Le Contrat Social - anno IV - n. 2 - marzo 1960

B. SOUV ARINE naux communistes pullulent. Paris ne compte pas moins d'une douzaine de firmes communistes d'édition, sans--p- arler des librairies soviétiques russes, et les principales firmes « bourgeoises » se disputent l'honneur d'éditer les œuvres de Khrouchtchev ou d'autres auteurs communistes. Toute la population du globe est submergée, harcelée de propagande soviétique. La presse américaine notamment ne cesse de publier du Khrouchtchev : interviews, déclarations, notes diplomatiques, discours, rapports, propos à bâtons rompus, improvisations de toutes sortes. Le New York Times a donné en priorité deux interminables interviews du personnage. La «chaîne » des journaux Hearst a largement répandu une longue interview prise par M. Hearst junior lui-même. Les agences United Press et Associated Press en ont fait autant. Le Columbia Broadcasting System a montré Khrouchtchev à la télévision, en le faisant discourir. Mme Roosevelt, Adlai Stevenson, le sénateur Humphrey, l'exgouverneur Harrimann, Walter Lippmann et l'on ne sait plus combien d'autres l'ont interrogé pour rapporter pieusement ses réponses, reproduites dans d'innombrables feuilles. D'autres interviews copieuses accordées au Daily Express, au Figaro, au Toronto Telegram, au Grand Rapids Herald, à des journaux japonais, égyptien, brésilien, sans parler de la presse communiste qui paraît librement, ni des conférences de presse, ni de la lettre à Bertrand Russell, etc., ont paru partout. En tête de Foreign Affairs on a pu lire sur dix-huit pages un article de Khrouchtchev dont le New York Times a réimprimé le texte intégral. Le Philadelphia lnquirer a lancé à grand fracas de publicité << Nikita Khrushchev's Blueprint for the Future »pendant plusieurs jours avec des titres énormes. Tout cela est traduit, retraduit, publié, republié partout dans le monde. En France, à la veille de la visite attendue, une demi-douzaine de volumes ou recueils de et sur Khrouchtchev s'offrent au public avec une réclame coûteuse et tapageuse. Il faudrait des pages et des pages pour ne mentionner que succinctement les publications pléthoriques qui, urbi et orbi, vantent les promesses et les réalisations communistes. Pour Ilitchev, cela revient à « fermer hermétiquement l'accès des pays capitalistes aux idées du communisme ». On ne saurait concevoir meilleure démonstration de mauvaise foi et d'hypocrisie, condamnant toute tentative d'entente ou de compromis avec des ennemis de cette espèce. Pas un mot de leur part ne mérite la moindre créance. Chaque fois qu'ils changent de ton ou de vocabulaire, ils ne le font que pour mieux avancer vers leur but final. ILITCHEV, tantôt citant, tantôt paraphrasant Khrouchtchev, s'évertue à démontrer que la coexistence pacifique est compatib]e avec la cc lutte idéologique» et même qu'elle BibliotecaGino Bianco 69 l'implique : << Penser que la coexistence pacifique exclut la lutte, c'est ne rien comprendre aux lois de l'évolution sociale (...) Il ne peut pas plus y avoir de coexistence pacifique entre les idéologies qu'il ne peut et ne sera jamais possible de réconcilier la lumière et les ténèbres ». Dans sa conclusion, le porte-parole de Moscou affirme : << L'ordre capitaliste périra parce qu'il est condamné par l'histoire. » Il s'agit donc de discerner par quels moyens a lieu la « lutte idéologique » ; comment la lumière communiste vaincra les ténèbres capitalistes ; et pourquoi l'Union soviétique, avec l'aide de la Chine et des pays satellites, se donne tant de mal pour liquider un capitalisme déjà condamné par l'histoire. Khrouchtchev et Ilitchev proclament le caractère inexorable de la « lutte idéologique » mais ils la nomment« coexistence pacifique» parce qu'elle ne comporte pas l'usage d'armes nucléaires. Cependant toute lutte exige l'emploi de certains procédés, de certaines techniques. Quels sont ceux et celles des communistes? Il faut lire dans les actes, non dans les paroles des champions de la « lutte idéologique», ce qu'on oublie trop souvent de faire à Paris, à Londres et à Washington. Maintes fois les chefs d'État, de gouvernement ou de la diplomatie ont jugé opportun de noter que le ton d'un Staline ou d'un Khrouchtchev était un peu moins dur, ou plus amène, ou moins provocant que la fois précédente. Chaque fois ils se trompaient en confondant la forme et le fond. Jamais les communistes n'ont varié dans leurs prétentions conquérantes. Ils ont pu temporiser, louvoyer, adoucir parfois leur ton, manœuvrer selon les circonstances, ils ne renoncent à rien de leurs plans d'ensemble. Donc en lisant dans leurs actes passés et présents, on sait quels seront leurs moyens d'action futurs. Les armes non nucléaires de la « lutte idéologique » sont le mensonge, la calomnie, l'intrigue, le noyautage, la provocation, l'espionnage, l'intimidation, la démagogie, l'imposture, le chantage, le nationalisme, le fanatisme, l'exploitation des malheurs publics, la culture des intérêts égoïstes, l'achat des consciences. Ce sont les armes dont les Occidentaux ne savent pas faire usage, de sorte que ladite «lutte idéologique » se déroule toujours à sens unique, avec les avantages que comportent l'initiative, l'ardeur agressive et l'absence de scrupules. Contre cet esprit d'entreprise stimulé par les succès antérieurs et la conviction d'aller dans le sens de l'histoire, les démocraties devront tôt _ou tard se départir de la simple défense passive. Il est admis que des nations civilisées ne sauraient s'abaisser à imiter les communistes de moralité rétrograde, à recourir aux mêmes voies et moyens. Cela n'interdit pourtant pas de leur opposer une résistance efficace, ni de riposter à leurs efforts. Aucun pays ne s'abstient de produire ou d'employer les armes correspondant à celles de tout ennemi éventuel, à moins de se reconnaître vaincu d'avance. Même en répugnant

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