Le Contrat Social - anno V - n. 4 - lug.-ago. 1961

E. PAPAGEORGJOU Comme les autres partis communistes, le K.K.E. adaptait systématiquement sa ligne à la politique soviétique de la fin des années 30. Tant que le pacte germano-soviétique resta en vigueur, le K.K.E. qualifia la lutte contre les puissances de l'Axe de guerre capitaliste, même après l'agression de Mussolini contre la Grèce en octobre 1940. Ce n'est qu'après l'invasion de !'U.R.S.S., en juin 1941, que les communistes firent volte-face pour prendre part au mouvement de résistance en Grèce, occupée entre-temps par les troupes italiennes, allemandes et bulgares. Pendant la guerre LES COMMUNISTES grecs ne tardèrent pas à montrer que leur tactique dans la résistance visait moins à libérer la Grèce qu'à créer des conditions leur permettant de s'emparer du pouvoir. Leurs premières organisations furent le Front de libération nationale (E.A.M.) et l'Armée populaire de libération nationale (E.L.A.S. ), auxquelles s'ajouta plus tard l'Organisation pour la protection des combattants populaires (O.P.L.A., ce qui en grec signifie aussi : armes). Le recrutement fut volontaire jusqu'à ce qu'il devînt notoire que le K.K.E. en était l'âme. Les communistes usèrent alors de contrainte et de terreur : des réactionnaires, certains avérés, mais d'autres désignés par eux comme tels, furent assassinés, des citoyens qui hésitaient à entrer dans les organisations patronnées par le K.K.E. furent accusés de collaboration avec l'ennemi et terrorisés, de même que ceux qui cherchaient à en sortir. Les communistes firent trois tentatives pour s'emparer du pouvoir: la première fois pendant l'occupation, la deuxième aussitôt après la libération, la troisième après la fin de la guerre. C'est ce qu'on appelle. en Grèce les « trois rounds». Le premier round, qui commença en septembre 1943, fut marqué par une intensification du recrutement forcé pour l'E.A.M., l'E.L.A.S. et l'O.P. L.A. nouvellement fondée. Simultanément, une campagne de terreur était lancée contre les organisations de résistance non communistes, tentative couronnée de succès en ce qui concerne l'E.K.K.A. (dont le chef, le colonel Psarros, fut assassiné) mais qui échoua vis-à-vis de l'E.D.E.S. Les communistes essayèrent, d'autre part, de {'rendre en main les forces grecques qui combattaient au Moyen-Orient aux côtés des Alliés ; à cette fin, leurs partisans y organisèrent en avril 1944 une rébellion qui fut réprimée, non sans dommage pour le prestige de la Grèce et de son armée libre. Néanmoins, le rôle et la force relative des communistes dans la résistance leur assurèrent une voix dans les plans relatifs à la période qui devait suivre la libération. En septembre 1944, ayant accepté de participer à un gouvernement dit d'«union nationale», le K.K.E. signa l'accord de Caserta qui rendait ses guérillas responsables Biblioteca Gino Bianco 209 devant ledit gouvernement, ce qui du même coup les plaçait sous les ordres du commandant en chef des troupes britanniques envoyées en Grèce après le retrait des Allemands. Le 3 décembre 1944 - 68 jours seulement après l'accord de Caserta et 52 après la libération de la capitale - le K.K.E. tentait de nouveau de prendre le pouvoir en déclenchant un soulèvement armé, appelé « bataille d'Athènes », car il était concentré autour de cette ville. La révolution dura un mois et infligea des dommages et des souffrances dont la Grèce épuisée se serait bien passé. Avec un mépris brutal pour les vies et les biens, les forces communistes tuèrent des milliers de citoyens (35.000 environ), pillèrent maisons et établissements de commerce et prirent un grand nombre d'otages dont beaucoup ne purent payer leur rançon. Le 10 janvier 1945, les communistes demandèrent un armistice; leur capitulation fut entérinée par l'accord dit de Varkiza signé un mois plus tard. En raison probablement du climat de l'opinion mondiale qui continuait à voir dans tous les éléments de résistance des alliés qui avaient contribué à la victoire sur l'Axe, les hauts dirigeants communistes purent échapper aux sanctions pénales, les conséquences retombant sur les lampistes. La guérilla LE 12 FÉVRIER 1946 - premier anniversaire de l'accord de Varkiza - le Comité central du K.K.E., réuni en séance plénière, décidait de tenter une fois de plus de s'emparer du pouvoir, cette fois en organisant une guerre de partisans. Un des atouts essentiels de l'entreprise était l'appui actif que l'on pouvait attendre de la part des Etats limitrophes dominés par les communistes, Albanie, Bulgarie et Yougoslavie (encore dans le camp soviétique). De plus, le K.K.E. disposait de combattants et de stocks d'armes cachés, alors que l'armée grecque, en pleine réorganisation, était réduite et mal équipée. Malgré leur avantage initial, les guérillas communistes furent écrasées, après trois ans ( 19461949) d'une lutte qui ravagea le pays. Leur défaite fut due à plusieurs facteurs. En premier lieu, grâce à l'aide matérielle des Etats-Unis le gouvernement avait pu renforcer son armée, la doter d'armes modernes et l'adapter aux exigences de la guerre de partisans. Chose plus importante peut-être, un terrorisme brutal - villages entiers rasés, enfants enlevés et massacres sans discrimination - fit perdre aux communistes le soutien qu'ils auraient pu attendre de la population. Ils furent aussi affectés par la décision de la Yougoslavie - après sa défection du bloc soviétique en 1948 - de fermer ses frontières avec la Grèce, privant ainsi le K.K.E. d'une base d'opérations. Les pertes et dommages infligés à la Grèce pendant la guerre de partisans furent lourds. Les chiffres officiels publiés à la fin des hostilités

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