Le Contrat Social - anno X - n. 1 - gen.-feb. 1966

H. D. STASSOVA A Moscou (1919-1920) J / ARRIVAI A Moscou le 12 mars 1919. Je travaillai à la préparation du VIIP Congrès du Parti et fus désignée comme déléguée. Au congrès, je fus élue membre du Comité central et assumai de nouveau les fonctions de secrétaire jusqu'au IXr Congrès du Parti. 1919 fut une année très difficile. L'offensive des quatorze puissances 1 contre la République soviétique créait une situation si dangereuse qu'il n'était pas exclu que le Parti fût obligé de rentrer dans la clandestinité si les forces de la contre-révolution intérieure et les interventionnistes étrangers prenaient temporairement le dessus. Force fut donc de s'occuper des passeports pour tous les membres du Comité central et pour V.I. Lénine en premier lieu. Il fallait également assurer des moyens matériels au Parti. A cet effet, on imprima une grande quantité de papier-monnaie du temps des tsars (des « catherinettes », coupures de cent roubles à l'effigie de Catherine). Pour les conserver, on fabriqua des caisses de zinc où l'argent fut empaqueté ; on confia le tout à Nicolas Evguénievitch Bourénine pour qu'il les mette en sûreté à Pétrograd. Il les enterra, autant que je sache, dans la banlieue de la ville, quelque part du côté de Lesny ; par la suite, il photographia même leur exhumation lorsque le pouvoir soviétique se fut définitivement consolidé. A ce moment-là également, on établit au nom de N. E. Bourénine (en tant que né dans une famille de marchands) des papiers attestant qu'il était propriétaire de l'hôtel Métropole. Cela, pour assurer au Parti ses moyens matériels. En 1919, la. M. Sverdlov, président du Comité exéoutif des Soviets, sentant la nécessité de préparer des hommes capables de diriger sur place les organes soviétiques puisque les membres du Parti n'avaient aucune expérience dans ce domaine, créa des cours de formation. Ces cours étaient donnés dans le bâtiment qui abrite aujourd'hui le théâtre du Komsomol léniniste. Ils étaient dirigés par la vieille bolchévik Glafira Ivanovna Okoulova (Théodorovitch). Je dus faire des conférences sur le 1. En rail, leK AllléK n'uvnicnl envoyé ù OdcsKn cl ù Arkhangelsk que de faibles drluchemenls qui rcslèrenl sur place. A cela se réduit • l'oflenHive des quulurze 1>ui1mrnceK•· Tou1 le• cllché11 de l'hi11loriographie soviétique sonl de même valeur. • Et voilà comme on écrit l'hlslolre • (Voltaire). - N.d.l.R. Biblioteca Gino Bianco 47 travail du Parti dans la clandestinité. On le voit, le Parti voulait avoir, en cas dè besoin, des cadres prêts à toute éventualité. Le travail de secrétaire du Comité central du Parti, alors, se compliqua davantage. Au C.C., deux sections avaient été créées : celle des minorités nationales et celle de la jeunesse. A la première, les tâches étaient des plus complexes, car au nombre des « minorités » entraient non seulement les minorités nationales de la Russie soviétique, mais également les étrangers. A cette section, il y avait, entre autres, des représentants des Français (Jacques Sadoul), des Allemands (Arthur Gewand), des Hongrois (Bela Kun), des Tchèques (Smeral). J'étais tenue de prendre part aux réunions de ces groupes en raison de mes connaissances en langues étrangères. A propos des affaires financières du Comité central, il me souvient qu'en 1919 un soutien matériel fut accordé au parti communiste finlandais. Pour ce faire, on choisit des parures de pierres précieuses et des joyaux que je fus chargée d'emporter à Pétrograd. Elles furent mises dans une petite valise ; pour parer à tout imprévu, un agent de la Tchéka m'accompagnait. A Pétrograd, je remis les bijoux au représentant du P.C. finlandais, le camarade Sirola, que je connaissais déjà depuis 1906, époque où j'avais séjourné et travaillé en Finlande. Au cours de l'été de 1919, pendant l'offensive contre Koltchak, on le sait, des désaccords se firent jour sur la conduite des opérations. Le commandant en chef Vatsétis donna sa démission. Au Comité central, il fallait décider qui serait son successeur. Trotski était pour M. D. Bontch-Brouïévitch, en tant qu'ancien général du Grand Etat-Major. Notre « jeunesse » militaire y était résolument opposée, et elle proposa S.S. Kamenev, ancien colonel de l'état-major général, qui se recommandait par ses contacts étroits avec le Parti. J .V. Staline soutint à fond cette candidature. Le vote donna la majorité absolue en faveur de S. S. Kamenev. Trotski se leva brusquement et sortit en claquant la porte. A propos de S. S. Ka1nenev, il me revient en mémoire un autre fait le concernant. En septembre 1919, une réunion du Comité exécutif des Soviets fut décidée, à laquelle Serguéï Serguéïevitch [Kamenev] devait faire un exposé sur la situation des différents fronts. C'était son premier discours devant le gouvernen1ent, pour ainsi dire son « baptême ». Je me rappelle combien il avait le trac au pied de la tribune

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