas que ce fût son nom véritable* - et qui parlait correctement l'espagnol, se trouvait dans notre pays, et il était l'agent de la Troisième Internationale. Margarita Nelken, alors affiliée au parti socialiste, me le présenta pour me parler des Alliances ouvrières. Il prétendait qu'il fallait remplacer ce nom par un autre - je ne me souviens plus lequel - plus en harmonie avec le vocabulaire russe, pour y faciliter l'entrée des communistes. La discussion dura plusieurs heures. A la fin, il fut convaincu qu'il n'était ni opportun ni pratique d'importer en Espagne des expressions exotiques. Le lendemain, la presse communiste donna la nouvelle que les éléments de son parti avaient décidé d'adhérer aux Alliances ouvrières (Francisco Largo Caballero : Mis recuerdos, p. 224, Ed. Unidos, Mexico 1954). A la veille des événements révolutionnaires de 1934, le parti communiste décida de donner son adhésion à l'Alliance ouvrière : « Le parti communiste, avec un grand sens des responsabilités nationales, accepta de participer aux Alliances ouvrières. Cet accord fut adopté au· cours d_ela réunion plénière du Comité central tenue les 11 et 12 septembre 1934 et repré- · senta un virage .tactique audacieux... » (Historia del Partido comunista de Espana, p.-88). « Un virage audacieux », avoue ]'histoire officielle du Parti. C'ét~it certainement la première fois que ce parti faisait « un virage tactique audacieux ». Il lui fallait, en effet, de l'audace pour adhérer à une organisation de front unique inspirée par le B.O.C. et dans laquelle celui-ci jouait un rôle important. Le breuvage était plutôt amer. Mais audacieux... LE PARTI COMMUNISTE, qui avait salué la République au cri de : « A bas la République bourgeoise ! Vivent les soviets ! » et dont l'activité jusqu'en 1934 se fondait sur la théorie que 'l'Espagne devait faire sa·« révolution socialiste », alors que la phase purement démocratigue de la République avait échoué et · que le ·mouvement ouvrier se radicalisait intensément, fit précisément en 1934 un nouveau virage audacieux et déclara que la révolution espagnole n'était pas socialiste, mais simplement démocratique-bourgeoise .. Et à l'idée de l'Alliance ouvrière, il opposa celle du Front populaire. L'Alliance ouvrière était ouvrière ; parmi les organisations qui la composaient, il n'y avait pas place pour les partis de la bourgeoisie. D'autre part, le Front populaire était ·beaucoup plus accueillant : il permettait de grouper, avec les partis ouvriers, les partis bourgeois de gauche. • C'était Vitorio CodovUa, un Argentin. '

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