Le Contrat Social - anno III - n. 5 - settembre 1959

CORRESPONDANCE B. B. Lazarev, V. M. Tchernov, Delevski et autres, n'avait rien à voir avec une « tendance économiste ». La cause de M. Z1leski est encore moins défendable quand il prétend que les quatre numéros de la revue Narodnoié Pravo auraient été publiés en 1893 à Orel ou à Saratov (t. I, p. 132). Cette affirmation est fausse de bout en bout : aucun numéro d'une revue de ce nom n'a paru ni à Orel, ni à Saratov, ni ailleurs, que ce soit en 1893 ou à une date approchante. Il y eut en fait un groupe de vieux révolutionnaires, dirigé par Natanson, qui fonda une organisation ainsi nommée, install1 une imprimerie clandestine (non pas à Orel ou à Saratov, mais à Smolensk), publia son« Manifeste», se proposait de faire paraître une revue, mais n'en eut pas le temps: en avril 1894, la police procédait à l'arrestation de tous les membres de l'organisation. M. Zaleski essaie à présent de démontrer que je fais erreur, que ce n'est pas en 1893 mais plus tard, en 1895-96, que les numéros 3 et 4 du Narodnoïé Pravo ont vu le jour, ainsi qu'il est dit dans l'ouvrage de l'Alleroand Kluge paru en 1948, lequel se réfère luimême à l'historien polonais L. Kulczycki (éd. 1910), etc. Je sais pertinemment que la littérature étrangère sur le mouvement révolutionnaire russe fourmille d'erreurs ; en particulier, je n'ignore pas que les erreurs sont très nombreuses chez Kulczycki. Mais de M. Zaleski, qui a entrepris d'établir une « Chronologie et bibliographie» de ce mouvement, on était en droit d'exiger une discrimination élémentaire entre les différentes sources. Or il semble s'être appliqué tout spécialement à accumuler les erreurs des historiens occidentaux. Il existe une littérature russe sur N arodnoïé Pravo (par exemple les souvenirs d' Aptiekman), une histoire de son anéantissement par la police (L. P. - Manchtchikov), des index des périodiques révolutionnaires (par ex. Mme A. Mezière dans son « Lexique bibliographique»). Jamais aucun numéro de cette revue n'a paru, il est facile de s'en assurer. Peut-être les fautes sont-elles les plus nombreuses dans la soi-disant « Chronologie », où M. Zaleski tente de présenter un canevas des événements. C'est là ~n tout cas qu'elles sont les plus grossières. Alors que j'en ai relevé un grand nombre M. Zaleski réplique sur 2 points seulement. Le premier concerne la délégation russe au congrès de l'Internationale socialiste en 1896. M. Zaleski écrit textuellement dans son ouvrage : Un délégué ouvrier russe assiste pour la première fois au congrès de l'Internationale socialiste à Londres (t. I, p. 122). C'est ce passage que j'ai contesté. Personne ne nie qu'une délégation représentant les ouvriers russes ait assisté à ce congrès ; mais en une seule phrase M. Zaleski parvient à accumuler plusieurs erreurs regrettables. Il vint au congrès non pas un, mais 7 délégués, munis de mandats envoyés par les ouvriers de Russie, certains portant des centaines de signatures. Les noms de ces délégués sont connus : aucun ouvrier parmi eux, encore moins venant de Russie. L'histoire de cette délégation est connue, je l'ai précisément écrite pour la première fois, avec documents à l'appui. M. Zaleski essaie de démontrer qu'on peut discuter longuement pour déterminer qui a droit à l'étiquette de • délégué ouvrier ». Pour cela, il se réfère à l'« Annuaire ouvrier» de 1906 et à l'« Almanach de la révolution russe » de 1917. Ces références ne tranchent rien, car il y a quarante ou cinquante ans beaucoup de choses étaient ignorées qui sont connues aujourd'hui. Biblioteca Gino Bianco 321 Quoi qu'il en soit, M. Zaleski a tort d'invoquer l'« Almanach », où il est dit : Le ~ongrès de l'Internationale socialiste à Londres, auquel prenait part pour la première fois une délégation des ouvriers russes ... (p. 189). « Une délégation des ouvriers russes » et non pas « un délégué ouvrier russe ». Les représentants des ouvriers russes étaient Plékhanov, Axelrod, Zassoulitch et _autres : aucun d'entre eux ne se donnait pour « ouvrier ». Autre exemple : le déraillement du train impérial survenu près de Borki le 17 octobre 1888. M. Zaleski a attribué ce déraillement à l'explosion d'une « machine infernale », ce qu'il continue de soutenir. Cette version fit sensation à l'époque: la légende du nihiliste à la bomhe flattait l'imagination populaire. Elle devait être reprise en 1920 par Bienstock qui, en dépit de ses mérites de traducteur et de journaliste, ne pouvait prétendre au titre d'historien. Ce qui était compréhensible en 1888, concevable en 1920, est absolument impardonnable en 1959 : les chercheurs ont à leur disposition les archives les plus secrètes du gouvernement tsariste ainsi que d'innombrables mémoires de révolutionnaires de toutes nuances. Le fait que M. Zaleski ait pu, en 1956, faire imprimer un livre contenant pareille affirmation, et qu'il prétende en 1959 la soutenir en se référant à Bienstock, donne une idée de sa rigueur scientifique. La cause est suffisamment entendue. . . B. NICOLAIEVSKI. • ------------------------ Livres reçus - PIERRE FoUGEYROLLAS: Le Marxisme en question. Paris 1959, Éditions du Seuil, 173 pp. - ROLANDKRuG VONNIDDA : Anastasia. Paris 1959, Del Duca, 38 l pp. - HEM DAY : Louise Michel-Jules Verne. BruxellesParis 1959, Pensée et Action, 100 pp. - JACQUESLETHÈVE: / mpressionnistes et symbolistes devant la presse. Paris 1959, Librairie Armand Colin, collection « Kiosque », 302 pp. - ALEXISDE TOCQUEVILLE: The European Revolution. Correspondance with Gobineau. Introduced, edited and translated by John Lukacs. New York 1959, Doubleday & Company, 340 pp. - MAX EASTMAN: Great Companions. New York 1959, Farrer, Straus and Cudahy, 312 pp. - JULESISAAC: Jésus et Israël. Paris 1959, Fasquelle, nouvelle édition, 596 pp. - RAYMONDARON : Inimuable et changeante, de la [Ve à la ve République. Paris 1959, Calmann-Lévy, 265 pp. - MARIE-THÉRÈSEGÉNIN : Scènes de la vie présente. Paris 1959, É:iitions Génin, 195 pp. - MAx N0MAD : Aspects of Revoit. New York 1959, Bookman Ass., 311 pp. - GUILLAUMEDE TARDE: Lyautey. Le chef en action. Paris 1959, Gallimard, 332 pp. - ISAACBABEL: Cavalerie rouge. Traduit du russe avec une introduction par Maurice Parijanine. Paris 1959, Gallimard, 282 pp. - JEAN GOTTMANN: Études sur l'État d'lsra l t le Moyen-Orient. Paris 1959, Librairie Arm nd Colin 176 pp . •

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