Le Contrat Social - anno IV - n. 1 - gennaio 1960

46 n'apparaît que rarement dans les textes publics en Union soviétique. EN RAISON du peu d'informations sur cette question, l'auteur avait décidé de faire de la nomenklatoura du Parti l'un des principaux sujets de son enquête lors d'un récent voyage d'études en Union soviétique. Il eut des entrevues avec nombre de personnes occupant des postes de responsabilité dans des usines, organes du Parti et sovnarkhozes (conseils économiques qui sont les organismes administratifs des nouvelles régions économiques). Si les personnes interrogées montrèrent souvent quelque gêne devant le sujet, beaucoup d'entre elles essayèrent d'expliquer sincèrement le système de la nomenklatoura, et, dans l'ensemble, les entretiens furent fructueux. Ils permirent d'établir d'abord qu'il existe effectivement un très grand nombre d'emplois industriels qui ne peuvent être occupés (ou quittés) qu'avec l'approbation du Parti. Non seulement les postes de direction mais certains emplois moins élevés dans toutes les usines importantes figurent dans la nomenklatoura de tel ou tel organe du Parti; plus le poste est élevé, plus élevé est l'organe à la nomenklatoura duquel il appartient. L'usine de roulements à billes de Minsk peut servir d'exemple de la répartition juridictionnelle des emplois dans l'industrie lourde. P. I. Iachtchéritsyne, le directeur de l'usine, déclara que son poste et celui d'ingénieur en chef figuraient dans la nomenklatoura du Comité central de l'URSS, les autres emplois importants dans celle des comités intermédiaires du Parti et ceux de chefs d'atelier dans la nomenklatoura du comité local de district ( raïkom) . Sans doute, en raison de l'accent plus faible mis sur la production de biens de consommation, les emplois de cette branche inclus dans la nomenklatoura semblent moins nombreux ; d'autre part, ils ne relèvent pas d'habitude des organes centraux du Parti, mais des organismes locaux. Ainsi le poste de directeur de l'usine de tricots Rosa Luxembourg de Kiev, entreprise modèle qui emploie 2.000 ouvriers, figure-t-il dans la nomenklatoura du comité urbain ( gorkom) et celui d'ingénieur en chef, de chef mécanicien et de chef comptable sur celle du comité de district. Bien qu'il ait été impossible de déterminer le nombre total d\~mplois couverts par la nomenklatoura en URSS et la répartition entre les divers échelons de l'appareil du Parti, les données obtenues pour la ville de Minsk, capitale de la République de Biélorussie, fournissent au moins une indication partielle. Selon Alexandre Nikonorov, premier vice-président du sovnarkhoze de Biélorussie, dans dix usines de Minsk le Biblioteca Gino Bianco L'EXPÉRIENCE COMMUNISTE poste de directeur et dans cinq d'entre elles celui d'ingénieur en chef sont dans la nomenklatoura du Comité central de l'URSS à Moscou, tandis que le poste de directeur d'une cinquantaine d'autres usines relève du Comité central de la République de Biélorussie 2 • Ainsi le haut personnel de 16 % environ des usines de la ville (dont le nombre total est de 384)3 est englobé dans la nomenklatoura· des Comités centraux de l'URSS et de la République. On ne possède pas de renseignements sur la répartition des entreprises de Minsk suivant leur importance. A supposer que les statistiques publiées pour l'ensemble de l'Union soviétique soient applicables à Minsk (et elles devraient l'être raisonnablement), on peut estimer que les dix usines dont les directeurs font partie de la nomenklatoura du C.C. de l'URSS emploient un tiers environ des ouvriers de la ville, et les quelque cinquante autres usines, dont les chefs relèvent du C. C. de Biélorussie, en utilisent presque la moitié. Un sixième seulement de la main-d'œuvre industrielle locale échapperait ainsi au système 4 • Il se peut que dans les immenses Républiques russe et biélorussienne davantage d'emplois - en particulier dans le secteur des biens de consommation - aient été placés sous le contrôle d'organes du Parti à l'échelon inférieur. Toutefois les directeurs des entreprises-clés de l'industrie lourde, telle l'usine électro-mécanique de Kharkov, figurent invariablement dans la nomenklatoura du C. ~-.de.l'URSS. Cela représente une importante linutat1on des mesures de décentralisation économique prises ces dernières années. Car, malgré l'abolition des anciens ministères économiques du gouvernement central, le C. C. du Parti conserve le pouvoir de confirmer ou de refuser les nominations ou révocations du haut personnel des grandes entreprises industrielles. Si importants que soient en principe les pouvoirs de l'appareil du Parti, le point essentiel est de savoir comment il en use dans. la pratique. Si en fait les organes du Parti n'employaient leur autorité qu'à sanctionner la sûreté politique des candidats proposés aux emplois relevant de leurs juridictions respectives, l'importance de la nomenklatoura paraîtrait relativement mineure et en décroissance avec le 'temps. Or les faits montrent qu'il n'en est rien. En cherchant à élucider le problème, il ne faut pas perdre de vue que les décisions concernant le personnel dans le domaine économique se traduisent officiellement par des décrets ou instructions qui émanent toujours de !'ad.minis- , 2. M. Nikonorov répondit à la question sans consulter de notes ; les chiffres donnés ici doivent donc être considérés comme approximatifs. 3. L'Économie nationale de la R.S.S. de Biélorussie, Moscou 1957, p. 13. 4. L'industrie de l'URSS. Manuel statistique, Moscou 1957, p. 18.

RkJQdWJsaXNoZXIy MTExMDY2NQ==