QUELQUES LIVRES du Centre, expose complaisamment qu'il a choisi un sujet à la mode. Et il cite des exemples qu'on a vus à la première page des journaux. On entrevoit donc assez bien ce qu'est à ses yeux la technique, que du reste il n'aime pas, dit-il (espérons qu'il ne se déplace qu'à pied, ignore l'aspirine et qu'il a déjà jeté son· écuelle). C'est pourtant une conception qui n'apparaîtra plus guère dans la suite. Pour l'un les professeurs, pour d'autres les fonctionnaires sont des techniciens. L'un parle longuement de la technique des assemblées parlementaires. Un théologien titiste disserte sur la technique de la politique (celui-ci d'ailleurs a une bonne technique pour faire passer la muscade : il y a notamment une curieuse page où la question de la multiplicité des partis, à peine posée, disparaît sans qu'on puisse, même à _la relecture, discerner à quel moment elle est escamotée). Le directeur du Trésor expose les techniques du Trésor. Quant au conférencier qui parle des groupes de pression, il n'est pas le seul à confondre l'économique avec le technique. On se demande ce que tout cela a à voir avec le thème proposé. Nous savons très bien que toute activité humaine a un aspect technique et ce n'est sans doute pas cela que M. Trotabas voulait démontrer. Ce qu'il voulait, on l'ignore encore. Lui aussi peut-être. Et il a très sagement mis à la fin une allocution de M. Gaston Berger qui ne manque pas de finesse, mais n'est pas du tout une conclusion. Du reste, c'était la leçon d'ouverture. En terminant par là, sans doute M. Trotabas a-t-il voulu laisser entendre que tout restait encore à dire. YVES LÉVY Dernier outrage GÉRARD WALTER : La Ruine de Byzance, 1204-1453. Paris, Éditions Albin Michel, 1958, 418 pp. - IL SERAIT étonnant que l'auteur de ce livre aimât Byzance - et non seulement les derniers deux siècles et demi d'une histoire millénaire, mais encore tous ceux qui les ont précédés : il est des signes qui ne trompent point. N'importe, M. Gérard Walter a le droit d'aimer qui bon lui semble. Il était libre de choisir ce «problème » à l'exclusion de tout autre et de se tenir « strictement enfermé dans ses limites», ainsi qu'il le déclare dans une note préliminaire. Son but a été « de montrer comment marche à sa ruine un État jadis puissant et riche, mais qui n'a pas su se servir utilement de sa puissance et de sa richesse ». Il écrit encore : Mal gouverné , devenue la proie docile du capital italien, Byzance a été frappée à mort par les croisés français, complic s des marchands vénitiens. Sa prétendue renaissance, qui aurait suivi la reprise de ConsBiblioteca Gino Bianco 59 tantinople par les Grecs, n'est qu'un mythe abusivement exploité par des historiens complaisants. Je crois avoir pu le démontrer au cours de mon travail en m'appuyant sur des témoignages contemporains irréfutables. Voilà qui est net. Dieu merci, l'historien G. Walter ne saurait être taxé de complaisance et la démonstration ira bon train. On avait pris soin de nous avertir dès l'abord : Les amateurs de « tours d'horizon», de survols et autres acrobaties soi-disant historiques, n'ont pas besoin de ce livre. Et ce livre n'a pas besoin d'eux. Le ton est péremptoire. En fait d'acrobaties M. Walter s'en tient à des« loi-cadre»,« armée de libération nationale », « coexistence pacifique », « crypto-cantacuzéniens », «préalable du SaintPère », etc., menus tours d'adresse, appels du pied, clins d'œil à la galerie. Quant au survol, au tour d'horizon, ils feraient plutôt place ici à une technique et à un style cinématographiques : q11inze chapitres pour la première partie, onze pour la deuxième découpent le scénario en autant d'épisodes qui veulent tenir en haleine le spectateur - c'est-à-dire le lecteur. Pour la couleur locale, le metteur en scène s'est assuré le concours de Nicétas Choniate et de Georges Pachymère, des valeurs sûres. Soyons sérieux. Mentionnant dans sa bibliographie tel ouvrage parmi les plus généralement estimés de Gustave Schlumberger, M. Walter le juge d'un mot : « Démarquage ». Faut-il rappeler qu'avant toute chose il n'avait pas manqué de s'accorder à lui-même quelque originalité ? Il serait difficile de délivrer à M. Walter un brevet d'invention pour cela seul qu'il a prétendu souligner le rôle des croisés et du « capital » italien dans la chute de Byzance : d'autres s'en étaient avisés avant lui. La véritable innovation consistait à ignorer purement et simplement certains aspects du sujet. C'est en vain par exemple qu'on cherchera la moindre trace du mot art et même toute allusion à ce qu'il peut exprimer. Désinvolture ou tactique ? Singulier abus en tout cas d'effacer, pour les besoins de la cause, une page comme celle qu'ont laissée les artistes byzantins de la période étudiée. Et d'oublier du même coup ses écrivains, ses savants, ses humanistes - cette renaissance pour l'appeler par son nom. En d'autres termes, l'originalité de M. Walter c'est de refuser l'existence à des hommes qui firent de Byzance bien davantage _qu'un «souvenir». Page 44, nous apprenions que M. Georges Ostrogorski « est en train de renouveler l'étude de l'histoire byzantine ». Il se peut. Mais il s'agit pour l'heure de la Ruine de Byzance, et de ce livre-ci le lecteur retiendra seulement qu'il ne parvient qu'à raviver certaines irritations, sinon • • • • une 1rr1tat1on certaine. M. Walter écrit sur tout et sur n'importe quoi. Sur les luttes sociales à l'époque de la Réforme, ur la guerre de Vendée et sur Robespierre; sur Marie-Antoinette et sur César ; sur Lénine et sur le •
RkJQdWJsaXNoZXIy MTExMDY2NQ==