Le Contrat Social - anno V - n. 5 - set.-ott. 1961

DOCUMENTS téristique principale de cette société, dont la majeure partie des moyens de production et d'échange appartient à une classe peu nombreuse d'individus, tandis que l'immense majorité de la population se compose de prolétaires et semiprolétaires que leur situation économique contraint, en permanence ou par périodes, à vendre leur force de travail, autrement dit à se louer comme salariés aux capitalistes et à produire, par leur labeur, la rente des classes supérieures de la société. Le champ où dominent les rapports de production capitalistes ne cesse de s'étendre à mesure que le constant perfectionnement de la technique, accroissant l'importance économique des grandes entreprises, élimine les petits producteurs indépendants, transformant ainsi une partie de ceuxci en prolétaires, réduisant le rôle des autres dans la vie économique de la société et, par endroits, mettant ceux-ci sous la dépendance plus ou moins complète, plus ou moins pénible du capital. Ce même progrès technique permet en outre au patronat d'employer de plus en plus la maind' œuvre enfantine et féminine dans le processus de la production et des échanges. Mais comme d'autre part ce progrès entraîne une diminution relative des besoins.du patronat en main-d'œuvre ouvrière, la demande en force de travail retarde nécessairement sur l'offre, ce qui en conséquence accroît la dépendance du salariat vis-à-vis du capital et accentue le degré de son exploitation. Cet état de choses dans les pays bourgeois et la concurrence réciproque toujours plus âpre à laquelle ces pays se livrent sur le marché mondial rendent de plus en plus difficile l'écoulement de marchandises produites en quantités toujours croissantes. La surproduction, qui se traduit par des crises industrielles plus ou moins aiguës suivies de périodes plus ou moins longues de stagnation économique, est la conséquence inévitable du développement des forces productives de la société bourgeoise. Crises et périodes de stagnation industrielle ne font à leur tour que ruiner davantage les petits producteurs, accroître encore plus la dépendance du salariat vis-à-vis du capital, et accélérer l'aggravation, relative et parfois même absolue, de la condition ouvrière. Ainsi le perfectionnement de la technique, qui entraîne une plus grande productivité du travail et l'accroissement de la richesse publique, a pour effet dans la société bourgeoise d'accroître l'inégalité sociale, d'accentuer l'écart entre possédants et non-possédants et d'aggraver le chômage non secouru ainsi que les diverses privations de couches de plus en plus larges des masses ouvrières. Mais à mesure que grandissentet se développent les contradictions inhérentes à la société bourgeoise grandit aussi le mécontentement de la masse laborieuse exploitée envers l'ordre de choses actuel, grandissent le nombre et la cohéBiblioteca Gino Bianco 287 sion des prolétaires et s'exacerbe la lutte contre leurs exploiteurs. En même temps, le perfectionnement de la technique, concentrant les moyens de production et d'échange et généralisant le processus du travail dans les entreprises capitalistes, crée à un rythme de plus en plus rapide la possibilité matérielle de substituer aux rapports de production capitalistes des rapports de production socialistes - c'est-à-dire d'accomplir la révolution sociale, but final de toute l'action de la social-démocratie internationale en tant qu'expression consciente du mouvement de classe prolétarien. Après avoir remplacé la propriété privée des moyens de production et d'échange par la propriété collective et créé une organisation rationnelle du processus de production collective afin d'assurer le bien-être et le développement complet de tous les membres de la société, la révolution prolétarienne abolira la division en classes de la société et par là même libérera toute l'humanité opprimée, car elle mettra fin à toutes les formes d'exploitation d'une fraction de la société par une autre. La condition nécessaire de cette révolution sociale est la dictature du prolétariat, c'est-à-dire la conquête par le prolétariat d'un pouvoir politique qui lui permette d'écraser toute résistance des exploiteurs. S'assignant la tâche de donner au prolétariat la capacité de remplir sa grande mission historique, la social-démocratie internationale l'organise en parti politique indépendant opposé à tous les partis bourgeois, dirige toutes les manifestations de sa lutte de classe, démasque devant lui l'opposition irréductible entre les intérêts des exploiteurs et ceux des exploités et lui explique la portée historique et les conditions nécessaires de la révolution sociale imminente. En même temps, elle met en lumière devant la masse des autres travailleurs exploités sa situation sans espoir dans la société capitaliste et la nécessité de la révolution sociale dans l'intérêt de son propre affranchissement de l'oppression et du capital. Le parti de la classe ouvrière, la social-démocratie, appelle dans ses rangs toutes les couches de la population laborieuse exploitée, pour autant qu'elles adoptent le point de vue du prolétariat. Pour atteindre leur but final commun, conditionné par la domination du mode de production capitaliste dans le monde civilisé, les socialdémocrates de tous les pays doivent s'assigner des tâches immédiates dissemblables, attendu que ce mode de production n'est pas partout développé au même degré et que son évolution dans les divers pays s'opère dans des conditions politiques et sociales différentes. En Russie, où le capitalisme est déjà le mode de production dominant, subsistent encore beaucoup de survivances de notre ancien régime précapitaliste fondé sur l'asservissement des masses laborieuses aux grands propriétaires, à l'Etat

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