4 TOUT n' ABORD Khrouchtchev a rappelé ·de multiples réactions antérieures du Parti (lire :· des dirigeants) contre le « culte » et ses « conséquences néfastes ». Il confirme expressément que le Comité. centr,al a .commencé « après la mort de Stalu?-e » a expli9-uer que c'était intolérable et contraire au marxisme. « d'exalter un individu et d'en faire· un surhomme doté de qualités surnaturelles à l'égal d'un çlieu ». En quelques mots, il reconnaît les services rendus jadis par Staline et en vient au fait : pourquoi et comment ce culte, « source de toute une série de perversions graves » ? Il invoque alors les classiques, Marx, Engels, Lénine en soulignant avec raison la « grande mod~stie » de ce dernier, dont il va citer un « document politique d'une extraordinaire importance, connu dans l'histoire du Parti comme le testament de Lénine » (mais divulgué èn U.R.S.S. pour la première foi~ ~e. jour-là, n~é pendant trente ans par les leninistes'). Il l~t les passages où Lénine, dès 1922, proposait d'écarter Staline du Secrétariat, ainsi que des lettres inédites qui discréditent Staline 6 • Il parle de la « violence brutale » de Staline, de son « esprit capricieux et despotique » vouant tout contradicteur à « l'annihilation morale et physique », y compris les fervents staliniens du XVIIe Congrès où Staline, en 1934, eut son apothéose, mais dont plus de la moitié des participants enthousiastes devaient être exterminés par la suite. Le discours secret est trop décousu, désordonné incohérent pour se prêter à une analyse contin~e, et le regroupement des thèmes exigerait un travail excessif. Voici quelques-unes des expressions textuelles qui, relevées tout au long, caractérisent les procédés de gouvernement en vigueur sous Staline : « ... abus de pouvoir ... violence brutale ... confessions obtenues au moyen de pressions physiques ... violence administrative... répressions en masse... exécutions sans procès ... violation de la légalité... abus criants... tortures barbares ... ·accusations folles... aveux arrachés de force... tortures cruelles et inhumaines... terribles sévices... horribles tortures ... ·choses abjectes ... pertes énormes de cadres par suite de répressions en masse ... méthodes de pressions physiques ... torture et oppression ... longues tortures ... actes monstrueux ... déportations en masse de peuples entiers ... pressions physiques encore plus sévères, cruelles et dégradantes .... redoutables 6. Cf. • Le Testamenf de Lénine •, in Est et Ouest, no 151 Paris, 1er mai 1956. Et : Max Eastman, • Au~our du Testa~ent de Lénine •, in Contrat social, mars-av.rd 1_965. Toute cette partie du discours secret confirme entièrement ce que Trotski a dit ou écrit sur le sujet dès 1927. Çf,. notamment La Révolution défigurée, Paris 1929. · Biblioteca.GinoBianco LE CONTRAT SOCIAL tortures.·.. méthodes terroristes... ». Khrouchtchev 1llustre ces généralités horrifiantes par certains cas particuliers, ceux de personnages haut placés, membres du Politburo ou du Comité central, staliniens à toute épreuve et cependant mis aux supplices pour leur :xtorque~ des aveux insensés, malheureux fanatiques qui proclamaient désespérément « la j~stesse de la politique du Parti » avant de mourir. Cela n'empêche nullement . Khrouchtchev d'attribuer à Staline « un rôle positif » dans ce qu'il ose appeler la « lutte id~olo~~q':1eacharnée contre les trotskistes, les zinovievistes, les boukhariniens et les autres » qu'il persiste mensongèrement à traiter d' « ennemis ~1! léninisme ». Pour lui comme pour les sovietologues étrangers, les calomnies, les inj1!res,. les arrestations les déportations, la persecution des familles 'sont une «. lutte idéologique ». Toutefois il accorde que Lénine n'aurait pas employé contre des contradicteurs la « méthode extrême » consistant à les faire disparaître. Staline, dit-il, a été « l'un des .plus forts marxistes », il a rendu « de grands services au Parti », ce qui signifie que sans cela, Khrouchtchev et ses pareils ne seraient pas au pouvoir et que le silence observé jusqu'alors paraîtrait bizarre, à juste titre. Tant que des milliers d'innocents écopent, il n'y a rien à objecter. pourvu qu'on les qualifie indûment de trotskistes et. au1res istes (indûment, car Khrouchtchev lui-meme souligne que « ces gens rom~ir:nt a':e~ .le trotskisme et revinrent aux principes leninistes »). Là où les choses se gâtent, c'est à partir de ce XVIIe Congrès de 1934 qui fit à Staline des ovations interminables et frénétiques, mais à la fin duquel Kirov eut plus de votes que Staline pour la nomination du Comité central (ce que ne mentionne pas Khrouchtchev). A cet endroit du discours, on apprend que 1.108 délégués à ce « Congrès des vainqueurs » sur 1.966, traités en contre-révolutionnaires, ont péri de mort violente, et parmi eux 98 ,m.embres du Comité central sur 139, tous staliniens de stricte observance. N'ayant plus de ci-devant trotskistes et autres istes repentis à faire disparaître, Staline s'en prenait à ses plus fidèles serviteurs. Pour quelles raisons ? Khrouchtchev parle de « su;picion maladive », de· « nervosité et hystérie », de « folie de la persécution att~ignant des proportions incroyables », de « folie des grandeurs », de « mégalomanie », etc., et il cite plusieurs circonstances qui montrent le maniaque égocentrique at~eint d'espionnite, de peurs morl;,ides, assoiffé de meurtres et de tortures, présentant tous les traits définis du para-
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