Le Contrat Social - anno III - n. 1 - gennaio 1959

8 années I 890, le signal de l'assaut contre la Chine fut donné par le Japon et dans le scramble for concessions qui suivit, l'Angleterre, la France et l'Allemagne prirent part à côté de la Ru·ssie. Ne pas oublier non plus qu'à la même période historique eut lieu le partage d'une grande partie de l'Afrique entre plusieurs puissances européennes, partage auquel la Russie ne prit aucune part. III DE CE BREF aperçu des faits historiques découle la conclusion, semble-t-il irréfutable, qu'au fond l'impérialisme russe prérévolutionnaire ne se distinguait en rien de l'impérialisme des autres grandes puissances. L'Empire russe a été l'un des empires du type habituel dans l'histoire mondiale et sa politique, la politique impérialiste traditionnelle. Par conséquent la naissance même de cet empire comme son expansion ultérieure ne s'expliquent ni par le «messianisme russe », ni par tout autre trait particulier à l'« esprit national russe». Si l'on admet la justesse de cette proposition, ·1a question de savoir si la politique étrangère du gouvernement soviétique peut être considérée comme une simple continuation de l'impérialisme des tsars est au fond résolue a priori. De même que le régime politique soviétique (ou l'État totalitaire contemporain en général) se distingue fondamentalement des États nationaux du type traditionnel, qu'il s'agisse de monarchies absolues, de régimes monarchiques constitutionnels ou de républiques, de même la politique étrangère d'un tel État totalitaire est quelque chose de radicalement nouveau dans le principe. Mais comme, malgré son évidence, cette différence est loin d'avoir été pleinement reconnue par tout le monde, on ne peut se borner à une affirmation sommaire et il faut soumettre la question à une analyse plus poussée. 11 ne serait sans doute pas erroné de supposer que cette illusion quant à l'identité des deux politiques russes, la prérévolutionnaire et la soviétique, provient d'une circonstance fort simple: dans les deux cas, l'expansion a souvent pour buts les mêmes régions territoriales. Pour presque chaque acte ou tentative impérialiste du gou- . , . . vernement sov1ettq~n peut trouver sans peme un précédent hisa.pf!que d'apparence convaincante. La Finlande, les pays Baltes, la Pologne, la Bessarabie, la péninsule balkanique, Constantinople, le Bosphore et les Dardanelles, la Perse, le· Turkestan turc, la Mongolie, la Mandchourie, la Corée, ces noms géographiques émaillent les pages de l'histoire diplomatique de la Russie tsariste non moins que les articles de la presse de nos jours et créent ainsi l'impression d'une continuité historique complète. Biblioteca Gino Bianco LE CONTRAT SOCIAL Mais à moins de tomber dans un fatalisme géographique, est-il admissible d'attacher à ce fait une importance décisive pour interpréter la politique étrangère soviétique ? En fin de compte, l'affaire se ramène à ceci que l'Union soviétique occupe sur le globe terrestre la même place que l'Empire russe ; par conséquent, que ses tendances expansionnistes se manifestent en premier lieu dans les mêmes régions limitrophes de ses frontières où l'Empire russe manifestait les siennes aux époques de sa croissance. On ne peut nullement en conclure que les buts, les méthodes et le caractère général de l'expansion soient restés identiques. On parle souvent - et avec raison - de l'extraordinaire envergure territoriale et du dynamisme de la politique étrangère soviétique d'après guerre. Cette politique revêt un caractère «planétaire » et cherche avec une persévérance offensive exceptionnelle à atteindre simultanément plusieurs buts en différentes parties du globe terrestre. Déjà cela seul suffirait à distinguer nettement la politique soviétique de celle de la Russie impériale qui, en règle générale, ne visait que des buts limités et dans un certain ordre. Pierre le Grand renonça rapidement à lutter contre la Turquie pour se concentrer sur la lutte pour les rives de la Baltique. Catherine la Grande se contenta de la conquête du littoral de la mer Noire et «classa» facilement le fameux « projet grec», le compensant aux dépens de la Pologne. Au congrès de Vienne, Alexandre 1er abandonna sans trop de lutte son projet. polonais dès qu'il se fut heurté à une opposition résolue des autres puissances, .y compris ses propres alliés. Nicolas 1er, à la suite d'une pression diplomatique, renonça aux avantages exceptionnels obtenus de la Turquie par la Russie en vertu du traité d'Ounkiar-Skelessi. Et après la guerre de Crimée comme après le congrès de Berlin, la diplomatie russe tira aussitôt de sa défaite les conclusions nécessaires et, tenant momentanément en réserve la question du Proche-Orient, se con- . centra sur la solution d'autres problèmes concrets - en Asie. Quelque chose d'analogue se passa aussi après la guerre russo-janonaise quand, ayant subi une défaite en Extrême-Orient, la Russie se décida à partager des sphères d'influence avec le Japon, conclut avec l'Angleterre un accord sur les affaires d'Asie centrale et après quoi seulement remit en avant ses objectifs au ProcheOrient, sous une forme assez modérée et prudente, essayant d'obtenir une solution satisfaisante par voie diplomatique. Dans certains milieux, non seulement étrangèrs mais russes, on a tendance à expliquer cette différence par la puissance militaire et économique plus grande de l'Union soviétique. 11 ne faudr~t tout de même pas exagérer cette puissance, comme il ne faut pas minimiser, rétrospectivement, la force de la Russie impériale. En tout cas, l'explication ne vaut pas pour cer- -

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