Le Contrat Social - anno V - n. 4 - lug.-ago. 1961

N. IASNY La réduction de la journée de travail de huit à sept heures (six pour les travailleurs du sous-sol et d'autres travaux pénibles) faisait partie des directives pour le sixième plan quinquennal adoptées en février 1956. Grande aurait été son importance s'il ne s'était agi d'une mesure de pure démagogie. Elle ne figurait pas dans le projet présenté au congrès du P. C. de !'U.R.S.S. ; incluse dans les directives sur une initiative spontanée du congrès, elle ne fut donc pas incorporée à la structure générale de l'économie projetée par les directives. Cette promesse restera pratiquement lettre morte pendant les quatre premières années, à trois mois près, de la période quinquennale. Officiellement, la décentralisation commença avec le décret de mai 1955 sur la décentralisation de la direction de l'agriculture, mais les modestes mesures prescrites s'accompagnaient d'un renforcement considérable de l'autorité du Parti, strictement centralisé ; les dispositions du décret ne furent d'ailleurs pas respectées, de sorte que cette mesure doit décidément être classée comme . nuneure •. Nous avons déjà fait allusion au déclin des taux de croissance en 1956-1958, mais il vaut d'y revenir. Le plan connu sous le nom « Staline change le climat de la Russie», charlatanisme à une échelle gigantesque, montrait qui, pendant les dernières années de la vie de Staline, avait en main la planification et ce qu'on pouvait en attendre. Trop de grands travaux ayant été mis en route, fort peu avaient été achevés, ce qui, à la longue, ralentit la croissance de l'économie. Les « cinq grands projets staliniens d'édification du communisme », approuvés dans la deuxième .moitié de 1950, furent probablement les premiers grands programmes d'investissement qui inaugurèrent la période néfaste de trop nombreux travaux en cours. L'important pour la présente analyse, c'est que le phénomène ne s'arrêta pas à la mort de Staline, mais s'intensifia, ou en tout cas se poursuivit sans rencontrer d'obstacle jusqu'à ce qu'il se traduise en 1956 par une réduction des taux de croissance. Il est possible que cette réduction ait été la principale raison pour laquelle le passage de la congélation à la réfrigération fut remplacé, en décembre 1956, par le dégel proprement dit, seconde phase de la période poststaHnienne. L'éclatement du Gosplan de !'U.R.S.S. en deux organismes, l'un chargé des plans à long terme (quinquennaux et plus longs), l'autre des plans courants (annuels et plus courts), mesure décrétée en mai 1955, ~st assurément le comble de l'absurdité. (Et pourtant on récidiva en 1960, comme nous fe verrons.) La planification quinquennale, depuis sa mise en œuvre en 1928-1929, toucha le fond dans les directives sur le cinquième plan quinquennal approuvées par le XIXe Congrès en octobre 1952. Il faut y regarder de près pour découvrir des améliorations sensibles dans celles qui suivirent, les directives sur le sixième plan Biblioteca Gino Bianco \. 219 quinquennal, approuvées en février 1956, qui témoignaient, dans l'ensemble, de la même absence de réflexion, de la même crainte de tout ce qui est tant soit peu nouveau. Car il n'est pratiquement rien dans ces directives qu'on n'eût pu y trouver si l'époque stalinienne s'était prolongée jusqu'à la fin de 1956. Un exemple particulièrement frappant du manque de réflexion à l'échelon le plus bas pendant cette période (le fractionnement du Gosplan en 1955 peut être considéré comme un exemple du manque de réflexion à un échelon supérieur) est la manière dont fut opérée la réduction des prix de détail des biens de consommation avec effet du 1er avril 1953. Ces réductions avaient eu lieu tous les ans depuis I 949. On voulait naturellement faire mieux en 1953. Mais point n'est besoin d'être grand clerc en économie pour comprendre que réduire de moitié le prix de détail des pommes de terre, des légumes et des fruits; denrées particulièrement rares (pommes de terre et légumes) ou quasi inexistantes (fruits), est de l'amateurisme pur et simple. Ce n'est pas non plus le moyen de gagner la faveur de la population, but de la manœuvre. Il est évident qu'appartenir à l'entourage immédiat de Staline n'était pas une bonne école de direction en matière économique. Le Khrouchtchev de 1960 n'était pas celui de 1953. Le dégel LE MOIS de décembre 1956 semble pouvoir être considéré comme la fin du dégivrage initial. Les décisions du Comité central réuni en décembre de · cette année-là et intitulées « Exécution du sixième plan quinquennal et instructions en vue de rendre plus exactes les prévisions pour 19561960 et le plan économique national pour 1957 » et « Problèmes concernant l'amélioration de la direction de l'économie nationale» 14 , représentaient une tentative sérieuse de remonter le courant, bien qu'il ait fallu rapporter en hâte certaines mesures prévues. La première de ces résolutions proclamait la fin de la « planification par acclamations », remplacée par une planification réaliste. Elle laissait présager la fin prématurée du sixième plan quinquennal (les directives du Parti sur ce plan seront abandonnées quelques mois plus tard et l'exécution du plan complètement arrêtée, pour faire place au plan septennal 19591965). Entre autres, le passage à la planification réaliste permettait de resserrer les liens entre la planification à long et à court terme, en même temps qu'il assurait la souplesse indispensable à une bonne planification et à une direction efficace de l'économie. En décembre 1956, on finit par se préoccuper de l'accumulation excessive de constructions inachevées, qui avait pris alors de telles propor14. Pravda, 25 d~cembre 1956.

RkJQdWJsaXNoZXIy MTExMDY2NQ==