Le Contrat Social - anno X - n. 1 - gen.-feb. 1966

LE CONTRA'/' SOCIAL le parti communiste », mais qu'en même temps il s'obstinait « à conserver M. Subandrio, son ministre des Affaires étrangères et vice-président, qui avait trempé dans le putscn manqué du 30 septembre » (et qui par conséquent, complice de crimes épouvantables, aurait dû être d'urgence collé au mur, ne serait-ce que pour avoir contribué au meurtre de la femme et des huit enfants du colonel Katamso, « assassinés à l'arme blanche et littéralement hachés en menus morceaux >), selon le Figaro du 14 octobre). La même information rapportait que Soekarno « a affirmé une fois de plus que le Nasakom (nationalisme, religion, communisme) restait la devise de l'Indonésie >) et accusé les Etats-Unis de « dévier vers la droite » la révolution indonésienne. Le 10 novembre, il dénonçait la « chasse aux sorcières >) (c'est-à-dire la riposte aux communistes) comme étànt l'œuvre de « certaines puissances étrangères » : on ne connaît que trop cette musique. Le 15 novembre, FrancePresse donnait des informations confirmant que Soekarno avait approuvé le complot tendant à « liquider » tous les chefs de l'armée, mais avait attendu « d'en connaître l'issue avant de prendre ouvertement position ». Certes, il ne demandait qu'à lâcher ses alliés en cas de défaite. II louvoyait encore tandis que la guerre civile faisait raêae ,à Java, pour gagner bientôt Sumatra et les élèbes, et dès le 30 novembre courait le bruit que D. N. Aïdit, le chef communiste, avait été tué (dépêche de Tokyo à cette date). Le 24 décembre, on annonçait de Tokyo que Njoto et Lukman, autres dirigeants communistes, auraient été exécuté~, ainsi que tous les membres du Bureau pohtique du Parti, sauf un. De Singapour, FrancePresse faisait savoir le 30 décembre que la « · fureur populaire » déchaînée avait plongé l'Indonésie « dans un bain de sang » : il était 4uestion de plus de cent mille victimes communistes. Les détails et les préc1s1ons imprécises s'accumulent dans les jours qui suivent. Pour les résumer, une dépêche de Londres· au New York Times, le 13 janvier, évalue à cent cinquante mille le nombre des morts. Soekarno ramène le chiffre à quatre-vingt-sept mille, le 15 janvier, estimation officielle suffisamment effrayante, mais comme ce sont des foules musulmanes exaspérées qui s·e sont acharnées spontanément contre les communistes et leurs sympathisants, un peu partout, le dénombrement exact des cadavres était certainement impossible. En vain le général Nasution avait-il réclamé la dissolution officielle du parti communiste, le 1 or janvier : Soekarno ne voulait rien savoir, temporisant pour sauver l'avenir de ses relations avec Mao qui n'a rien pu faire pour venir en aide à son satellite indonésien ni pour protéger les Chinois si nombreux dans l'archipel. Ainsi le Parti reste légal en principe cependant que ses cadres sont décimés, son état-major exterminé, du moins si l'on en croit les plus récentes informations qui (17 janvier et 8 février) confirment la mort de )). N. Aïdit. Biblioteca Gino Bianco 59 Le monde communiste a éprouvé là sa plus lourde et sanglante défaite depuis la guerre, non pas sous les coups des « impérialistes », mais sous ceux de ses alliés neutralistes et « anti-impérialistes » islamiques. Que restet-il de ce parti qui s'enorgueillissait de trois millions de membres et de quelque dix millions de suiveurs ? Sans doute quelques milliers de militants clandestins qui se préparent aux revanches futures, mais qui pour longtemps sont exclus du pouvoir dans l'éventualité où s'ouvrirait la succession du Führer mégalomane qui se compare, entre autres, à Jésus-Christ. Quant à la mise en scène des « nouvelles forces montantes », il va de soi qu'elle est renvoyée aux calendes chinoises. Une quantité d'innocents, de pauvres diables égarés, a dû périr dans le déferlement des for ces aveugles que l'atroce provocation communiste a fait surgir. Si pitoyable que soit leur sort, il faut imaginer ce qui serait advenu si les communistes avaient réussi leur coup, sur quels charniers fantastiques ils auraient instauré leur despotisme inhumain. Et puisque le parti communiste soviétofrançais a eu le cynisme de déposer sa protestation sempiternelle à l'ambassade d'Indonésie à Paris (Monde du 1er janvier), on doit rappeler de quels crimes les communistes sont capables quand les circonstances s'y prêtent, meme dans un pays aussi civilisé que la France. Il n'y a pas si longtemps qu'à la faveur de la libération de la France par les armées anglo-américaines, les communistes déguisés en « patriotes » (alors qu'ils avaient naguère fraternisé avec les nazis, couvert de Gaulle de boue et d'injures, puis n'ont pris part à la résistance que pour obéir à Staline) profitèrent du désordre et de l'interrègne du moment pour assassiner le plus possible de leurs adversaires. D'après le colonel Passy, témoignant par écrit le 21 juin 1950, « Adrien Tixier, n1inistre de l'Intérieur, m'a, dans son cabinet, en février 1945, déclaré que d'après les renseignements qu'il avait en sa possession, il y aurait eu 105.000 exécutions sommaires entre juin 1944 et février 1945. » A l'Assemblée nationale, M. Deshors, député dont le frère fut tué dans la vraie Résistance, put affirmer sans être démenti par le gouvernement : « Cent mille personnes ont été victhnes d'exécutions sommaires après la libération >) (Monde du 7 novembre 1950). Sans nul doute, une bonne moitié ou peut-être les deux tiers environ de ces victimes ont péri de la main des communistes sans garantie légale de justice (cf. également : Maurice Ceyrat : La Trahison permanente, Paris, Editions srartacus, 1947). Il a fallu la restauration dune forte autorité gouvernen1entale pour mettre un terme à ce « bain de sang >> français, qui qualifie vraiment les connnunistes quand, payant d'audace, ils vont à l'an1bassade parisienne d'Indonésie au nom des « travailleurs » et des « démocrates » pour assurer de leur solidarité « les forces nationales et démocratiques » qui arrachent les yeux et les ongles aux généraux et coupent en morceaux des fillettes.

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