Le Contrat Social - anno VI - n. 3 - mag.-giu. 1962

134 tions habituelles. le. Bougaïev parle seulement de ce qui ne devrait pas se faire: il n'est pas nécessaire de réexaminer tout, il n'est pas nécessaire d'aller aux extrêmes, d'être partial, etc . ... Au fond, l'article de le. Bougaïev vise à .tout laisser en l'état. L'auteur s'en prend aux ·opportunistes qui veulent se laisser porter par le courant. Mais est-il possible de considérer la lutte pour appliquer les décisions du XXe Congrès comme une façon de « se laisser porter par le courant » ? On doit au XXe Congrès un programme clair pour d~velopper de manière féconde l'historiographie marxtste-léniniste. Les historiens soviétiques réaliseront ce programme avec conséquence et sans jamais faiblir. Il est évident que Bourdjalov et ses camarades sentaient qu'ils pouvaient encore compter sur un appui solide du Parti. Entre-temps, les rédacteurs de Questionsd'histoire avaient tenu des conférences avec des lecteurs de la revue à Kiev et Léningrad. Un compte rendu de la conférence dans cette dernière ville ~aru d~s la LeningradskaiaPravda du 5 août 1956: signalait que E. N. Bourdjalov s'était exprimé avecune franchiseà laquelleon n'était plus habitué. Après avoir dit que «nous autres, historiens, n'avons personnepour nous donner des directives» il avait souligné que Questionsd'histoire avait levé l'«~Jerdftt » qui frappait. nombre de questions trattees Jusque-là de manière incorrecte. Portant ~ jug~m~ntde valeur s~ l'!tlstoriographiesoviénque, t1 developpaune theone de l'échelonnement de la véracité : selonlui, leshistoriens des années 20 «étaient plus vrais que ceux des années 30 lesquels l'é~aientdavantageque ceux des années' 50 ». Il souhaita que la revue accueillît des collaborateurs plus jeunes, peut-être moins érudits mais qui_seraient «plus ~bres de préjugés et tendraient moms au conformisme». Il fallait rendre justice à l'esprit «révolutionnaire»du menchévismedans la période prérévolutionnaireet brosser un tableau plu~,P~é~isdes a~':it~s des groupes et tendances antilerurustesà l'interieur du Parti. Si son discours lui valut le soutien enthousiaste de qu_elqueshistoriens de Léningrad, il y eut vite d~s signes que ~ourdj~ov .était allé trop loin. Regl~nt sa con~wte sur 1 article de Bougaïevdans la Vie du Parti et son pendant dans Kommounist A. Alexandrov rendit compte de la conférenc: dans la LeningradskaiaPravda, lança une violente attaque contre les «thèses nouvelles et fort contestables» de Bourdjalov et, au nom du :xxe Congrès, réclama•.. ... une orien~tion idéologique plus ferme, une défense plus stricte de la pureté de la théorie marxis~e, une lutt~ vigoureuse contre les vestiges de l'idéologie bourgeoise, une attaque plus décidée contre les survivances du capitalisme dans les ·esprits et une condamnation de ceux qui cultivent ces survivances. MAf:GRÉ ces avertissements des plus nets, BourdJalovet ses camarades du comité de rédaction n'en démordirent pas. · BibHoteca Gino Bianco LE CONTRAT SOCIAL Le numéro de Questionsd'histoire d'août 1956 (n° 8) contenait une réponse de Bourdjalov intitulée : « Du nouveau sur la tactique des bolchévilcs en mars-avril 1917 », ainsi qu'une étude de M. A. Moskalev sur «La lutte pour créer un parti ouvrier marxiste dans les années 90 ». Ce dernier article souleva la colère des orthodoxes, car il soutenait que Lénine avait commencé à développer l'idée d'une alliance de la classe ouvrière et du paysannat en se fondant sur l'expérience de la révolution de 1905-1907, au lieu de· remonter au milieu des années 90 comme on le faisait jusque-là. Le numéro suivant (n° 9) publiait les souvenirs d'un vieux membre du Parti, F. I. Drabkina, sur la conférence de mars 1917, souvenirs qui apportaient de l'eau au moulin de Bourdjalov. La recherche d'un jugement plus nuancé sur les ?PPO.santsà Lénine et à Marx trouva, elle au.ss1,asile ~s les colonnes de Questionsd'histoire. Le numero d'octobre (n° 10) donnait un ~ompte rendu de R. le. Ievzérov qui critiquait le livre de N. I. Kroutchkova: De l'histoire de la lutte de V. I. Lénine contre l'opportunismedans le dqmaineinternational. L'auteur, de manière trop simpliste, peignait Kautsky comme un renégat et un homme à double visage,oubliant de mentionner que Lénine lui-même avait rendu hommage à Kautsky en tant qu' éminent théoricien marxiste dans les années d'avant guerre. Dans la même veine, les rédacteurs plaidaient pour une appréciation plus objective d'hommes tels que Lassalle et Bakounine, et le numéro de novembre (no 11) publiait un compte rendu de E. I. Kouznetsova et ~. ~- Stein sur ~< L'hi~toriographieanglaiseet américaine de la revolutton d'Octobre, de l'intervention étrangère et de la guerre civile en Russie », co~pt~ re~d1;1~emarquablem,ent exempt de la rheto.r1qu~tnJurieuse e!llploy~e d'ordinaire pour les histonens «bourgeois » qw ne réussissent pas à entrer dans le moule «progressiste». Jusqu'à !'Octobre polonais et à la révolution hongroise, Bourdjalov et ses partisans purent mener une action d'arrière-garde ; mais ils étaient sous le feu d'une artillerie lourde à laquelle il était impossible de riposter. · La Pravda entra en lice\ le 20 novembre en publiant une lettre à la rédaction de V. Smirnov chargé du cours d'histoire du Parti à l'université de Moscou, lequel s'en prenait vivement à l'article de Moskalev et accusait Questionsd'histcnre qui «sous prétexte de critiquer les conséquences d~ culte de la personnalité », entreprenait de « réviser (...) des questions depuis longtemps tranchées par. le Parti et de jeter le doute Sllf des vérités indiscutables». La Vie du Parti révélait dans son numéro dt! décembre (n° 23), qu'une discussion sur la position de Questionsd'histoire avait été ouverte « à la section d'histoire de l'université d'Etat de Moscou et dans diverses autres institutions de recherche et d'enseignement » : les débats avaient démontré que « les milieux savants condamnaient les erreurs commises.par la revue ».

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