... E. DEL/MARS propres et le dîner prêt à l'heure. Et maintenant ? J'en juge d'après plusieurs jeunes familles de mon entourage et la mienne. Le mari mène le petit au jardin d'enfants et le ramène à la maison. Il fait des courses et surveille le bambin. Le gros linge est porté à la blanchisserie, le reste pend non lavé ou non repassé jusqu'au moment où il n'y a plus rien à se mettre. La femme ne prépare le dîner que le samedi et le dimanche; les autres jours, la famille va à la cantine. A mon avis, il est temps de cesser de réclamer une aide à la femme (Kom. Prav., 17 déc. 1961). Quel attrJstant spectacle que de voir un jeune père avec un enfant dans les bras qui reste assis le dimanche dans un jardin public ... Il n'a que vingt-deux ou vingttrois ans et il aurait aimé parcourir, sac au dos, avec les géologues, les rives de !'Ankara, ou bien aller à la bibliothèque, ou faire du patin à roulettes. Au lieu de cela, il reste assis à transpirer en accomplissant son devoir de père modèle. N'ayant personne à qui confier l'enfant, lui et sa femme ne peuvent aller au cinéma qu'à tour de rôle (Kom. Prav., 24 déc. 1961). Même à Léningrad, la seconde capitale de l'U.R.S.S., la situation n'est guère brillante : La nécessité d'aller dans les boutiques, d'y faire la queue, avec en plus l'incertitude quant à ce qu'on va y trouver, absorbe la majeure partie du temps de la femme. La grande majorité des entreprises d'alimentation publique est d'un niveau très bas (ibid.). Il ne reste alors aux jeW1escouples soviétiques qu'à rêver au paradis commWliste promis par le Parti : Bientôt il sera possible de sortir directement de chez soi dans un hall plaisant rempli de fleurs et couvert de tapis qui donne accès au café de l'immeuble, à la bibliothèque, aux salles de jeux des enfants et au cinéma. Ce nouveau type d'habitat va modifier l'esprit de la famille. .Les femmes ne mépriseront plus les installations de service et les cuisines communes de l'immeuble en prétendant: « Je peux le faire plus rapidement chez moi. » Le temps n'est pas loin où un jeune couple, en s'installant dans un appartement, n'y apportera qu'une ou deux valises de linge, ses livres préférés et ses brosses à dents (ibid.). Chez les jeW1esSoviétiques, ces songes remplacent ceux qui hantaient les héros de Tchékhov il y a soixante ans. * ,,.,,. LA RÉALITÉ quotidienne en U.R.S.S., souvent très dure et parfois franchement cruelle, rend la jeW1efamille soviétique particulièrement fragile et instable. Les divorces sont très fréquents et les annonces obligatoires les concernant tiennent une grande place dans les journaux locaux du soir 6 : Des centaines de journaux locaux impriment chaque jour une série d'annonces de cette teneur : « Un tel, 6. Aucun lecteur ~tranger ne peut souscrire d'abonnement à ces journaux. Biblioteca Gino Bianco 107 demeurant à telle adresse, a déposé une demande de divorce d'avec une telle, demeurant à telle adresse. » Quelle est l'utilité de ces publications ? Amuser les philistins, comme ce couple que j'ai vu l'autre jour dans le métro se gausser à la lecture de vingt-six de ces annonces dans Moscou-Soir ? (... ) Il est grand temps de faire cesser la publication de ces annonces parfaitement inutiles. (...) Elles ne font de bien à personne (lzvestia, 24 déc. 1961). L'enquête de la Komsomolskaia Pravda s'inquiète des « mesures pour consolider la jeune famille soviétique». Pourquoi les jeunes ménages se brisent-ils si facilement ? En quoi faut-il modifier la procédure légale du mariage et du divorce pour mieux les cimenter ? Nous l'avons vu, la race des oies blanches n'est pas éteinte au pays du socialisme triomphant. De plus, « beaucoup de jeunes ne sont nullement préparés au mariage. Ils ne savent ni laver ni cuisiner, et, quand l'enfant vient, ils remettent à leurs parents le soin de l'élever. » La décision de se marier est souvent prise à la légère : Il arrive souvent que ce n'est pas un sentiment vrai qui attire les jeunes l'un vers l'autre, mais des sentiments qui, comme la flamme d'une bougie, sont éteints au premier souffle du vent. De là proviennent toutes les difficultés familiales ultérieures (Kom. Prav., 24 déc. 1961). La période d'essai est trop courte; en règle générale, les jeunes mariés n'ont qu'une connaissance très insuffisante l'un de l'autre. Ils apprennent à se connaître vraiment seulement après la naissance de l'enfant. Les jeunes filles et les jeunes gens sont trop pressés de se marier (Kom. Prav., 6 janv. 1962). Après un demi-siècle de régime soviétique, on constate en U.R.S.S. la nostalgie des longues fiançailles d'antan : Il est absurde de n'imposer qu'un délai d'une semaine entre le dépôt de la demande et l'enregistrement de l'acte de mariage. Ce délai doit être au moins d'un mois. Un délai de six mois serait encore meilleur (Kom. Prav., 24 déc. 1961). Il est indispensable d'instituer les fiançailles qui doivent être annoncées à l'usine, à l'atelier ou dans le service où travaillent les fiancés. Le mariage doit être interdit aux jeunes qui ne se connaissent pas bien. Ce n'est qu'après quatre ou six mois de fiançailles que le mariage doit avoir lieu (Korn. Prav., 6 janv. 1962). Un certain Permyak, député au soviet de l'arrondissement Frounzé, à Moscou, proteste dans les lzvestia (24 déc. 1961) contre la procédure actuelle et réclame, lui aussi, le rétablissement de l'antique coutume des fiançailles : Notre législation ne prévoit malheureusement pas de délai suffisant entre le dépôt de la demande de mariage au bureau d'état civil et l'enregistrement du mariage par ce même bureau. Ce délai est d'habitude d'une dizaine de jours, et, dans les cas exceptionnels, il ne dépasse pas deux ou trois jours. Les statistiques du bureau d'état civil de la ville de Moscou prouvent
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